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Passerini, Paris : élégance romaine

20 janvier 2017  0  À la petite cuillère
 

signature-food-and-sens Remontez la rue Traversière depuis l’avenue Daumesnil vers le carrefour Ledru-Rollin-Saint-Antoine, et vous tombez sur ce très beau restaurant où le chef romain Giovanni Passerini a installé ses fourneaux. Tout ce que vous apercevez de la rue donne envie d’entrer. La cuisine est pleinement visible de l’extérieur et les cuisiniers travaillent pour ainsi dire en vitrine. La salle, située à l’angle de deux rues, bénéficie d’une double exposition, toujours flatteuse. Avant même qu’on se mette à table, l’œil trouve déjà à se nourrir. Mais ce n’est pas un restaurant de look, c’est un lieu où l’on mange, et c’est du sérieux.

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Giovanni Passerini au passe de son restaurant.

Rappel historique : dans la première moitié de la décennie 2010, une mouvance bistronomique de type naturaliste-post-passardienne s’était épanouie dans le quartier Charonne-Saint-Antoine. À Bones, rue Godefroy-Cavaignac, James Henry séduisait par sa cuisine néo-australienne dénudée et sauvage. Rue de Charonne, Septime prenait son essor. Comme ça paraît loin, tout ça… Pourtant c’était hier. Rino, rue Trousseau, était une boîte à chaussures taille 34 qui faisait restaurant. Giovanni Passerini, malgré l’exiguïté du local, y exécutait des plats impeccables et inspirés, notamment des pâtes fraîches renommées. Je me souviens aussi de jolis desserts transalpins, avec des douceurs de fruits confits, d’agrumes et de fleur d’oranger. Rino ferma beaucoup trop vite et nous fûmes privés de Giovanni pendant quelques années jusqu’à l’ouverture, au printemps 2016, de son Pastificio, son atelier-boutique de pâtes fraîches. Le restaurant, juste à côté, n’était plus qu’une question de temps.

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Mes passages à Rino ayant été peu nombreux, je connaissais peu la cuisine de ce chef. Je l’ai découverte, ce soir, savoureuse et robuste. La touche romaine probablement : la cuisine de Rome est connue pour sa rusticité virile. Rustique et viril était le repas que nous avons fait ce soir-là, mais cela n’implique en rien le manque de raffinement. Au contraire. La cuisine de Giovanni est forte, nette et fine. Toutes ces qualités rassemblées nous ont valu une très belle soirée, avec quelques moments d’extase.

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Le décor, sobre et apaisant, s’illumine le soir de deux températures de couleur différentes : une ambiance jaune citrin en salle, alternant zones claires et zones d’ombre, et la trouée du passe projetant une clarté vive et froide, soulignée par l’incarnat des lampes à infrarouges.

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Ageno est un de mes vins préférés, réalisé en Émilie-Romagne par le domaine La Stoppa en macération pelliculaire (c’est donc un vin orange). Je suis heureuse de le retrouver ici au verre, un peu tiède cependant.

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On se console vite avec ce surprenant selvadolce rouge de Ligurie (Imperia), produit en biodynamie ; il sent la ferme, la treille familiale, un soupçon de terre retournée et de musc. Cela va très bien avec la cuisine « virile et rustique » que nous savourons ici. Depuis quelques années, je trouve que le bio, la biodynamie, la démarche artisanale voire naturelle font faire aux vignerons d’Italie des choses très intéressantes. Ne faites pas attention à mon pouce, entortillé d’un pansement de fortune parce que, peu avant de sortir, j’ai rêvassé en rangeant le couteau que je venais d’aiguiser. Vous dites ? Peut-être, mais même les chefs se coupent.

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Moi, quand j’aime un plat, je fais des photos comme ça.

Un récent sondage au sein de l’équipe de Food & Sens a révélé que deux sur trois membres de l’équipe ne supportent pas les tripes. Le troisième, c’est moi. Et j’aurais bien apprécié cet antipasto de tripes à la romaine à la taille primo piatto ou même secondo piatto. Feuillet et gras-double fondants, dans une sauce tomate divine (probablement à base de tomates san marzano, compte tenu de la vivacité de leur goût et de leur couleur), huile d’olive, parmesan, menthe fraîche. Pour moi, le sommet absolu du dîner, mais l’omelette aux oursins de mon voisin n’était pas mal non plus.

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Le plat du jour était une barbue aux endives, à la betterave fumée et à la bergamote : portion copieuse, délicatement grillée à la plancha.

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Les viandes sont à partager, donc à commander pour un minimum de deux personnes : caneton mi-sauvage, carré ou épaule d’agneau de lait… Nous avons opté pour le pigeon de Mesquer en deux services. Le premier service est une belle illustration du talent de Giovanni pour les pâtes : le jus et les abats du pigeon enrobent de fins tagliolini. Un plat de pure gourmandise, sanguin et terrien.

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Le pigeon, cuit rosé, est ensuite servi à la cannibale.

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Un gratin de fenouil et d’oignons et une salade d’herbes au jus de cuisson l’accompagnent.

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Dessert : baba au rhum, agrumes, semifreddo de bergamote. On termine en fraîcheur et en grâce.

Restaurant Passerini – 65, rue Traversière, Paris XIIe. Tél. 01 43 42 27 56. Réservation sur le site. Ouvert au déjeuner du mercredi au samedi et au dîner du mardi au vendredi. Le samedi soir, le restaurant se fait enoteca (bar à vins et petites assiettes), sans réservation. La carte se divise en entrées, primi piatti, un plat du jour, plats à partager et desserts. Le Pastificio Passerini (pâtes fraîches, épicerie fine) est juste à côté.

PS : par le plus grand des hasards (c’est Facebook qui vient de cafter), cette chronique paraît précisément le jour de l’anniversaire du chef. Bon anniversaire Giovanni !

À la petite cuillère
Textes et photos : Sophie Brissaud

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