Angelo Musa – le chef pâtissier vient d’ouvrir son premier salon de thé à Londres, à Harrods. Nous sommes allés voir.

14 août 2022  0  Chefs & Actualités
 

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Interview et texte par Anastasia Chelini

C’est à Harrods, le grand magasin iconique de Londres, que le chef-pâtissier français Angelo Musa vient d’ouvrir son premier salon de thé – baptisé de son nom. En exercice depuis quelques semaines, les lieux connaissent déjà un succès mérité, tandis que s’y pressent touristes et locaux. Se déclinant dans des tons crème/vanille, l’adresse sert les pâtisseries les plus connues du chef exécutif du Plaza Athénée, par ailleurs Meilleur Ouvrier de France et vainqueur de la coupe du monde de pâtisserie 2003.

Une fois sur place, la difficulté est unique, mais immense : choisir entre tous ces desserts. Qui, du mille-feuille pamplemousse-vanille, de la tartelette aux fraises, du Papilio (gâteau au chocolat) ou du Paris-Brest, l’emportera ? Quant à ceux qui souhaiteraient débuter par un plat, la carte a tout prévu. On conseillera sans retenue l’excellent croque-madame, une merveille de générosité au gruyère et champignons, le tout saupoudré de truffe.

Notre bilan des lieux ? L’adresse vaut le détour ; l’offre est travaillée, cohérente. Les assiettes, peintes à la main par Marie Daâge, se déclinent en cinq tonalités différentes, pensées pour s’accorder aux couleurs des desserts. Mention spéciale au chariot à pâtisseries réfrigéré, qui fonctionne comme une vitrine à desserts, tout en les maintenant dans une fraîcheur optimale. On aime aussi le bar-comptoir, duquel on peut observer le chef pâtissier assemblé les pâtisseries sous nos yeux. Quant au service, il est professionnel et diligent. Seul bémol, s’il fallait en trouver un : la climatisation, excessive.

Dans le sillage de cette ouverture, nous avons pu interviewer le chef par téléphone, pour faire le point avec lui sur cette nouvelle adresse. Un échange à retrouver ci-dessous.

Interview et texte par Anastasia Chelini

Angelo Musa, Harrods Food

F&S : Bonjour Angelo, racontez-nous comment cette ouverture à Harrods a été orchestrée ? Comment les choses fonctionnent-elles ?

Angelo Musa : Je connais Harrods depuis trois-quatre ans ; j’avais commencé à collaborer avec Markus Bohr, le chef pâtissier exécutif de Harrods, sur un projet qui finalement n’avait pas abouti. Nous sommes tout de même restés en contact. Il y a six mois, il m’a recontacté en me proposant d’ouvrir ma propre pâtisserie au sein de Harrods. Cette offre était tellement magnifique que j’ai eu du mal à y croire ! Pour lancer les choses, je me suis rendu sur place voir les lieux ; Céline Manoukian (auteure de la biographie d’Angelo Musa et responsable de sa communication, NDLR) et moi avons fait du brainstorming. Harrods nous a donné carte blanche, que ce soit sur la pâtisserie, la vaisselle, le décor, etc. Ils m’ont fait confiance, et réciproquement. Les choses se sont faites naturellement. Quant au choix des pâtisseries, j’ai choisi ceux qui ont le plus marché, et que j’aime faire. Ce sont des gâteaux relativement simples, sans trop de mélanges.

F&S : Les pâtisseries sont présentées sur un chariot réfrigéré de belle allure. Pouvez-vous nous en dire plus ?

A.M. : Ce chariot est fait par une société française, Safron. C’est le premier de ce genre ; il a nécessité beaucoup d’innovation technologies. Je suis fier du résultat.

F&S : Quel bilan tirez-vous de ces premières semaines d’exploitation ? 

A.M. : Pour l’instant, je n’ai reçu que des commentaires positifs, voire très positifs. Sur Instagram, je reçois beaucoup de tags de clients qui sont venus et ont aimé. Par ailleurs, je suis content de l’équipe en place, qui fournit un travail régulier, et qui arrive à bien maintenir la qualité. Je suis en lien avec eux de façon permanente. Tout a matché jusqu’à présent ; c’est une rencontre des bonnes personnes au bon moment. 

F&S : Parlez nous de votre vision de la pâtisserie ?

A.M. : Depuis plusieurs années, la pâtisserie déclenche un véritable engouement, qui ne cesse de grandir. Les gens ont une vraie envie vis-à-vis de la pâtisserie. C’est encore plus le cas à Londres. Pour moi, le goût est très important, et il passe à travers les textures. On peut utiliser les meilleures matières premières au monde, mais si la texture n’est pas comme elle doit être, ça ne sera pas bon. De plus, si le visuel est important, le goût l’est davantage. Je préfère un visuel plus modeste, mais d’un goût supérieur. De fait, il m’arrive de faire des choses moins belles, car le focus est mis sur le goût. Et puis, ce que j’aime aussi en pâtisserie, c’est son côté ludique. La partie créative nécessite de jouer avec ses connaissances pour pouvoir créer de nouvelles choses. D’ailleurs, avec la création il n’y a pas de règle ; parfois c’est facile, immédiat ; d’autres fois, c’est long et plus difficile.

F&S : Il s’agit là de votre première ouverture à l’étranger ; est-ce que c’était un projet que vous aviez en tête depuis longtemps ? 

A.M. : Dans tout ce que j’ai fait, je n’ai jamais prémédité quoi que ce soit, mis à part lorsque j’ai préparé le concours du MOF et la coupe du monde de pâtisserie. Les choses de la vie se présentent parfois d’elles-mêmes. Le challenge, c’est plutôt de réussir à caser un projet de plus au milieu de tout ce qu’on fait déjà par ailleurs. Mais c’est très motivant et enrichissant, bien sûr. 

F&S :  Où sourcez-vous vos produits pour votre salon de thé à Harrods ? 

A.M. : Que ce soit pour la chocolaterie ou la crème, je travaille avec les mêmes fournisseurs depuis vingt ans ; je suis très fidèle sur ce genre de choses. De plus, le côté humain est important pour moi ; en plus de la qualité. Quand ces deux critères sont réunis, je reste avec les mêmes personnes. 

F&S : À Londres, Harrods se trouve à quelques pas de l’hôtel de luxe The Berkeley, où Cédric Grolet a récemment ouvert son propre salon de thé. Tout aussi proche de là, se trouve le nouvel Afternoon Tea signé Jessica Préalpato, au Carlton Tower Jumeirah. Il se murmure par ailleurs que Yann Couvreur va ouvrir prochainement à Londres, où se trouvent déjà Philippe Conticini, Pierre Hermé, Cyril Lignac. Un commentaire ?

A.M. : C’est bien pour les Londoniens, et pour le rayonnement de la pâtisserie française, qui reste une référence dans le monde. Moi je trouve que Londres est une ville incroyable ; on s’y sent en sécurité. Il y a beaucoup de monde, beaucoup de choses à voir. Je trouve toutefois que certains Afternoon Teas locaux privilégient le visuel au goût. 

F&S : Un mot de conclusion ?

A.M. : Je suis très content de cette magnifique aventure, qui j’espère va durer. Je remercie vraiment Harrods pour cette opportunité ainsi que Markus Bohr et le directeur du F&B Ashley Saxton, et toute la belle énergie qu’ils ont mis à la bonne réalisation du projet. j’ai été très ému de voir les lieux une fois prêts ; très touché. Merci à la maison Harrods. Et vive la pâtisserie, et la pâtisserie française ! 

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