Zineb Hattab : Première chef Végan étoilée en Suisse – Interview par F&S

Zina Hattab a récemment reçu le Mérite Culinaire Suisse. Ce prestigieux prix national reconnaît sa cuisine végane éthique, savoureuse et innovante, profondément inspirée par son héritage culturel.

Une présentation inspirée de souvenirs d’enfance (Photo DHV)

Zineb Hattab a représenté les Alpes  Suisse pendant la 4ème édition du grand festival gastronomique Andorran: Andorra Taste. Cette jeune femme de 36 ans qui est aux commandes de trois restaurants Kle, Dar et Cor à Zurich est étoilée Michelin en rouge et en vert ! Kle est le premier restaurant Végan en Suisse à avoir cette distinction. La cheffe suisse partage avec Food&Sens son étonnant parcours, de l’ingénierie à la haute gastronomie végane, entre influences andalouses, catalanes, suisses… et un amour partagé des montagnes d’Andorre et de Suisse.

Le restaurant Dar propose des assiettes aux influences marocaines et Méditerranéennes (Photo DHV)

Vous avez été invitée à participer à l’Andorra Taste. Aujourd’hui, vous êtes là, qu’est ce qui vous a décidé à venir ? 

« Ce festival, c’est exactement ce que j’aime : une célébration du goût, de l’identité et du territoire. Je me sens très proche d’Andorre : les montagnes, la nature, cette dimension pastorale… Il y a une vraie parenté avec la Suisse, où je vis depuis dix ans. Ces deux pays sont différents, bien sûr, mais dans les deux, le rythme de la nature guide la cuisine. Et puis j’adore le ski alors venir découvrir l’Andorre était une évidence ! En plus, je me réjouis d’échanger à Andorra Taste avec d’autres passionnés, de goûter, d’apprendre des autres chefs !« 

Yaourt de soja à la fraise simplement gourmand et 100% Végan (Photo DHV)
Comme en Catalogne un « Mel y Mato » simplement végétal ! (Photo DHV)

Votre histoire est atypique, pas d’école de cuisine, pas de lycée hôtelier…vous avez quitté une belle carrière d’ingénieure pour devenir cheffe. Comment peut on tout laisser tomber ainsi ?

« Cuisiner, c’est ce qui me définit depuis toujours. À l’université, pendant que mes amis sortaient, moi je restais à cuisiner du riz, des pâtes, à expérimenter souvent pour eux! Je me retrouvais bien moi même, mes amis se régalaient …cela m’a fait réfléchir ! J’ai commencé ma carrière d’ingénieur informatique et puis un jour j’ai décidé de sauter le pas,  largement soutenu par mon mari que j’ai connu sur les bancs de la fac.  J’ai tout abandonné pour me consacrer à ma passion…la cuisine. Un vrai défi que je n’ai jamais regretté. Je me suis mise alors en quête de stage. Le Cellar de Can Roca, m’a ouvert ses portes, puis à New York chez Blue Hill de Dan Barber et ensuite chez Cosme au restaurant mexicain d’Enrique Olvera où j’ai commencé comme seconde avant d’en diriger moi même les cuisines pendant 2 ans. En 2019 j’étais prête à revenir en Suisse avec une idée très claire dans ma tête ouvrir KLE, un restaurant 100 % végane. »

Pourquoi avoir choisi de vous engager dans une cuisine végétale ?

« C’est un choix personnel et éthique. Il y a cinq ans et demi, j’ai décidé de devenir végane, en grande partie à cause de l’impact de l’industrie de la viande. Je ne voulais plus cautionner cela. Et plutôt que de le faire uniquement à la maison, j’ai voulu le porter dans mes restaurants, en prouvant qu’une cuisine sans produits animaux peut être gourmande, généreuse, ancrée dans le terroir et la mémoire. On travaille avec des herbes, des épices, des laits d’amande ou de soja, des fermentations… Je ne cherche pas à imiter : j’essaye de concrétiser mes propres envies. » 

Une présentation des différents ingrédients utilisés dans la cuisine de Zineb (Photo DHV)

Vous êtes née en Espagne, vos parents sont marocains, vous avez vécu aux États-Unis… Quelle place prend cette richesse culturelle dans votre cuisine ?

« Je pense qu’on cuisine comme on est. Mon identité est multiple : je suis née sur la Costa Brava, j’ai grandi entre cultures, j’ai étudié en Catalogne…Et puis il y a eu mon parcours : Bilbao, New York, Zurich… Ma cuisine est un assemblage sincère de tout ça. Chez moi, un flan peut côtoyer une assiette de tapas, une betterave devenir un dessert, et un yaourt maison peut- être fait de soja, d’amandes, de fraises…de vrais souvenirs d’enfance. » 

Mise en place du plat principal pour l’ultime diner gourmand de l’Andorra Taste au restaurant du Casino d’Andorre la Vieille UNNIC (Photo DHV)
Crinières de lion glacées (champignons) , cerises et chou-fleur – Restaurant KLE– 1 * rouge 1* Verte (Photo DHV)

Le succès a été au rendez-vous. Une étoile Michelin, deux étoiles vertes… Quelle est votre prochaine étape ?

« Continuer à raconter des histoires à travers mes plats. J’ai ouvert COR l’an dernier, un lieu plus intime. Ma cuisine, c’est une langue vivante. Elle parle de moi, de ce que j’aime, des paysages que j’ai traversés. Qu’ils soient andorrans ou suisses, les sommets m’inspirent toujours autant.« 

Par Dominique Homs-Vailhé

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