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La Ligue du LOL – parmi eux, un journaliste culinaire

15 février 2019  1  Chefs & Actualités F&S LIVE
 

signature-food-and-sens La Ligue du Lol : quand un groupe de journalistes hommes harcèle des journalistes femmes – parmi eux, un journaliste culinaire, désormais mis à pied

Coup de tonnerre sur la planète presse : vendredi dernier (8 février), un premier article publié par Libération mettait en lumière les agissements navrants d’un groupe de journalistes hommes, baptisé « Ligue du LOL ». Pour ceux qui n’auraient pas suivi l’affaire, certains membres de ce groupe de journalistes s’adonnaient sur Twitter à du harcèlement en meute, prenant pour cibles régulières de jeunes consœurs alors en début de carrière, pour la plupart ouvertement féministes ; ainsi que des journalistes homosexuels, et quelques journalistes hommes. Insultes sexistes, grossophobes, homophobes, antisémites et/ou racistes, montages dégradants à caractère pornographique, canulars téléphoniques simulant des entretiens d’embauche, etc… Les témoignages des victimes sont poignants, et la virulence des tweets les visant, ahurissante. Parmi cette triste Ligue du LOL, au nom on ne peut plus mal choisi, figurait le journaliste culinaire Guilhem Malissem, podcasteur pour le studio de podcast Nouvelles Écoutes. Suite à l’éclatement de l’affaire, le studio a mis fin « avec effet immédiat » à sa collaboration avec Malissem.

Couverture du quotidien Libération

Évidemment, les conséquences des méfaits de la Ligue du LOL (dont les actions se situent essentiellement entre 2009 et 2013) sont multiples, et durables dans le temps. Les victimes ont fait état d’une confiance en soi largement dégradée (forcément) ; certaines ont pensé au suicide. D’autres ont vu leur carrière ralentie, au vu de l’érosion systémique à laquelle leur crédibilité professionnelle était soumise, via des campagnes de cyber-dénigrement. Plusieurs d’entre elles ont carrément changé de profession, pour échapper au harcèlement. À l’inverse, les membres de la Ligue du LOL bénéficiaient quant à eux de postes importants au sein de grandes rédactions (Libération, Vice, Huffington Post, Slate, etc).  

Cette affaire, hélas, pourrait révéler l’arbre cachant la forêt ; il semblerait que la presse soit en effet gangrénée par un sexisme rampant, aux effets délétères. De fait, outre la Ligue du LOL, d’autres groupes (privés, cette fois) de journalistes hommes ont été dévoilés, sur lesquels ces derniers insultaient à l’envi les collègues femmes de leur rédaction. Au Huffington Post, la direction a ainsi licencié fin 2018 trois de ses journalistes hommes, pour insultes répétées envers leurs collègues femmes. En juillet 2017, c’était la direction de Vice qui licenciait deux journalistes hommes, pour « graves dérives sexistes ». Là encore, les contenus révélés font froid dans le dos… 

Du coup, dans le sillage de l’affaire, les grands médias s’interrogent ; au-delà de la presse, d’autres pans de la société seraient-ils eux aussi empêtrés (plus ou moins consciemment, et à échelle plus ou moins grande selon les secteurs d’activité) dans un système de boys’ club (club réservé aux hommes, avec cooptation des hommes entre eux) à grande échelle ? Autre interrogation remise sur le devant de la scène suite à l’affaire : l’humour sexiste serait-il un moyen dévié pour les hommes de s’assurer le pouvoir ? En politique par exemple, où la misogynie est un mal répandu (revoyez la séquence où Cécile Dufflot se fait siffler parce qu’elle porte une robe à l’Assemblée Nationale), le fait de se moquer d’une femme en la réduisant à son corps ou à son apparence est un moyen comme un autre de la discréditer, et donc de l’exclure du débat. Bérangère Kolly, maître de conférence à l’Université Paris Est-Créteil, abonde dans ce sens dans un article de Slate : « La Ligue du LOL ressemble beaucoup au fonctionnement en fraternité. On y retrouve l’enjeu du pouvoir (entraide, connivence masculine), et le fait d’empêcher des femmes rivales (des consoeurs), d’y accéder. C’est donc aussi clairement une question politique, une domination ‘fratricarcale’ ». C’est à Simone de Beauvoir, femme de lettres et philosophe, que nous donnerons ici le mot de la fin : « personne n’est plus arrogant envers les femmes, plus agressif ou méprisant, qu’un homme inquiet pour sa virilité. » 

Anastasia Chelini
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