Olivier Roellinger –  » devenu cuisinier par goût du voyage et de l’autre « 

30 juillet 2017  0  Chefs & Actualités
 

signature-food-and-sensLe port d’attache du chef Olivier Roellinger, c’est Cancale, en Bretagne. Là, dans sa maison natale, il a installé l’atelier où il crée ses mélanges d’épices, tout en dirigeant son restaurant, Le Coquillage, situé à quelques kilomètres. Devenu cuisinier, dit-il, « par goût du voyage et de l’autre », il a passé récemment une quinzaine de jours inoubliables au Japon en famille.

La magazine GEO est allé à sa rencontre.

GEO Pourquoi votre voyage au Japon, en novembre 2016, a-t-il été aussi marquant ?

Olivier Roellinger – Dans un monde où les codes de conduite sont dictés par l’économie, il est bon d’arriver dans un endroit où les gens ont gardé une certaine politesse, une courtoisie, un art de vivre ensemble. L’hospitalité y est naturelle comme chez tous les îliens. Et j’ai trouvé beaucoup de points communs entre la Bretagne et ce pays. Il y a le Japon d’une part et l’île de Sein d’autre part : l’endroit où le soleil se lève et celui où il meurt. Nous avons aussi en commun le sarrasin : les pâtes soba pour eux, les galettes pour nous. Enfin, les langues bretonne et japonaise utilisent toutes deux des mots qui suggèrent, plus qu’ils ne disent.

Qu’est-ce qui vous a touché dans ce pays ?

Le raffinement et la poésie… Dans leur rapport à la lumière, par exemple. Les Japonais aiment la pénombre. Dans la maison que nous avions louée à Kyoto, les portes coulissantes étaient recouvertes de papier de riz, afin que la lumière soit diffuse, créant une atmosphère particulière. J’aime aussi les jardins zen, dont les motifs évoquent les rides que la mer laisse sur le sable à Chausey. Par ailleurs, à Kyoto, j’ai été subjugué par des béquilles, soutenant les branches d’un arbre vieux et malade, admirablement nouées. Le travail accompli pour sauver cet arbre m’a vraiment touché. Cette délicatesse concerne aussi la nourriture… Bien sûr. Là-bas, on découvre des goûts insoupçonnés dont il faut plusieurs jours pour comprendre la subtilité. Ce sont des saveurs pastel, fondues, que l’on ne distingue pas d’emblée. En Occident, le mot «fade» est péjoratif, car on ne sait pas interpréter cette saveur. Au Japon, on découvre que c’est tout un univers, subtil et riche.

Quels repas vous ont le plus marqué ?

C’est dans le quartier de Setagaya, à Tokyo, que j’ai dégusté les meilleurs sushis, préparés par un homme qui travaille avec sa femme et son fils. La délicatesse de ce plat réside dans la découpe du poisson, puis dans la cuisson du riz et son assaisonnement. Chaque grain est alors une perle et provoque un plaisir intense. Et puis, à Hirogawara, à deux heures au nord de Kyoto : là, dans une vallée perdue, se cache le plus beau ryokan [auberge traditionnelle] du pays, Miyamasou, où cuisine un chef exceptionnel, un Michel Bras nippon. Le repas nous a été servi dans une pièce privative. Au Japon, vous n’êtes pas un simple client mais un hôte, et le rapport humain qui s’établit avec ceux qui vous reçoivent est très fort.

Votre voyage avait aussi pour but de rencontrer vos producteurs…

Nous sommes allés dans le village de Yuasa, un bourg de la préfecture de Wakayama, où a été inventée au XVIe siècle la sauce soja. Un mélange de blé grillé concassé et de haricots de soja, auxquels les artisans ajoutent du sel qu’ils récoltent eux-mêmes et de l’eau. La fermentation dure jusqu’à trois ans. L’atelier que nous avons visité n’avait pas changé depuis l’époque médiévale japonaise. Puis dans une ferme, à trois heures de route de là, dans une vallée de toute beauté non loin du mont Kōya, nous avons été reçus par un couple, producteur de poivre sanshō, qui pousse d’une manière presque sauvage. Cueilli en mai, il a un parfum de citron vert. Fin août, le goût d’une confiture d’agrumes. Ils en récoltent 500 kilos par an et nous avaient préparé un déjeuner français : salade de tomates, quiche, ragoût de légumes. Tout était cuisiné avec ce poivre. Délicieux.

Source – GEO – magazine GEO n°458
© B. Teillet
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