Thierry Marx – Il indique être entré en cuisine par effraction, mais son rêve de toujours reste de décrocher la troisième étoile
Le Chef Thierry Marx c’est exprimé cette semaine sur BFMTV dans le programme Grand Format, pour écouter son interview, cliquez ICI
Chef de cuisine, d’entreprise, artiste de la cuisine moléculaire mais aussi président de l’UMIH, Thierry Marx ouvre les portes de son atelier parisien à Hedwige Chevrillon.
C’est un petit atelier confidentiel, caché dans le 11ème arrondissement de Paris. Ouvert tous les jours de la semaine, Thierry Marx et ses collaborateurs viennent y travailler, écrire, créer, expérimenter. « On y a placé tous nos souvenirs, toutes nos envies », résume le chef étoilé.
On y trouve deux grandes armures de samouraï, une collection de sabres qu’il a restaurés lui-même et une série d’œuvres de l’artiste plasticienne Mathilde de l’Ecotais, sa compagne. Ce sont des ouvrages imprimés sur du métal ou de la toile tendue, réalisés avec la réflexion du soleil. Tout dans cet atelier est zen, à l’image de son chef.
Il est bouddhiste shintoïste, et la spiritualité tient une grande place dans sa vie. « Pour devenir un chef et un chef d’entreprise, il faut garder sa verticalité, être capable d’aller de l’avant et ne pas copier ce qu’il y a autour« . Pourtant, enfant, Thierry était bien loin du chef zen d’aujourd’hui: « je suis rentré dans le métier par effraction » déclare-t-il.
De pâtissier à cuisinier, en passant par l’armée – Tout a commencé par le judo. La pratique de cet art martial japonais lui donne un « cadre éducationnel ». Alors qu’il a arrêté l’école, il croise la route d’un boulanger et rentre chez Les Compagnons du Devoir, un mouvement qui forme les jeunes aux métiers traditionnels en se basant sur l’apprentissage. Il obtient son CAP de pâtissier en 1978. En rentrant de son service militaire il décide de passer son brevet, puis son bac. Sa revanche sur ses jeunes années. Enfin, il fait ses armes dans diverses grandes cuisines: Ledoyen, Taillevent puis Rebuchon…
Son talent est repéré, on lui confie les cuisines de grands hôtels à l’étranger, l’histoire est en marche. Mais ce qui cristallise son identité actuelle tient dans sa rencontre avec Raphaël Haumont, un chercheur chimiste, à Paris-Saclay. C’est entre 2004 et 2006 qu’ils développent ensemble leur passion pour la cuisine moléculaire.
Dans ses cuisines, « c’est calme », affirme-t-il. C’est d’ailleurs la façon dont ses collaborateurs et employés le décrivent à l’occasion du « colleague survey ». Une fois par an, les collègues décrivent leur ambiance de travail de façon anonyme. « On a un management très inclusif, explicite-t-il, je suis dur avec les faits et bienveillant avec les gens ». Son engagement social ne s’arrête pas aux frontières de ses cuisines… Depuis quelques temps, il rayonne sur tout le secteur.
En octobre, Thierry Marx a en effet été élu, à plus de 70% des voix, président de l’UMIH, l’union des métiers et des industries de l’hôtellerie. « J’ai dérangé des cercles en arrivant », raconte-t-il. Dans ce mandat, il fera face à trois gros chantiers. Premièrement, la communication externe et interne de l’organisation. Ensuite, l’attractivité du secteur. Un gros morceau quand on sait qu’il y a en ce moment même 200.000 postes vacants dans l’hôtellerie-restauration. Et finalement, ce qui semble lui tenir le plus à cœur: l’impact social de « nos métiers ».
Lors de sa campagne il s’est engagé à offrir une mutuelle santé « digne de ce nom » au secteur, « c’est un de mes combats », déclare-t-il fièrement. Réfléchir et réduire l’impact environnemental du métier fait également partie de ses projets au sein de l’union. Mais son engagement ne s’arrête pas là: depuis son investiture, il réclame la simplification des procédures de légalisation des travailleurs étrangers. « Un jour ils sont légaux, l’autre ils ne le sont plus, pourtant ils sont là depuis des années« , tranche-t-il. Le secteur emploie actuellement 19% de travailleurs étrangers.
Chef de cuisine, précurseur de la cuisine moléculaire, quatrième dan au judo, président de l’UMIH, Thierry Marx porte de multiples casquettes et jongle habilement entre chacune. Celui qui se dit « viscéralement attaché à Paris« , sa ville de naissance, n’a désormais plus qu’un rêve: décrocher une troisième étoile grâce à la cuisine moléculaire.
Par Eva Serayol