Janvier 2019 : portraits à la petite cuillère
Avant de retourner en Chine pour retrouver Dai Jianjun et sa splendide campagne chinoise (j’ai besoin, pour cela, de me concentrer bien davantage qu’il ne m’est possible actuellement), je vous propose de rester à Paris et d’admirer quelques jolis minois du monde food croisés ce mois de janvier.
Avais-je dit Paris ? Bruxelles aussi. Il est magnifique, il est barbu, il est arménien, il travaille le pâté en croûte comme un horloger suisse. Karen Torosyan dévoile son koulibiak de saumon à son restaurant Bozar et porte l’art ancien du pâté à une dimension fabuleuse.
La preuve par l’image. Nous aurons l’occasion de reparler de Karen. C’était le 19 janvier.
Le lendemain, Les Grandes Tables du monde célébraient leur soixante-cinquième anniversaire au Ritz Paris. C’était l’occasion d’admirer quelques belles bobines de chefs, certaines légèrement pâlies par l’anxiété de l’étoile qui vacille, qu’on attend, qu’on espère ou dont on craint la perte. Mais les bobines ci-dessus n’exprimaient aucune anxiété. Juste l’assurance d’une expérience sereine, d’une maîtrise à qui on ne la fait plus. Christian Le Squer (Le Cinq), Michel Sarran, George Blanc.
Notre administrateur de Food&Sens, Guillaume, smartphone sur le cœur, arbore avec fierté son bracelet d’admission au grand raout Michelin, auquel il se rendra une fois la réception terminée.
Un trio de chefs pâtissiers bourrés de talent. De gauche à droite : Aleksandre Oliver, de La Maison Bleue (Yoann Conte) ; Brandon Dehan, de L’Oustau de Baumanière ; François Perret et sa bonne bouille (Le Ritz).
De François Perret, les emmitouflants, chuchotants, caressants, croustimoelleux petits choux Chantilly. Le culot de la simplicité pour le maximum de goût, de légèreté, d’honnêteté dans le choix des produits.
Du même François Perret, qui collectionne les miracles, un petit four que je déclare sans honte le meilleur de Paris : un nid d’abeilles doucement croustillant en pâte à cigarettes russes, floqué de chocolat et dissimulant en son cœur une noisette de beurre au miel de châtaignier.
François s’apprête à allumer les feux de Bengale sur le gâteau d’anniversaire.
Vol d’oiseau de la place Vendôme à la place d’Aligre. Rue de Cotte, au restaurant Virtus prêté pour l’occasion par Chiho Kanzaki et Marcelo Di Giacomo (récemment gratifiés d’une étoile au Michelin), l’ambiance est nettement plus studieuse. Andy et Joe — on dirait des noms de personnages de western. Andy = Andrea Petrini et Joe = Joe Warwick, les deux compères aux manettes des World Restaurant Awards. Ces deux messieurs sérieux comme des papes (il ne faut pas se fier aux apparences, mais là ils sont incontestablement sérieux) ont convié quelques figures de la food parisienne à exprimer quelques réflexions devant une caméra. Concentrés comme un tube de Nestlé pendant les interviews.
Christophe Pelé (Le Clarence) va droit à l’essentiel pour nous décrire sa passion de cuisiner.
Chihiro Masui et Céline Pham répondent aux questions de Joe et Andrea. Enfin, surtout Chihiro.
Nous terminons sur Andy et Joe savourant la détente du travail bien fait. Les World Restaurant Awards prennent leur premier envol le 12 février prochain, place de la Bourse. On en sait au moins ceci : c’est beaucoup, beaucoup, beaucoup plus rigolo et nettement moins sado-maso que le Michelin, et ça se prend beaucoup moins au sérieux.
À la petite cuillère
Textes et photos : Sophie Brissaud