F&S a posé quelques questions à Gwendal Poullennec, le responsable monde du guide Michelin

01 février 2020  0  Non classé
 

signature-food-and-sens  « Au Michelin, il n’y a pas de traitement d’exception« 

En début de semaine, la cérémonie annuelle du guide Michelin dévoilait sa sélection 2020. Au programme de ce nouveau cru, trois nouveaux restaurants 3 étoiles, onze nouveaux restaurants 2 étoiles, et quarante-neuf nouveaux restaurants 1 étoile. Une fois la cérémonie passée, qui charriait avec elle son lot habituel d’émotions et d’effervescence (retrouvez ICI les réactions en direct des chefs étoilés présents sur place), nous avons interviewé le directeur du guide rouge, Gwendal Poullennec. Il nous a partagé son évaluation de la sélection 2020, et est revenu pour nous sur les nouveaux partenariats du guide avec La Fourchette et TripAdvisor. Un entretien à retrouver ci-dessous.  

F&S : Comment trouvez-vous cette édition 2020 ?

Gwendal Poullennec : Nos inspecteurs se sont vraiment régalés toute l’année 2019 ; la sélection 2020 en est la preuve. C’est une sélection très riche, avec une grande diversité, et des tables partout dans l’hexagone. On a eu à la fois des ouvertures, et des restaurants qui ont progressé dans l’excellence gastronomique, en passant d’une à deux étoiles, ou de deux à trois étoiles. On note d’ailleurs une très belle promotion sur les restaurants deux étoiles, avec 11 nouveaux restaurants 2 étoiles cette année. Cela témoigne du rayonnement de la cuisine française, et du vrai élan gastronomique que nous avons encore en France sur l’ensemble des territoires et des terroirs.

F&S : En début de cérémonie, vous avez déjà évoqué cette thématique du rayonnement culinaire de la France ; est-ce un sujet qui vous tient à cœur, ou bien y revenez-vous parce que vous avez le sentiment que ce rayonnement culinaire n’est pas assez reconnu ?  

G.P. : Non, c’est plutôt que je déplore parfois qu’on ne positive pas assez sur les atouts réels dont la France dispose, et dont la gastronomie fait bien entendu partie. De fait, la scène gastronomique française témoigne d’une vraie diversité et d’une grande émulation. De plus, la cuisine française en tant que type de cuisine rayonne partout dans le monde. Pour preuve, les deux dernières années ont vu éclore beaucoup de restaurants étoilés de par le monde, que ce soit aux États-Unis ou en Asie. A ce propos, j’ai d’ailleurs un souvenir assez ému de la cérémonie du guide Michelin Singapour (qui a eu lieu en septembre 2019, NDLR) ; deux restaurants trois étoiles y ont été révélés, et tous deux sont justement des restaurants français, l’un traditionnel et l’autre créatif. Et à Paris cette année, l’un des nouveaux 3 étoiles est un restaurant porté par un chef japonais (Kei Kobayashi), qui sublime nos produits avec sa précision et sa sensibilité nippone. Voilà qui fait partie de la belle histoire de la cuisine de France ; c’est cette capacité à embrasser des talents, et à faire cette synthèse des cultures, sans rien renier de son ADN ni de ses produits.

F&S : Le fait que le Michelin ait signé un partenariat avec La Fourchette et TripAdvisor, est-ce que ça dit quelque chose d’une direction nouvelle que peut potentiellement prendre le guide ?

G.P. : Le guide a toujours eu la même vocation et le même principe : à savoir, faire des recommandations qui doivent être actuelles, pertinentes et justes, à destination des clients et des voyageurs. Ces recommandations, Michelin n’a de cesse, depuis son origine en 1900, de les rendre accessibles au plus grand nombre. A l’époque, c’était donc au travers du guide papier et des cartes routières. Puis on a eu le site internet. Aujourd’hui, on continue le développement numérique, car ces partenariats permettent de rendre notre sélection accessible au plus grand nombre. TripAdvisor est un véritable carrefour d’audience ; à ce titre, faire un partenariat avec cette plateforme s’inscrit parfaitement dans la continuité de notre mission, qui a toujours été de recommander et de partager nos informations et nos classifications. J’en profite pour préciser qu’il n’y a aucune influence de nos partenaires sur notre sélection ; le guide reste parfaitement indépendant. On fait notre sélection, qui est ensuite diffusée sur plusieurs supports, pour une plus grande visibilité. Tout comme les médias participent à diffuser les recommandations du guide Michelin, il est tout à fait logique que des plateformes numériques le fassent aussi. Et ceci est destiné à se multiplier… Notons au passage que les plateformes numériques ont besoin d’un avis qualifié ; en partageant nos informations, elles viennent implicitement confirmer que le label Michelin, plus que jamais, est un label de confiance.

Sur scène avec Audrey Pulvar, lors de la cérémonie Michelin France 2020

F&S : Pour autant, ne craignez-vous pas que peut-être, ces partenariats numériques puissent brouiller quelque peu l’identité du Michelin ? (TripAdvisor étant parfois considéré comme pas toujours fiable, alors que le Michelin se réclame d’une certaine expertise.)  

G.P. : Quel que soit le canal de diffusion de notre sélection, celle-ci est faite avec la même rigueur. Il n’y a aucune interaction entre notre sélection et les canaux de diffusion de cette sélection. Cela reste toujours la sélection Michelin, certifiée Michelin, faite par le guide Michelin.

F&S : Un commentaire sur l’affaire Marc Veyrat ?

G.P. : Non, j’ai mentionné les points principaux toute à l’heure ; à savoir, que notre mission consiste à rendre service aux personnes qui vont pousser la porte des restaurants, en leur fournissant des recommandations actuelles et justes. Si on a décidé de passer certaines tables à deux étoiles, c’est parce que sur la base des repas effectués dans l’année, nos inspecteurs ont collectivement décidé que ces tables devaient être recommandées à deux étoiles plutôt qu’à trois. Pour nous, le nombre d’étoiles est un reflet de la réalité. On comprend bien sûr l’émotion que le retrait d’une étoile peut engendrer ; mais au guide Michelin, il n’y a pas de traitement d’exception, je le dis et je le répète. Que vous soyez une maison connue et reconnue, un chef médiatique et emblématique, ou bien un jeune chef qui emprunte à la banque ou à ses parents pour se lancer à son compte, vous serez tous évalués avec la même équité.

F&S : Vous travaillez pour Michelin depuis des années ; qu’est-ce qui fait votre attachement au guide rouge ?

G.P. : Dans mon cas comme dans celui des inspecteurs, ce sont des métiers de choix. Ils nécessitent une passion, un engagement, des horaires de travail souvent importants. Si on fait ce travail, c’est vraiment parce qu’il nous plaît…  

Par Anastasia Chelini
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