Crus bourgeois Exceptionnels, ces vins qui font aimer Bordeaux.

22 octobre 2025  0  MADE BY F&S
 
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Accueilli de façon mitigé par la critique au moment des primeurs de Bordeaux, le 2023 est un millésime de savoir-faire avec lequel les talents se révèlent et les valeurs sures se confirment. Pour le démontrer les 14 crus bourgeois exceptionnels, réunis au Bistrot du sommelier de Philippe Faure Brac, boulevard Haussmann, ont dévoilé leurs cuvées tout juste mises en bouteille. 

Comment définir les Crus Bourgeois ? Exclusivement médocains, ces 170 châteaux souvent familiaux (à de rares exceptions près) pèsent 22% de la production du Médoc, 21% du vignoble et comptent quelques 15 millions de bouteilles annuelles toutes appellations confondues (du sud au nord en remontant l’estuaire de la Gironde vers l’océan : Moulis-en-Médoc, Margaux, Listrac-Médoc, Saint-Julien, Haut-Médoc, Pauillac, Saint-Estèphe et Médoc). Plusieurs appellations cela veut donc dire des personnalités différentes mais surtout ces propriétés, voisines des grands Crus Classés devenus inabordables, offrent un rapport qualité prix à tomber et ont accompli leur révolution stylistique en élaborant leurs vins pour un public contemporain qui a soif de cuvées accessibles offrant une buvabilité dès leur jeunesse. On est bien loin des vins demandant à être attendus quinze ans ! 

La grande famille des Crus Bourgeois s’astreint tous les cinq ans à un classement interne, la version 2025 détermine 36 crus bourgeois supérieurs et 14 exceptionnels : ce sont ces derniers que j’ai pu déguster le 13 octobre 2025. A noter que tous les crus bourgeois exceptionnels sont engagés dans une démanche environnementale (HVE, AB, Bordeaux Cultivons demain…) et que le prix public ne dépasse pas 25 euros.

Chaque année, une caisse bois panachée permettant de découvrir l’ensemble des crus bourgeois exceptionnels est proposée à la vente sur les sites spécialisés.

Château d’Arsac, Margaux

credit photo M.Boudot

Acheté en 86 par Philippe Raoux, le vignoble (5 hectares) en désuétude a peu à peu été replanté jusqu’à ses 90 hectares actuels. Fait rarissime, 54 hectares ont été classés en Margaux entre 1995 et 2008. Une somptueuse collection d’œuvres d’art contemporain a été constituée selon la méthode « chaque cep donne un franc pour l’achat d’art » (et il y en a 60 000). Le 2023 (80% cabernet sauvignon, 20% merlot) avec sa robe brillante, son équilibre, sa fluidité, sa palette fruitée et terrienne, sa bouteille sérigraphiée hommage à l’initiateur de sa renaissance décédé en 2022, tire correctement son épingle de ce millésime compliqué. On y associe un coquelet rôti ou des aubergines en caponata.

Château Castéra, Médoc

Des fondations médiévales, une large ouverture oenotouristique couronnée de deux Best of Wine d’or catégorie Art et Culture, 83 hectares sur 200 sont dévolus à la vigne. Merlot, cabernet sauvignon, cabernet franc et petit verdot composent un 2023 sapide, souple et soyeux aux tanins bien intégrés. Rien n’accroche dans cet ensemble dynamique qu’on imagine avec des lasagnes parfumées.

Château la Cardonne, Médoc

On grimpe tout au nord du Médoc, au-dessus de Saint-Estèphe au point le plus haut du plateau médocain. Ici on se distingue par la politique de garde : plus de deux millions de bouteilles réparties sur au moins dix millésimes sont détournées de la vente et stockées jalousement 14 mètres sous terre. Le 2023 offre un jus plein et gouteux aux saveurs d’humus et de cuir, il a sa place aux côtés d’aiguillettes de canard au poivre Sichuan. 

Château le Crock, Saint-Estèphe

On est toujours bien inspiré de s’intéresser à ce vignoble conduit par la même équipe que le grand cru classé Léoville-Poyferré. Propriété historique de la famille Cuvelier, bichonné depuis 1903, Le Crock offre un millésime 2023 droit, juteux et sapide, l’accord sera parfait avec une entrecôte de bœuf de Bazas. 

Château Laffitte Carcasset, Saint-Estèphe

Nez sur la cerise noire, la myrtille, sanguin et sapide au palais, le 2023 de Pierre Rousseau crève l’écran : des cabernets-sauvignon à point, du merlot tout en rondeur, un brin de cabernet franc composent ce vin profond. Sauté de champignons et lard de Colonnata.

Château Laujac, Médoc

500 hectares dont une centaine dédiée à la vigne en plein parc Natura 2000, une propriété classée monument historique, un troupeau de 400 vaches limousines : il y a beaucoup à dire sur Laujac. Son 2023 est texturé, savoureux, on y goûte les fruits rouges sur mûris et les épices douces (très peu distribué en France, c’est une opportunité pour une carte des vins voulant se distinguer). Canard aux cerises, poêlée de lactaires.

Château Malescasse, Haut-Médoc

Vignoble de 40 hectares d’un seul tenant entre Margaux et Saint-Julien, dans le giron des vignobles Austruy. Le 2023 se distingue par son élégance florale, puis une texture soyeuse et légèrement réglissée. Coquelet aux herbes et légumes racines.

Château de Malleret, Haut-Médoc

Cedric Vlemmings Photographie © Cedric Vlemmings

Une des plus vastes propriétés médocaines soit 350 hectares abritant un haras, une oliveraie donnant un nectar d’Aglandau et 60 hectares de vignoble. Paul Bordes réalise un 2023 au profil très fin, au toucher de bouche soyeux déroulant les épices douces. A savourer avec un perdreau en cocotte.

Château Mongravey, Margaux

Le plus jeune et le plus petits des crus bourgeois exceptionnels utilisant entre 10 et 15% d’amphores pour ses élevages. Avec ses 73% de cabernet sauvignon dans son 2023, ce jus effilé, précis, offre des tanins soyeux et un ensemble gourmand. On le réchauffe avec une gardianne de bœuf.

Château Paloumey, Haut Médoc

Pierre Cazeneuve a opté pour l’agriculture bio (certifié depuis 2019), l’agroforesterie ; s’est engagé avec Bordeaux Cultivons demain et comme membre des Vignerons du Vivant. 2023 en profite avec sa robe profonde, son nez embaumant la confiture de cerise noire, sa texture onctueuse aux tanins très fondus. De tout petit rendements sur ce millésime, à bon entendeur…

Château Paveil de Luze, Margaux

32 hectares est d’un seul tenant et pourtant ce Margaux bénéficie d’une vinification parcellaire. Tout en fruits noirs, fluide, sapide, il revendique une facture classique et y réussi puisque distingué cru bourgeois exceptionnel depuis 2018. Lamproie à la bordelaise pour rester dans la tradition ! 

Château Reysson, Haut Médoc

Conduit par le négoce Dourthe depuis 2001 et définitivement acquis en 2014 ce nouveau venu dans le classement s’épanouit sur un terroir riche en calcaire. Atypique avec ses 80% de merlot, il délivre la cerise noire, une saveur minérale et un éclat de poivre. Avec un risotto au chorizo. 

Château Reverdi, Listrac-Médoc

Fait en famille dans la joie et la bonne humeur par Audrey et Mathieu Thomas, 3iéme génération au domaine. Plus de 30% de petit verdot donne un vin au caractère corsé, aux tanins enrobés, goûteux, dans un style gentleman farmer. Avec un grenier médocain ou une purée de cèleri rave.

Château du Taillan, Haut Médoc

Armelle Cruse gère ce château dont elle partage la propriété avec ses quatre sœurs, elle préside également à l’association des Crus Bourgeois Exceptionnels. Vinification douce et élevage pour un tiers en barrique neuve, son 2023 est concentré, profond , juteux et particulièrement long en bouche. Un vrai régal made in Médoc.

Par Sylvie Tonnaire, journaliste.

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