Mohamed Cheikh –  » je suis plus dans la cuisine traditionnelle revisitée : si c’est bien fait, ça marche toujours, ça touche le plus grand nombre… « 

04 juillet 2021  0  Non classé
 

signature-food-and-sens Le guide Michelin est allé à la rencontre du chef Mohamed Cheikh gagnant du concours de cuisine TOP CHEF diffusé cette début d’année sur la chaîne de télévision M6. Le jeune chef qui a travaillé auprès des plus grands chefs français est actuellement en résidence culinaire au Jardin es Plantes à Paris sous l’enseigne MANZILI, il explique comment il est en est arrivé là.

EXTRAITS – à lire ci-dessous ou en cliquant sur le LINK ICI

Le Guide MICHELIN : Racontez-nous un peu votre aventure Top Chef…
Mohamed Cheikh : Première chose, beaucoup n’auraient pas misé pour moi ! J’ai mis beaucoup de temps à m’adapter. C’est très particulier. Le premier jour, on avait interdiction d’aller sur le plateau tant que ça n’avait pas commencé. Quand on arrive dans les cuisines on se dit « Waouh ». C’est très grand. Chacun va à son poste. Là, les jurés arrivent, et on est encore plus ébahis. Ils ont une oreillette, ils parlent avec la régie, c’est très bizarre. Et là on nous donne un thème et c’est parti. Tu redeviens novice, tu galères, tu oublies des ustensiles, tu fais des allers-retours, tu cavales. Tu fais de trop grosses quantités. Tu vois dans les premiers épisodes que tout le monde cherche ses marques

Quelle a été pour vous la plus grande difficulté dans l’émission ?
Clairement, la plus grande difficulté, c’est le stress. Le mauvais stress. Pour contrer ça je suis rentré avec une philosophie simple, je me suis dit : Mohamed, il faut que tu prennes du plaisir. Il faut que tu t’amuses. Je ne voulais pas arriver avec des nœuds à l’estomac et au cerveau, avec la peur de sortir du concours. Si tu pars comme ça, impossible de profiter du truc.

Qu’est-ce qui a fait la différence entre vous et Sarah en finale ?
A mon avis, c’est le style de cuisine. Sarah n’a pas de codes, fait des associations de fou, ce qui est sa force, mais ça peut ne pas plaire à certains. De mon côté je suis plus dans la cuisine traditionnelle revisitée : si c’est bien fait, ça marche toujours, ça touche le plus grand nombre. Un bon jus, une bonne sauce, une bonne cuisson, et c’est gagné. Il y a peut-être aussi la capacité d’adaptation. Je me suis dit : Mohamed, tu as un événement à faire au George V, il ne faut pas que tu te foires. Je n’avais même plus le concours en tête. Il y avait 80 couverts, il fallait assurer. J’ai l’habitude des grosses structures, j’ai fait des banquets, je l’ai joué le plus carré possible.

Diriez-vous que Top Chef donne une image fidèle des candidats ?
Oui, à 100%. Ce que je dis dans l’émission, on ne me l’a pas fait dire. Après ils font des montages, obligatoirement, mais notre personnalité est bien là. C’est sincère. Et je suis très content de ce que j’ai vu de moi à la télé. D’ailleurs, les gens qui ne me connaissaient pas me disent que je suis le même en vrai qu’à la télé, ce qui me semble tout à fait logique.

Pourquoi vous êtes-vous lancé dans cette aventure ?
Ce qui est certain c’est que je n’ai pas fait Top Chef pour devenir une star. Je l’ai fait pour me challenger, et voir ce que je valais par rapport aux jeunes chefs de ma génération. Ce n’était pas pour passer à la télé où être connu. Je me disais : ‘va voir ce que tu vaux, va te traîner un peu dans la boue’. C’est à partir de la diffusion de ma victoire (le 9 juin dernier) que j’ai pris conscience de l’ampleur du truc. On a commencé à me dire ‘t’es un exemple pour plein de gens’, j’ai reçu des messages très touchants de Pierre Gagnaire, Régis Macron, Jérôme Banctel et d’autres… Aujourd’hui, j’ai le sentiment d’exister. C’est un métier où on n’a pas beaucoup de reconnaissance au quotidien. Et là, autant de soutien, j’en ai pleuré. Top Chef, c’est du haut niveau. Pour moi, c’est un concours qui est légitime. Pas de la même façon que le MOF ou Bocuse d’Or, bien sûr, mais ça pèse lourd. Sur mon CV, il y a écrit : gagnant de Top Chef.

Quel a été le moment le plus fort, pour vous, dans Top Chef ?
Le moment qui m’a le plus marqué, c’est le passage de Pierre Gagnaire. Honnêtement, je l’ai vu débouler comme s’il tombait du ciel. Il est incroyable. Cette gentillesse, ce bonheur qu’il porte en lui… A la fin d’une épreuve, il a eu des mots très flatteurs envers moi, je n’en revenais pas. J’ai plein d’autres bons souvenirs, j’ai kiffé du début à la fin. On a créé des liens très forts, il n’y avait presque pas de concurrence. J’ai osé dire en finale que ce n’était pas une bataille mais un match amical. Je le pense vraiment.

Comment se prépare-t-on pour l’émission ?
J’ai énormément bossé avant le concours. Je me souviens avoir passé le mois d’août dernier à faire des crèmes pâtissières et des génoises dans mon appartement, par 37°C, j’étouffais. Obligé de réviser les fondamentaux ! Du matin au soir, je retravaillais les bases, les techniques de cuissons, du salé, du sucré… Mais il y a quand même des épreuves qui m’ont pris par surprise. L’émission est pensée pour ça.

Dans Top Chef, vous avez beaucoup parlé de vos origines algériennes, et des discriminations que vous avez subies. Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
J’ai grandi à Fontenay-sous-Bois, dans le 94, j’ai un frère et une sœur. Mes parents sont Algériens immigrés, devenus Français ensuite. Je suis donc, selon l’expression consacrée, issu de l’immigration, avec la double nationalité. Je me considère surtout comme Français, et d’ailleurs quand je vais en Algérie, eux me considèrent comme un Français ! En gros, en Algérie je suis immigré, et en France je le suis aussi. C’est un problème pour plein de jeunes comme moi, qui vivent mal le truc et se disent : attends, je suis la risée de la société, je ne suis ni Français ni Algérien, personne ne m’aime, je ne suis nulle part chez moi. Les gens ne se rendent pas compte à quel point ça peut être dur à vivre.

Donc, en arrivant à Top Chef, je me suis dit : « Ce concours va être intéressant. On va forcément me parler de mes origines, il ne faut pas que j’en aie honte. Je m’appelle Mohamed Cheikh, j’ai une peau bronzée, comme disent certains, je ne vais pas cacher d’où je viens.’ Au final, voir une bonne partie de la France me suivre et me soutenir, c’est puissant. Pour moi c’est cela, la réussite : se sentir reconnu par les gens de ce pays, après avoir passé autant de temps à justifier que j’étais Français. Ça paraît con de dire ça, mais c’est sincère. C’est mon ressenti, c’est mon vécu.

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