La chef Monica Galetti se raconte pour F&S – son admiration pour Anne-Sophie Pic, son rôle de jury pour MasterChef UK, son nouveau restaurant

09 juin 2019  1  Chefs & Actualités F&S LIVE
 

signature-food-and-sens La chef Monica Galetti, protégée de Michel Roux Jr, se raconte pour F&S – son admiration pour Anne-Sophie Pic, son rôle de jury pour MasterChef Royaume-Uni, son nouveau restaurant, la création de son champagne…

Il y a vingt ans, la chef néo-zélandaise Monica Galetti posait ses valises à Londres, la tête pleine de rêves, et une volonté farouche chevillée au corps. Depuis, elle a mené dans la capitale anglaise un parcours professionnel exemplaire, devenant la première femme sous-chef du Gavroche (le restaurant français iconique des Roux), puis un visage télévisuel bien connu des Britanniques. À la fois jury de l’émission MasterChef UK: The professionals depuis onze ans, et co-présentatrice de l’émission de la BBC Amazing Hotels of the world: Life beyond the lobby, la chef Monica Galetti a ouvert son propre restaurant, Mere, dans le quartier de Fitzrovia. C’est là que Food&Sens l’a interviewée, pour échanger sur son parcours, sa vie de chef et de mère, ses émissions de télévision, et son restaurant ouvert avec son mari sommelier (le Français David Galetti). À découvrir ci-dessous.  

Monica Galetti

F&S : Bonjour Monica. Avant de voler de vos propres ailes, vous avez travaillé 12 ans au Gavroche, fameux restaurant français de Londres (qui fut le premier d’Angleterre à décrocher trois étoiles Michelin). Parlez-nous de votre collaboration avec le chef patron du Gavroche, Michel Roux Junior ? 

M.G. : Michel, c’est un tel mentor ! C’est lui qui m’a appris la cuisine française. Il m’a appris également le respect du produit, et le respect de l’équipe avec qui on travaille. De fait, ce que je suis en tant que chef, je le dois en partie à ce que Michel m’a appris. Être capable de diriger une cuisine, avoir l’œil à tout partout et tout le temps, j’ai appris ça de lui. Il voit tout, et drive son équipe à tout instant. En tant que jeune chef, travailler auprès de lui était le meilleur des trainings. Et puis, bien qu’il soit un chef qui fasse une cuisine très classique, il m’envoyait volontiers essayer des restaurants de cuisine moderne, afin que je puisse voir de tout.

F&S : Vous avez désormais votre propre restaurant londonien, Mere, depuis 2017. Est-ce qu’ouvrir une table a toujours été votre rêve ?

M.G. : Absolument. Et le fait que ça ait pu se faire, c’est une grande fierté. On a énormément travaillé pour y arriver mon mari et moi, notamment concernant la partie training des équipes ; mais on l’a fait. Bien sûr, c’est encore plus de travail, maintenant qu’on doit gérer tous les aspects du restaurant (le staffing, les équipements, les coûts, etc). C’est là qu’on voit vraiment qu’un restaurant, c’est aussi un business ; ce n’est pas qu’une question de cuisine.

 

F&S : Cette année, vous êtes jury pour la 11fois de l’émission MasterChef Uk: The Professionals (l’équivalent britannique de Top Chef France). Quelle évolution avez-vous noté au fil des ans concernant les candidats, leur façon d’appréhender le métier de chef, les tendances culinaires qu’ils affectionnent, les projets pro qu’ils mettent en place ?

Monica Galetti  : En tant que jury, on voit les tendances culinaires évoluer d’une année sur l’autre ; l’année dernière, les candidats étaient très désireux de faire des plats à base de différentes sortes de chou-fleur, ou à base de kimchi ; une autre année, ils voulaient faire des plats autour de fleurs comestibles ; et ainsi de suite. Chaque année a sa tendance. Pour ma part, je leur rappelle que l’important est de réaliser une cuisine personnelle, et de savoir gérer la pression. Ce qui compte aussi, c’est d’être organisé, hygiénique, et d’avoir l’œil à tout (aussi bien en salle qu’en cuisine). Ce sont des valeurs essentielles à ce métier, et je les enseigne à mon équipe. Le fait d’avoir l’œil aux détails, c’est fondamental.

F&S : Votre participation à l’émission de la BBC Amazing hotels of the world: Life beyond the lobby vous fait vous immerger dans les coulisses d’hôtels incroyables, comme le Royal Mansour à Marrakech, ou The Silo en Afrique du Sud. Qu’est-ce que vous retenez des professionnels de l’hôtellerie que vous rencontrez ?

M.G. : Cette émission a renforcé mon attention au détail, concernant notamment la partie salle du restaurant. Ceci dit, mon mari et moi avons tous deux un background dans des restaurants Michelin, où l’attention au détail est fondamentale. Donc de toute façon, nous sommes entraînés à tout voir.

F&S : Cette année, la cérémonie annuelle du World’s 50 Best Restaurants aura lieu à Singapour, au Marina Bay ; justement, l’émission Amazing hotels of the world a consacré un épisode à cet hôtel. Pouvez-vous nous décrire les lieux ?   

M.G. : Le Marina Bay est immense. Lorsqu’on y est, ça fait le même effet que si on dormait à l’aéroport d’Heathrow ! (Rires). J’ai beaucoup de respect pour les gens qui y travaillent, et qui gèrent au quotidien un tel volume de clients. En terme d’échelle, je n’ai jamais vu un tel endroit. C’est impressionnant.

 

F&S : Vous qui avez été la première femme sous-chef du Gavroche, parlez-nous de la place des femmes dans la gastronomie ?

M.G. : Il y a toujours eu plus d’hommes que de femmes dans l’industrie culinaire, et ce partout dans le monde. Pourquoi y a-t-il moins de femmes ? Je ne peux pas parler pour elles, mais sans doute que les sacrifices à faire en terme de vie de famille y sont pour quelque chose. Ceci dit, la question des femmes qui travaillent et qui sont aussi mères de famille concerne tous les secteurs d’activité ; mais il est vrai qu’en cuisine, le système s’adapte moins, tandis que les autres secteurs d’activité évoluent et prennent mieux en compte cet état de fait. Autre raison expliquant peut-être qu’il y ait moins de femmes que d’hommes dans la restauration, c’est parce qu’il faut être résistante physiquement, pour pouvoir tenir les longues journées de travail. Ceci dit, les femmes travaillant dans l’industrie doivent comprendre que ce n’est pas gênant ou rabaissant de demander de l’aide à leurs collègues masculins, lorsqu’il s’agit par exemple de porter une poêle très lourde, ou pour soulever les gros plateaux de service. Être forte, oui, mais c’est à comprendre dans le sens d’être une force au sein de l’équipe. En tout cas, c’est important qu’il y ait des femmes qui réussissent en cuisine. Cela inspire les autres. Ici au Mere, 7 employés sur 11 sont des femmes. Ceci dit, je ne cherche pas spécialement à employer des femmes ; ce sont elles qui postulent chez moi. 

F&S : Vous êtes une chef-patron, une personnalité télévisuelle, et la mère d’une petite fille ; comment gérez-vous toutes ces casquettes en même temps ?

M.G. : En ce qui me concerne, je voulais être la meilleure possible dans la cuisine. C’est difficile d’y parvenir avec un enfant, parce qu’on veut passer du temps avec, d’autant que la période pendant laquelle il reste avec nous est limité, avant qu’il ne devienne grand et parte voler de ses propres ailes. En parallèle, faire de la cuisine haut de gamme requiert un travail énorme, et des horaires sans fin. Donc c’est un juste équilibre à trouver, entre le restaurant, la télévision, ma vie de famille et le bien-être de mon enfant. Surtout que nos familles ne sont pas sur place pour nous épauler (la famille de mon mari est en France, et la mienne est en Nouvelle-Zélande). Quand je ne filme pas, c’est plus simple. Mais filmer aide beaucoup les affaires ; l’émission MasterChef UK a une telle audience que quand elle passe, le restaurant est plein. On a beaucoup de clients venus d’un peu partout qui viennent chez nous grâce à ça…  Par ailleurs, je ne me serais pas sentie complète (ou réalisée, NDLR) en tant qu’individu si je n’étais pas allée aussi loin que je le voulais dans la cuisine.

F&S : À Mere, le sommelier est votre mari, David Galetti (vous vous êtes d’ailleurs rencontrés au Gavroche, où il était le sommelier). Travailler en couple, c’est pratique ?

M.G. : Oui, c’est super de travailler avec son mari. Quand je suis en tournage, je dois tout rattraper le soir quand je rentre au restaurant, pour m’assurer que tout fonctionne. Heureusement que mon mari est là ; David a les yeux à tout, c’est un grand soulagement. Ce restaurant, c’est vraiment quelque chose qu’on a fait ensemble. Et puis, l’équipe est super, elle sait gérer en mon absence. De mon côté, je fais de mon mieux pour bien traiter mes employés ; j’aime avoir une équipe heureuse.

Monica Galetti et son mari David

F&S : Vous avez créé votre propre champagne, en collaboration avec la maison Duval-Leroy. Cela ajoute-t-il un cachet supplémentaire à votre restaurant ?

M.G. : Totalement. Avoir son propre champagne, c’est un vrai plus, qui apporte une touche unique au restaurant. Et puis, ça a été une très belle expérience de travailler avec la maison Duval-Leroy. Je voulais absolument travailler avec Carol, PDG de la maison, car cette femme a trois garçons, qu’elle a élevés en parallèle d’un très beau business. Du coup, cette collaboration avait du sens ; j’ai senti une vraie connexion avec ce projet. 

Le gin et le champagne spécialement créés pour Monica Galetti

F&S : Vous connaissez bien la France, où vous vous rendez souvent. Quels sont les chefs français qui vous inspirent ?

M.G. : Anne-Sophie Pic. C’est une femme incroyable, très humble, drôle et posée. Elle a un très bon sens de l’humour, elle travaille très dur, elle a fait beaucoup de sacrifices. La façon dont elle voit la cuisine est très intéressante aussi. C’est mon héroïne. Cette femme, je l’adore.

F&S : Parlez-nous de vos projets ?

M.G. : Je travaille actuellement à la sortie d’un troisième livre de cuisine ; il sera dévolu à la cuisine familiale. On y trouvera les recettes que j’aime cuisiner chez moi. Du simple, de la ‘confort food’. En septembre, je repartirai tourner un épisode de la série Amazing Hotels of the World avec Giles Coren. Et en novembre, nous allons lancer notre propre huile d’olive, élaborée avec Picualia en Espagne. Bien sûr, et comme pour mon champagne, je suis allée sur place pour tout mettre au point. J’ai aussi lancé mon propre Gin, en partenariat avec Salcombe ; il fonctionne très bien. Enfin, j’ai mon restaurant à faire tourner et à développer ; il n’a que deux ans, on ne peut pas se reposer sur nos lauriers. Même si Mere est bien installé pour l’instant, on doit rester pertinent, faire en sorte que les clients reviennent, que l’on décroche des récompenses, qu’on ait la reconnaissance du métier. Quant à MasterChef UK, pour l’instant je continue. Un jour je ralentirai la cadence, pour passer plus de temps avec ma famille, et créer des souvenirs heureux avec elle. D’ailleurs, on va en Nouvelle-Zélande tous les ans. Mes racines sont là-bas, même si mon chez-moi est à Londres.

Propos recueillis par Anastasia Chelini

 

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