« Cuisine Holistique » à Top Chef – Quésaco ?
Cuisine holistique – la candidate de Top Chef Albane Auvray l’a pratique, elle a tenté de l’expliquer lors de sa première participation au concours de M6, le quotidien Le Parisien est allé demander à une expert, une explication sur les fondamentaux de cette cuisine qui fait du bien au corps et à l’esprit.
Par L. Fourneau
Nouvelles formes de cuisine, ingrédients improbables et autres trompe-l’œil censés défendre une cause… Chaque saison de « Top Chef » réserve son lot de surprises. Le cru 2023 n’a pas échappé à la règle. Dès le premier épisode diffusé le 1er mars, c’est sûrement Albane qui nous aura le plus marqués.
Outre sa voix déjà cassée sur la ligne de départ (courage Albane, ça nous arrive souvent aussi ici), la candidate a expliqué aux chefs qu’elle faisait une « cuisine holistique ». Paul Pairet a tenté de comprendre ce qu’elle racontait au sujet des bienfaits de la pomme pour les poumons. Mais elle n’a visiblement pas convaincu ses interlocuteurs.
Les mêmes réactions dubitatives ont été observées sur les réseaux sociaux. « C’est quoi la cuisine holistique ? Ça fait très secte ? », se demandait un internaute. « La cuisine holistique… une #fakemed [faux médicament] de plus ? […] La pomme qui règle les infections pulmonaires, ça marche comment ? », s’agaçait un autre. Nous nous sommes donc penché sur le sujet et avons interrogé une spécialiste en cuisine holistique et un professeur en nutrition.
« Nourrir le corps, l’âme et l’esprit »
Depuis une dizaine d’années, Anouck Grau travaille à la fois en tant que cheffe privée – pour des équipes de sport – et comme consultante en communication « pour tout ce qui est en lien avec l’alimentation ». Quand on lui demande comment définir la cuisine holistique, qu’elle prône sur son site Internet, la cheffe parle d’une cuisine qui « nourrit tous les sens » : « Quand on parle d’holistique, on parle de nourrir le corps, l’âme et l’esprit. »
Pour ses adeptes, la cuisine holistique ne se limite pas à une seule forme d’alimentation. « Il n’y a pas de définition dans le dictionnaire de ce qu’est la cuisine holistique. Chacun a la sienne », avoue Anouck Grau. Plus largement, la cuisine holistique s’intéresse à la haute valeur nutritive des aliments. « On va préférer un beaufort au lait de vaches qui ont été nourries naturellement à un camembert industriel », illustre la cheffe privée. Plusieurs autres éléments de la nutrition sont pris en compte, comme l’utilisation de produits de saison et pour la plupart biologiques. La cuisine holistique reposerait également en grande majorité sur une cuisine vegan. « 80 % environ », ajoute Anouck Grau. Jusque-là, rien de révolutionnaire.
Pas de miracle – Ce qui change réellement par rapport à une alimentation raisonnée est sûrement la prise en compte de l’humain dans sa globalité, d’où l’utilisation du terme « holistique ». « Quand nous parlons de cuisine holistique, au-delà de manger une alimentation à haute valeur nutritionnelle, c’est aussi l’état d’esprit dans lequel on mange », décrit Anouck Grau. Il faudrait donc privilégier la position assise pour manger et prendre le temps de profiter du repas : « Quand nous mangeons stressés, on sent qu’on a l’estomac noué et, de fait, on a du mal à digérer. »
Outre le corps, l’âme est un maillon essentiel pour les partisans de l’alimentation holistique. Pour Anouck Grau, cela passe par des loisirs comme le cinéma ou le théâtre, mais aussi par le fait de préserver son bien-être. « Il faut également se demander comment on se sent mentalement », ajoute-t-elle. En réalité, le tout pour Anouck Grau est de soigner son hygiène de vie afin de limiter les risques de certaines alimentations sur la santé, par exemple les AVC (accidents vasculaires cérébraux) ou d’infarctus. « Il n’y a pas d’aliment-médicament dans le sens où il ne faut pas manger des pommes pour aller mieux », tempère toutefois la spécialiste.
Eviter la pensée magique – Sur ce point, le professeur à AgroParisTech François Mariotti ne peut que confirmer ses propos. « Il faut éviter de tomber dans la pensée magique », alerte-t-il. L’expert en nutrition de santé publique avoue n’avoir jamais entendu parler du terme « cuisine holistique » auparavant. En nutrition, François Mariotti préfère davantage se tenir au langage scientifique. « Il y aura plutôt une phase d’épidémiologie où on va observer plusieurs facteurs autour de l’alimentation ou du sport, puis la phase où on va établir des convictions. On se dira par exemple « ça a l’air d’être bon pour la santé de manger des légumes ». »
Le tout est de rester dans le domaine scientifique qui cherche à associer la consommation à des états de santé. « La nutrition décrit des effets sur la santé, mais des effets très particuliers. Nous allons dire qu’une catégorie d’aliments est bénéfique pour la santé cardiovasculaire, par exemple les fruits ou les légumes. Ça, on le sait, on a des données qui associent la consommation de fruits et/ou de légumes à une moindre incidence de maladie. » D’autres essais scientifiques peuvent également être mis en place pour, par exemple, tenter de supprimer un aliment d’un régime alimentaire et observer les effets sur la santé de l’individu.
Potos Illustration – Instagram Albane Auvray