À Londres, la nouvelle table Legado de la chef étoilée Nieves Barragán fait salle pleine – nous sommes allés voir

D’ores et déjà à la tête de Sabor, une table étoilée près de Piccadilly, la chef espagnole Nieves Barragán Mohacho vient d’ouvrir une seconde table à Londres, le Legado. Situé cette fois en plein cœur de Shoreditch, le quartier branché et jeune de la capitale anglaise, ce nouveau restaurant espagnol signe une carte dynamique, pointue, qui fait presque toujours mouche. On conseille sans modération. D’autant que la chef, bourrée de talent et d’idées, fait beaucoup parler d’elle outre-Manche. Nous sommes allés voir.

Dix-neuf heures tapantes, un mardi soir à Shoreditch ; le Legado se dessine sous une nuit déjà tombée, au-dessous d’un vaste pont en béton, entre deux des avenues principales de ce quartier du East London. Si de l’extérieur, l’adresse semble un peu perdue au milieu de cette zone intermédiaire (en réalité animée en journée, car se situant au pied d’un nouveau complexe de bureaux), le doute se dissipe à peine entrés. La joie semble en effet planer sur ce restaurant animé, aux tons contemporains, aux proportions longues, dont la forme rectangulaire abrite environ 70 couverts. Du comptoir longitudinal à droite, colonne vertébrale du lieu, émane une énergie fraîche, concentrée, incarnée notamment par la chef Nieves Barragán Mohacho, qui s’active de poste en poste. En salle, l’ambiance est bonne ; et les tables, pleines. En à peine un mois d’ouverture, le Legado semble avoir déjà trouvé son public.

Du côté de la carte, le choix se fait conséquent ; les options se multiplient, virevoltent, s’organisent par sections, donnent à méditer. Que choisir ? La multiplicité des options impressionne – et leur exécution, plutôt rapide, aussi. Heureusement, la serveuse conseille habilement, guidant les clients dans cette forêt de possibles. Tradition espagnole oblige, on commencera par le commencement : ce sera le gazpacho – à la fraîcheur onctueuse, nappée d’huile d’olive, qui fait suite à un pétoncle joliment servi, où pointe une note de vinaigre.

Les riz suivent, qui donnent à voir des plats de régions plus rurales ; puis la poitrine de porc, généreuse, entêtante, retient la fourchette et la fait revenir. Au tour des côtelettes d’agneau, servies façon milanaise ; elles sont d’une grande justesse, nappées de câpres et d’olives – et d’originalité. C’est pourtant le légume qu’on retiendra le plus : un artichaut grillé et sa sauce amande, dont la perfection sensible s’inscrit durablement dans notre mémoire gourmande.

Passons l’empanadilla, sans grand événement ; notons l’étonnant Legado Sandwich, constitué notamment de blette et de cecina. Enfin, un leche frita, ici infusé de camomille, conclut ce dîner où des saveurs hétéroclites ont entraîné le client d’un bout à l’autre de l’Espagne, hors des sentiers battus. Tandis qu’autour de nous, le bruit des conversations monte, frisant le bruyant – mais la joie de vivre, toujours, passe de table en table. On pense, déjà, à revenir. Ne serait-ce que pour essayer les 4/5e restants de la carte.

Londres, octobre 2025
Par Anastasia Chelini


















