
Balade gourmande : Art du Feu en Pays de Bitche – des villages aux bâtiments historiques, l’art de la table se nourrit de cette tradition et se marie à la perfection avec la gastronomie.

Pas de belle table, pas d’assiettes gourmandes sans le savoir-faire français. Toute cette créativité symbolise encore une région qui vit au rythme du beau! Dans l’est de la Moselle, le Pays de Bitche est le coeur battant du savoir-faire autour des Arts du feu. Une histoire séculaire, un héritage vivant porté par les générations de verriers, de céramistes et de maîtres artisans. De Saint-Louis à Sarreguemines, des villages aux bâtiments historiques qui ont traversé les siècles, l’art de la table se nourrit de cette tradition et se marie à la perfection avec la gastronomie. Chaque repas devient ainsi une célébration de la région, de ses savoir-faire ancestraux et de son art de vivre à la française.
Sarreguemines: La table est mise !
La salle à manger de l’Auberge Saint Walfrid (photo DHV)
Avant même de partir découvrir l’histoire de la faïence nous posons notre valise à l’Auberge Saint Walfrid à Sarreguemines, chez Stephan et Sophie Schneider. Une halte toute à la fois gourmande et pleine charme dans un cadre que la maitresse des lieux a sublimé avec sa passion de la faïence et de la cristallerie. Après un déjeuner “couleur locale” à la Brasserie du Casino, table que l’on doit aussi à Stephan et qui se trouve dans une maison historique en bordure le la Sarre, qui autrefois offrait aux ouvriers un lieu de loisirs et de restauration, nous partons à la rencontre de cette Manufacture qui a fait vivre la cité pendant plus de deux siècles .
La Brasserie du Casino est aujourd’hui monument historique (Photo DHV)
Mehlknepfles maison aux poireaux, croûtons, tranches de lard paysan (photo DHV)
Quenelles de Brochet de l’étang de Gondrexange sauce Nantua (photo DHV)
Le musée de la Faïence de Sarreguemines , a trouvé place dans les anciens bureaux de la direction. C’est une magnifique déambulation au coeur de l’art de vivre qui trouve ses origines en 1790 lorsque trois négociants en tabac s’installent ici, attirés par le fleuve Sarre et les forêts vosgiennes. Dès la fin du XVIIIe siècle, la manufacture de Sarreguemines devient un acteur clé de l’industrie de la céramique. La région, avec ses terres riches en kaolin, permet la production de faïence fine, un matériau plus blanc et plus raffiné que la faïence classique. Ce savoir-faire, transmis de génération en génération, donne naissance à des pièces, destinées tant à la décoration qu’à l’usage quotidien.
Ce panneau (1890 ) « Le Boulevard », était au siège social parisien de la Faïencerie.(Photo DHV)
Au XIXe siècle, la manufacture s’illustre par la production de services de table qui font la renommée de la ville. Ces pièces sont souvent décorées de motifs floraux ou de symboles régionaux, témoignant de la volonté de marier art et utilité.
Au XIX ème les motifs représentaient des personnages célèbres, des scènes de la vie quotidienne ou militaires (Photo DHV)
On connait tous cette vaisselle qui occupait les armoires de nos grands mères. Le service à la française, conçu pour les repas royaux, se transforme au fil du temps en un service plus moderne, inspiré par les évolutions du goût et des techniques culinaires. Les années passent et le style évolue : de l’éclectisme au rococo, jusqu’à l’Art nouveau. Le joyau du musée au delà de ses extraordinaires collections, garde en son coeur un sublime jardin d’hiver, classé monument historique avec sa fontaine en majolique – allégorie de la terre, de l’eau et du feu.
Le Jardin d’hiver et son extraordinaire fontaine en Majolique (Photo DHV)
Des vases monumentaux d’esprit baroque dans le style art nouveau (photo DHV)
En 2007, c’est la fermeture définitive. Sarreguemines ne fabrique plus, mais elle se vit dans presque tous les foyers français !
Le moulin de la Blies est aujourd’hui musée et atelier pédagogique (Photo DHV)
Pour retrouver un peu de douceur, toujours à Sarreguemines, une belle escale tout chocolat s’impose chez Franck Kestener
Les Kestener Père et fils: Une belle histoire de transmission (Photo DHV)
Né au coeur d’une famille ou boulangerie et pâtisserie sont le quotidien, Franck est très vite attiré par la cuisine. Reconnu en pâtisserie, il fréquente 10 mois les cuisines de l’Elysée pendant son service militaire . De retour en famille, le chocolat s’impose . Gagnant du championnat du monde du chocolat, MOF chocolatier confiseur, champion du monde de pâtisserie il s’adonne dans ses ateliers aux côtés de son papa Olivier à sa passion …”le chocolat est un produit unique, on peux s’exprimer avec lui dans les formes, dans les couleurs, avec tous ses terroirs. Le chocolat de Papouasie nouvelle Guinée s’associe à merveille avec une infusion de feuilles de laurier” Côté local, Franck a crée “La perle de Lorraine”, caramel, eau de vie de mirabelle, pâte de fruit mirabelle et praliné croustillant… si son créateur en est fou… nous aussi !
Des créations aussi variées que gourmandes ! (Photo DHV)
Diner étoilé et nuit sereine à l’Auberge Saint Walfried
Avant de rejoindre Saint-Louis-Lès-Bitche et ses cristalleries, dont le nom même résonne à nos oreilles comme l’accession à un rêve… nous avons rendez-vous au Restaurant Dimofski à Woefling les Sarreguemines.
Julien Dimosfski, un autre exemple de transmission (Photo DHV)
En bordure de route, nous ne nous attendons pas à une aussi jolie table dans un cadre épuré. Julien Dimofski – Trophée Grand de Demain 2017 et BiB Gourmand y propose une cuisine bien faite, simple et sans chichis, de produits frais et régionaux qui arrivent au plus loin des Vosges, comme ses pigeonneaux fermiers. Sa clientèle d’habitués apprécie toujours l’accueil de Véronique, sa maman qui investissait elle aussi autrefois les fourneaux familiaux .
Pigeonneau fermier au jus de persil plat et truffe (Photo DHV)
Plus classique mais toujours délicieux: Escargots en coque de pomme de terre noix pointe d’ail persil (Photo DHV)
Saint-Louis-Lès-Bitche : La Cristallerie Royale et la Renaissance de l’Art Verrier
Perdue dans la campagne mosellane, la cristallerie de Saint-Louis-Lès-Bitche , fondée en 1586, est une des plus anciennes et prestigieuses du pays. Depuis plus de 430 ans, le village a vu ses artisans transformer le sable et le plomb en sublimes pièces de cristal, symbole même du luxe à la française.
La grande halle historique de la cristallerie (1770) reste authentique (Photo DHV)
Au XVIIIe siècle, c’est sous le règne de Louis XV que la verrerie prend son véritable essor, en partie grâce à une relance royale qui propulse la cristallerie au sommet de l’art verrier européen. Exceptionnellement reçus dans la Maison du Maitre à l’occasion des Michelin 2025, nous avons pu en admirer l’élégance et le luxe.
Le soufflage du verre se fait toujours traditionnellement à la canne
La taille des facettes est un travail d’orfèvre (Photo DHV)
Une petite dizaine de MOF à la cristallerie . Dans la région, deux écoles préparent au métier de verrier
La cristallerie réalise le flacon du » Louis XIII Cognac Rémy Martin » Ici des chutes qui vont être recyclées
(Photo DHV)
La visite de la halle historique, toujours en activité nous a permis d’approcher l’alchimie du cristal qui continue de faire rêver. À plus de 1450°C, la fusion donne ici naissance à des pièces uniques, façonnées à la main par des verriers spécialisés . Qu’il soit souffleur ou tourneur il respecte des gestes transmis de génération en génération. Le musée est une visite dans le temps et dans l’art de la table, et lorsque l’on a la chance de découvrir toutes les étapes de ce travail d’orfèvre, on conçoit sans aucun problème que cela puisse être parmi les cristaux les plus chers au monde.
Une réception à la Maison de maître de la cristallerie de Saint Louis (Photo DHV)
Carafe ( rhum arrangé à la mirabelle de Patrick Bertin) et verres Saint Louis de la collection Twist 1586 (Photo DHV)
Collections de verres Les endiablés Chambord de José Lévy (Photo DHV)
Dans l’atelier des pièces modèles sous le signe du bleu ! (Photo DHV)
Dans le musée des collections à faire rêver ! (photo DHV)
Le premier presse-papier voit le jour en 1845 à la Cristallerie Saint-Louis. Quelques objets mythiques comme le presse-papier sulfure conçu pour le couronnement de la reine Elizabeth II en 1952 va permettre de diffuser cette mode partout dans le monde. . C’est la dernière cristallerie à préserver ce savoir-faire en réalisant chaque année des presse-papiers de collection, en série limitée et numéroté. Les célèbres pièces de la période Art Nouveau, notamment les vases décorés de motifs naturels, sont témoins de l’évolution de cet art exceptionnel.
Dalhia Noir: Une des sulfures emblématique de la manufacture (Photo DHV)
Meisenthal : Le Verre de Table et l’Art Verrier Contemporain
A Meisenthal, les bâtiments contemporains du Centre international d’art verrier ont été inaugurés en 2018
Emile Gallé à travaillé à Meisenthal. Au musée, un des 6 exemplaires existant au monde du Vase à la Carpe.
Vase à la Carpe : Verre souffle-fixe, côtes vénitiennes, émalllé, doré 1878 (Photo DHV)
Non loin de Saint-Louis-lès-Bitche, la Verrerie de Meisenthal, fondée en 1704, a connu un renouveau spectaculaire au cours des dernières décennies. Fermée en 1969, la verrerie a rouvert ses portes à l’initiative des collectivités locales en 1992 en tant que musée et centre international d’art verrier. Ce site emblématique, où plus de 600 ouvriers travaillaient au début du XXe siècle, est désormais un lieu de création et d’innovation, attirant des designers et des artistes de renommée internationale.
Les fameuses Boules de Noël qui font accourir les collectionneurs ! (Photo DHV)
La production de la boule de Meisenthal, jadis un sous-produit, est le symbole de l’exceptionnelle maîtrise des artisans du verre. Crée chaque année pour les fêtes de fin d’année suite à un concours de designer, elle est devenue un objet très recherché des collectionneurs qui s’installent dès le matin dans l’enceinte de la verrerie, pique-nique sur place, et attendent que la boutique ouvre ses portes! Un succès sans précédent. Les boules anciennes en rupture s’arrachent à prix d’or sur les sites de vente aux enchères. En 2017, une importante rénovation des bâtiments a permis d’ajouter des ateliers de production modernes tout en préservant l’authenticité du site. En 2022, plus de 100 000 visiteurs sont venus découvrir l’univers fascinant du verre soufflé et de l’art verrier. Ces artisans d’exception continuent à incarner une tradition tout en s’ancrant dans l’innovation, réaffirmant ainsi le rôle du verre dans l’art de vivre français. A Meisenthal, le 15 juin ne pas rater un événement exceptionnel : La Brocante du Verre !
Quelques modèles en vente à la boutique (Photo DHV)
L’âme de la Moselle se révèle à travers ses arts du feu : la cristallerie de Saint-Louis, la verrerie de Meisenthal et la faïencerie de Sarreguemines sont les témoins vivants d’un savoir-faire ancestral qui continue de rayonner. Ces traditions ne se contentent pas de préserver un passé glorieux ; elles s’adaptent aux enjeux contemporains, réinventant sans cesse la manière de vivre, de manger et de célébrer l’art de la table. La Moselle, entre terre de feu et terre de savoir-faire, est plus que jamais un carrefour où passé et présent se rencontrent dans une explosion de créativité et de raffinement.
Infos: https://www.mosl.fr/fr – https://www.tourisme-paysdebitche.fr