Claire Sonnet directrice de salle du Louis XV à Monaco – » « Si le chef ne va pas bien, je ne vais pas aller. Chaque médaillon de la chaîne à son importance. «
Le quotidien Nice Matin consacre un portrait à Claire Sonnet la nouvelle directrice de salle du restaurant Le Louis XV à Monaco. On y découvre une jeune femme qui a su s’imposer dans un univers masculin par son savoir faire, mais aussi par l’attention quelle porte aux autres, un engagement personnel débordant d’humanité.
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Les qualités d’une directrice de salle d’un restaurant gastronomique, Claire Sonnet semble les posséder toutes comme par nature.
Dans le ni trop ni trop peu qu’il faut savoir manier l’air de rien pour coordonner les maîtres d’hôtels, sommeliers et chefs de rang du Louis XV, la jeune femme maîtrise les codes avec tant de finesse qu’on en arrive à penser que, chez elle, les compétences sont innées.
Rien de cela bien sûr, quand bien même les prédispositions s’imposent pour exercer un travail très exigeant, en temps et en disponibilité, avec le même sourire délicat.
Arrivée en décembre dernier dans le mythique restaurant d’Alain Ducasse, Claire Sonnet fait partie de ces rares femmes directrices de salle d’un restaurant gastronomique. Elle est aussi une des plus jeunes : 34 ans. Un poste de coutume occupé par un homme ; un homme plutôt d’âge mûr de surcroît… Mais, on le sait, Alain Ducasse n’aime pas les coutumes qui n’ont d’autres justifications que d’en être précisément. Pas plus du reste qu’il aime casser les codes juste pour bousculer. Le chef est plutôt toujours en quête de perfection pour le restaurant gastronomique de son pays d’adoption.
« La première femme dans la haute gastronomie mondiale »
« Claire Sonnet est la première femme dans la haute gastronomie mondiale, explique Alain Ducasse. Je pense qu’elle est prête à apporter une certaine différence, un supplément d’élégance et de raffinement, ainsi que la justesse de ton et d’empathie qui est plus importante que le service par lui-même, que l’on saura toujours faire dans sa dimension technique. »
Alors, même si une directrice installe sa personnalité et ses méthodes de travail peut-être de manière différente à celle d’un homme, Claire Sonnet ne considère pas ‘faire un métier d’homme.’
« C’est une question de perception des choses ; je ne le vois pas de cette manière-là. De la part du personnel et des clients, je n’espère pas être perçue comme différente parce que je suis une femme. En tout cas, personnellement, je ne le perçois pas. J’essaie de faire mon métier. De plus, Alain Ducasse a toujours été en avance sur la place de la femme dans la restauration. »
La jeune femme n’est pas de celle qui agrémente ses mots de qualificatifs ou ses phrases à grand renfort de subordonnées. Elle n’exprime pas de sentiments. Question de tempérament mais aussi d’éducation et surtout de fonction.
À Versailles où elle a grandi et fait ses débuts, il est vrai que l’art du service s’inscrit dans la lignée droite du service à la Française discret, précis, soigné.
Avec la confiance d’Alain Ducasse
Avec la confiance d’Alain Ducasse, elle a tout pour poursuivre une carrière qu’elle a portée très vite très haut. Pourtant, rien ne laissait imaginer son choix de métier à 18 ans.
En 2005, le bac Sciences économiques en poche, elle s’inscrit à la fac de Nanterre et décroche une licence de psycho après trois années d’études. « J’ai trouvé un emploi dans une brasserie de luxe pour gagner un peu d’argent. C’est là que j’ai découvert le goût de recevoir. » C’est ainsi qu’elle décide, seule, d’intégrer l’école Ferrandi Paris pour un CAP de service de salle et passe également une licence en management de la restauration.
« Ce qui me plaît, c’est le rapport avec l’humain, le plaisir de recevoir, l’art de la table. Le moment du service est dédié aux clients. Il faut qu’ils aient l’impression que le temps s’arrête. Être au service des gens, ce n’est pas forcément bien perçu ni bien compris. Le service, c’est aussi la découverte des produits, des saveurs. Je suis fascinée par l’orchestration qui s’opère quand vient l’heure de l’arrivée des premiers clients. »
Cette orchestration, c’est aussi et d’abord la mise en place avant chaque service qui exige le meilleur de tous. « Si le chef ne va pas bien, je ne vais pas aller. Chaque médaillon de la chaîne à son importance. Il faut les mettre dans les meilleures conditions. Tous ont l’amour du métier. » Les études de psycho ne ressurgiraient-elles pas là? « Dans l’ouverture d’esprit et l’écoute peut-être… »
« Chaque jour est une découverte »
Un service parfait : un dosage comparable à celui dont le chef Dominique Lory a le secret pour offrir les saveurs les plus délicates avec précision et constance. Car le secret d’un trois-étoiles, c’est bien sûr la garantie de l’excellence. Et pour cela, en cuisine comme en salle, rien ne vaut la fidélité et l’amour du métier.
Claire Sonnet travaille ainsi depuis dix ans pour Alain Ducasse. « Nous avons tous envie de promouvoir les valeurs du chef. Nous sommes des ambassadeurs. Alain Ducasse a la capacité à avoir des visions. Il a un temps d’avance sur tout. Il nous encourage à aller plus loin. »
Au Louis XV, Claire Sonnet veut inscrire sa personnalité dans la durée. Elle qui a travaillé cinq ans au Plaza Athénée, où elle a gravi un à un les échelons pour devenir le bras droit du directeur de salle Denis Courtiade, veut aujourd’hui mettre à profit tout ce qu’elle a appris. « Chaque jour est une découverte. Il faut laisser du temps au temps. Dans l’équipe, il y a des piliers et de nouvelles recrues, des hommes et des femmes. C’est une richesse. »