Chef Olivier Bellin – » Rester fermé, ça serait suicidaire «
Le chef breton Olivier Bellin insiste » Rester fermé, ça serait suicidaire « , le chef pense rouvrir son établissement le 17 juin prochain, il s’est exprimé auprès du quotidien letelegramme.fr
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Par K.Jégo
Chef deux étoiles à l’Auberge des Glazicks à Plomodiern (29), Olivier Bellin compte rouvrir son restaurant le 17 juin. Le confinement a intensifié son envie de revenir à l’essentiel.
Que pensez-vous de l’ouverture envisagée des restaurants le 2 juin en zone verte ?
Rester fermé, ça serait suicidaire. On attend d’en savoir plus le 25 mai. Mais on va tout faire pour ouvrir le restaurant le 17 juin. On attend toujours le protocole. On parle de 4 m2 par table. Si c’est à prendre au pied de la lettre, c’est une folie ! Les trois-quarts des restaurants resteraient fermés.
Avez-vous réfléchi à une organisation spécifique pour le restaurant ?
Les masques et les visières sont commandés. Le fléchage du restaurant et de l’hôtel est en cours. Il y a du gel hydroalcoolique partout. On sera sur une carte digitale pour les vins, voire pour les menus, nettoyée à chaque fois. Si le protocole est trop compliqué, l’expérience client va être complètement chamboulée. On va essayer quand même de rendre le tout agréable. On partira sûrement sur une carte simplifiée pour qu’il y ait un minimum de gestes. On rouvrira deux ou trois jours avant le 17 pour faire des essais. Si on met tout ça en place, on ne pourra pas faire une grande saison, mais on pourra limiter la casse.
Je me suis engagé auprès de mes gars : c’était hors de question qu’on mette des gens dehors
Justement, comment ça se passe financièrement pour l’auberge ?
J’avais des embauches prévues qui ne se sont pas faites. Mais je me suis engagé auprès de mes gars : c’était hors de question qu’on mette des gens dehors. Il va falloir gérer au maximum et être très pointu dans les achats. Tout ce protocole sanitaire va avoir un coût très lourd. Mais il n’y aura pas de répercussion sur les tarifs.
Avec le collectif « Resto ensemble », on est en train de demander au gouvernement qu’il fasse pression sur les assurances pour qu’elles remboursent mieux. Mais il va y avoir beaucoup de casse dans la profession… Demain, aller au restaurant deviendra un acte civique !
Cette période de confinement vous a-t-elle inspirée en cuisine ?
Pas forcément de nouvelles recettes mais plutôt une manière différente de réfléchir à : comment va être le futur ? Pendant le confinement, on a pu observer, être plus proche de la nature, revenir à l’essentiel et au bon sens. On peut travailler en réseau encore plus serré avec les producteurs, arrêter de faire traverser la planète à un turbot en avion. Il y a beaucoup de choses dont il faut prendre conscience. Souvent, dans les restaurants gastronomiques, on a tendance à trop travailler le produit. Là, on le laissera dans sa plus simple expression. On va aussi proposer une traçabilité un peu plus marquée sur les produits. On va développer notre carré d’herbes, lancer un petit potager cet été pour compléter l’offre et faire du compost.
Et pour l’hôtel, vous pensez rouvrir aussi ?
On attend de voir car il y a un protocole sanitaire à venir qui semble extrêmement compliqué. Les chambres qui vont être louées devront rester ensuite 24 heures à désinfecter. Si c’est pour tourner à deux, trois chambres, ça ne vaut pas le coup ! Comme les gens ne peuvent pas circuler à plus de 100 km à l’heure actuelle, pour les établissements comme le mien, où la clientèle vient de loin, ça reste problématique. Les Bretons viennent juste pour manger et ne dorment pas. Donc, on est en réflexion car les contraintes sont énormes. On doit enlever les coussins, les journaux, les machines à café et thé… Le spa, qui faisait notre petit plus l’année dernière, on ne pourra pas l’ouvrir. Ça devient ridicule. Ici, c’est un Relais & Châteaux, est-ce que les gens viendront dépenser une certaine somme pour vivre une expérience qui n’a plus rien à voir ? Il faudra sûrement faire des propositions avec une politique attractive, peut-être sur les tarifs.
Avez-vous des alternatives si les clients ne sont pas au rendez-vous ?
Au bout d’un mois, on fera le point et il faudra être réactif. On pourrait, par exemple, proposer des plats à emporter. Si dans le futur, ce genre de crises revient régulièrement, j’envisagerai à Plomodiern une offre différente du gastronomique. D’abord, il faut que je trouve le lieu. Un endroit où on peut manger quelque chose de plus simple. Adapté au moment comme je l’ai fait à Paris avec les établissements Mersea, la chaîne de street-food qu’on a montée avec des copains. Après, il faut rester positif. Là, on arrive sur la belle saison. Je pense que les gens vont avoir envie de manger à de belles tables et dormir dans de beaux hôtels.