Il y a deux ans quasiment jour pour jour, je poussais la porte de Nomos, pour y suivre un service, sans autre but que la curiosité de la rencontre. L’ambiance était tendue, voire électrique, la cuisine, même si déjà talentueuse et signée, était heurtée, jusque dans ses dressages, comme si chaque assiette cherchait l’affront, par peur ou désir d’être incomprise.
Il y a quelques soirs, un jeune homme posé m’accueille dans un décor sublime signé Caroline Tissier et Solène Eloy (L’Atelier du Mur), avec générosité et sourire aux lèvres : « Bienvenue chez NESO »
Tout dans ce lieu respire le chemin parcouru : de la posture au débit des mots, qui n’ont rien perdu de leur passion mais la laisse vivre plus pleinement, paisiblement, intelligiblement. Le « gosse » comme il se définit lui-même sans concession, qui se battait contre tout et tous a bien vite grandi.
Les débuts – Pour Guillaume, tout commence sur les routes du Tour de France auprès des Compagnons du Devoir. C’est au cours de ce périple qu’il apprendra son premier métier de pâtissier et prendra la mesure de son envie de faire différemment, hors des cadres et des chemins convenus, auxquels il est étranger. Ce besoin viscéral de créer son propre environnement, qui seul lui permet de se sentir en sécurité, l’incitera très jeune à se lancer dans l’entreprenariat.
Il ouvre donc Nomos, avec ses associés, à 24 ans, apprenant sur le tas la réalité de la gestion de l’humain, des ego, d’une affaire, quand elle se porte bien, mais également et surtout quand elle va mal.
De fait, la récente aventure Top Chef aura pour seul but de remettre les compteurs à zéro. Ceux de Nomos, qui s’est pris de plein fouet le désamour parisien de la période post attentats, mais aussi sans doute ceux d’une image écorchée par la véhémence du discours d’un jeune homme pensant devoir aller au combat pour ne pas se faire écraser.
Retrouver sa flamme – A l’heure des bilans, Guillaume s’est aperçu qu’il s’était un peu trop, par nécessité ou engrenage, éloigné de ses intentions premières : plus conciliant, moins exigeant, moins heureux, surtout. Nomos redressé, il était donc temps de revenir aux prémices de ce qu’aurait dû être cette première ouverture , l’expérience en plus.
Comment tout décaler, de la manière de servir en salle à celle de manager ses équipes, en passant par une approche déroutée de la communication, dans la singularité de convictions qui réclament plus de globalité .
Revenir à ses premières passions, également : distillations, fermentations, déshydratations, en vue de donner du caractère et de la personnalité à des produits sourcés avec application et implication, en conscience. L’impact écologique est au cœur de ses préoccupations, sans aucun dogmatisme de façade. « Je ne vote pas vert, mais on sait que l’on va droit dans le mur, alors on réfléchit à ce que l’on peut faire, à notre mesure », ajoutant avec une honnêteté bien souvent tue, « sans que cela dérange notre quotidien ».
De fait le lait arrive encore tiède de la ferme, la pasteurisation se faisant par leurs soins trois jours plus tard, les carottes sont bio et locales et fermentent durant neuf mois, le sapin mis en bocal dans un sirop léger, à surveiller et patienter.
NE/SO, ou comment ancrer sa direction – Nord Est/Sud Ouest. Sens d’une dégustation de vins, orientation idéale des bouteilles dans une cave, règles régissant également une chambre de fermentation, sens des vents favorables à la pêche, comme une boussole qui détermine une ligne de conduite à laquelle il s’applique à ne pas déroger. Etre porteur de valeurs qu’il espère pouvoir être utiles aux autres, aux jeunes plus particulièrement, qui entrent dans ces métiers de bouche et de services, en prônant leur réalité, avec pour étendard, celle de l’échec. Prendre le temps de l’échec. Communiquer sur les tests ratés, et sur l’énergie qu’il est nécessaire de déployer pour persévérer, avec respect et humilité. Il en naitra un livre, « Humains », paru chez Tana Editions, comme un pavé jeté dans le confort des convenances, il poursuit avec NE/SO.
Fabrication et dressage du plat de sardine
Sardine, yaourt de brebis, chlorophylle de lierre terrestre
Carottes d’août et d’aujourd’hui, confites en concentration d’eau de pommes de terre, rafraîchies à la lavande sauvage
Un bocal au passe, le test du soir – à suivre
Dressage de l’huître
Voile de fermentation de sapin
Huître chaude, fermentation de sapin des lacs de Wolfgang, oka confit au cresson
Arthur le sous chef
Lieu jaune ikejime, cendre, fumet d’arêtes crémé et caviar cristal
Paul & Arthur
Mises en place pour le plat de l’agneau
Cuisson du cèleri
Cèleri confit
Chips de céleri déshydraté et agneau juste avant dressage
Agneau maturé de la ferme de Clavisy, céleri confit 10h, jus herbacé
Lait cru et oeuf fermier
Ken, en pâtisserie, aux côtés de Lorie
NE/SO est donc aujourd’hui le lieu du sens, l’affirmation de ses convictions, où Guillaume Sanchez a su créer sa place et son univers, de l’accueil à l’assiette, en recherche perpétuelle.
NE/SO
6 rue Papillon 75009 PARIS www.neso.paris
Voir les commentaires (1)
On sent de l'envie, de la recherche (parfois peut être trop), du désir de bien faire, tant dans les associations que dans le processus de réflexion préalable à la réalisation, avec une légère provocation en toile de fond. La marque des grands et d'une grande équipe§
Ça donne envie et confiance dans la pérennité de la cuisine française. Bravo !!!!!