Eneko Atxa et Eneko Axpe sur Madrid Fusion : l’IA en cuisine entre génie créatif ou banalisation du goût ?

05 mars 2025  0  Food&Sens Broadcast MADE BY F&S
 

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L’intelligence artificielle s’immisce dans tous les domaines et la cuisine n’y échappe pas ! Autrefois royaume du geste et du savoir-faire humain, la gastronomie voit aujourd’hui émerger des outils capables de concevoir des plats, de structurer une carte et d’optimiser la gestion des restaurants.

Eneko Atxa, chef triplement étoilé et Eneko Axpe, physicien spécialisé en IA, ont abordé cette question lors de Madrid Fusion. Deux visions s’affrontent : l’IA comme levier d’innovation ou comme menace pour l’identité culinaire.

L’illusion du sur-mesure

Lors de leur intervention, les deux Eneko ont dévoilé une plateforme d’IA capable de générer menus, recettes et plannings. Une promesse alléchante : automatiser la complexité logistique pour libérer du temps à la création.

Mais ce gain d’efficacité cache une question essentielle : la cuisine peut-elle être réduite à un algorithme ? Si l’IA peut équilibrer une carte en tenant compte des saisons et du coût, peut-elle pour autant capturer l’âme d’un plat ? « Un menu ne se limite pas à sa cohérence, il doit porter l’empreinte du chef. » tranche Eneko Atxa.

Quand la machine pense la créativité

L’IA peut structurer, optimiser, organiser. Mais peut-elle créer ? Pour le vérifier, les deux Eneko ont soumis ChatGPT à l’exercice. Résultat : des intitulés séduisants mais sans profondeur et des associations trop attendues.

Pour Eneko Atxa, l’expérience est parlante : « La cuisine est une alchimie entre le produit, l’instinct et la cultureL’IA ne fait que de calculer des probabilités !»

L’IA, un commis sans génie ?

Le débat divise. Eneko Atxa reste sceptique : « Un restaurant gastronomique, c’est une vision. L’IA assiste, elle ne signe rien. »

À l’inverse, Eneko Axpe y voit un outil à fort potentiel : « Elle se trompe sans peur, ose ce que nous refuserions d’office. C’est là que réside sa force. »

En réalité, l’IA ne remplace pas le chef, elle lui soumet des hypothèses. Loin d’être un danger, elle peut devenir un levier d’exploration, une aide à la décision, un révélateur de combinaisons inédites. Mais son plus grand défi reste son incapacité à raconter une histoire.

Automatisation ou rébellion artisanale ?

Avec l’essor de l’IA en cuisine, deux tendances opposées émergent. D’un côté, des restaurants ultra-optimisés où chaque paramètre est maîtrisé par la technologie. De l’autre, une résistance artisanale affirmant la primauté du geste et de l’intuition.

« L’authenticité deviendra un luxe. » prédit Eneko Atxa. Face à une restauration standardisée, certains établissements revendiqueront une cuisine purement humaine, sans intervention algorithmique. « Tout optimisé, tout calibré, mais où est l’âme ? » s’interroge-t-il.

L’IA est un outil, pas un chef !

L’intelligence artificielle ne remplacera pas la main du cuisinier, mais elle l’accompagnera inévitablement. Elle sera un facilitateur, un amplificateur, mais jamais l’auteur.

Comme le rappelle Eneko Axpe : « Un bon couteau peut être une arme ou un instrument de précision. Tout dépend de la main qui le tient. »

L’avenir de la gastronomie ne repose donc pas sur l’opposition entre homme et machine, mais sur leur complémentarité. Si l’IA permet aux chefs de repousser leurs limites sans altérer l’émotion culinaire, elle aura trouvé sa place. Sinon, elle ne sera qu’un gadget de plus.

Guillaume Erblang

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