Le chef pense rouvrir cette nouvelle table avant les fêtes de fin d’année. Le quotidien régional Midi Libre s’est rapproché du chef.
Le chef aux trois étoiles, qui a racheté cet été le fonds de commerce de l’Octopus, à Béziers, compte ouvrir le 15 décembre. Il dévoile les grandes lignes d’un savoureux projet.
Votre projet de reprise du restaurant l’Octopus, il en est où aujourd’hui ?
Pour l’instant, on est sur des plans, des commandes de mobilier, de cave à vins. On crée un bar, on est au début, on attend les retours des PMR, parce qu’on va faire des toilettes handicapées. Et quelques petites choses à côté, comme la cuisine qu’on va remettre un peu en état.
Au niveau du concept du restaurant, vous savez vers quoi vous vous dirigez ?
Sur la déco, on est en pleine recherche, on essaie de faire du local, on a rencontré un gars fantastique, Alain Zerbib sur Béziers, qui fait du bois flotté et on va travailler avec lui, j’ai commandé une table pour le salon (quand on rentre à gauche) et puis peut-être des plateaux de table, un arbre en bois flotté qui pourrait venir habiller un mur…
Et que proposera le restaurant ?
L’idée c’est de faire poisson, produits de la mer, rivière, potager en permaculture bio et puis basse-cour. C’est très nature. Je vais essayer de me rapprocher de ce qu’on faisait chez mes grands-parents : potager et basse-cour. L’idée c’est ça : de faire une volaille par semaine seulement (poulette, chapon, pintade, canard gras, etc.) Et ne pas aller au-delà. Après je voudrais qu’au printemps, les légumes soient les nôtres, parce qu’on va créer notre potager à Béziers. J’ai aussi une autre idée, c’est de faire de l’aquaponie : c’est élevage de poisson, truite par exemple (ça peut se faire à la maison), vous récupérez l’eau du bassin et la passez dans un biofiltre. Et puis cette eau va nourrir un herbier. C’est quelque chose d’assez génial : l’eau des truites va faire grandir admettons de l’oseille. Et à l’arrivée, on fera des truites à l’oseille et la boucle est bouclée.
C’est coller au plus proche de la nature…
Oui c’est ça, je veux essayer de faire un restaurant le plus proche possible de la nature. On est déjà comme ça depuis des années à Fontjoncouse (où il possède l’Auberge du Vieux Puits, triplement étoilée depuis 2010 NDLR) mais là, je vais pousser le bouchon encore plus loin. Ce ne sera pas 100 % bio mais déjà, sur les vins ici, sur 1 200 références, j’ai 40 % de vins bio. On va se servir des noms qu’on a ici, en développant un peu plus l’Hérault. Voilà pour la grande idée générale.
Vous restez toujours sur l’idée de conserver le nom de l’Octopus ?
Non, j’ai changé d’avis. Mais je ne sais pas quoi encore, on a plusieurs pistes, je pense que d’ici 15 jours on saura. Tout le monde me dit que c’est dommage de ne pas utiliser mon nom qui est connu…
Est-ce que le but, c’est de décrocher une, voire plusieurs étoiles ?
On ne va pas brûler les étapes. Mais l’objectif, bien sûr, c’est l’étoile Michelin. D’abord parce que je crois au Michelin. Et parce que je crois que l’endroit mérite une étoile. Il a toujours eu une ou deux étoiles et il faut persévérer là-dessus. Il faut que l’institution de Béziers qu’était l’Olivier demeure. C’est devenu un peu mon rêve. J’étais commis chez Ragueneau, sur les Allées, en 1981. Et à ce moment-là, l’Olivier, qui était à 300 mètres, avait deux étoiles. Je passais devant, je le badais. C’était le premier deux étoiles Michelin du Languedoc-Roussillon. Pour nous, gamins, c’était extraordinaire. Donc il faut qu’on essaie de lui redonner le lustre d’antan et pour l’instant : c’est réussir le boulot et arriver à décrocher l’étoile. Et ce n’est pas parce qu’on le dit qu’on va y arriver. Ce n’est pas si facile que ça, une étoile…
Vous avez un vrai attachement à ce lieu…
Oui et puis un attachement à Béziers. J’y ai grandi, Béziers c’est ma ville. Ma femme est une vraie Biterroise, elle y a toute sa famille. Nous, on est arrivé à Béziers en 1971, déjà Béziers est champion de France. Il faut se rappeler qu’il y avait l’ASB qui donnait des élans patriotiques. Et revenir à cet endroit-là, c’est incroyable. Avec ma femme, quand on a acheté, on se disait, « tu te rends compte », et « si nos parents étaient là… » Pour nous, c’était un endroit où on n’avait pas les moyens d’aller évidemment et qu’on regardait avec admiration. Ils auraient halluciné. Jamais on n’aurait imaginé ça.
Et puis j’ai plein d’amis à Béziers, c’est une ville que j’aime telle qu’elle est, et telle qu’elle est en train de devenir. On voit bien qu’elle est en train de changer, de rajeunir.
Comment allez-vous jongler avec vos établissements, allez-vous nommer un chef ?
Le chef est nommé, je le garde encore secret quelque temps. C’est un de mes anciens, qui a travaillé 4 ans chez moi, puis dans de très belles maisons. On vient d’attaquer la période de recrutement. On va être une quinzaine. Mais on a une grande incertitude, c’est le Covid.
Justement, cela complique beaucoup la donne ?
Disons que ce n’est pas le même nombre de couverts. Si le Covid continue, il y aura moins de monde dans le restaurant et donc moins de personnels. Et puis il faut être prudent. Les aides de l’État ne fonctionnent que par rapport au chiffre d’affaires de l’année d’avant. Là, ça ne marche pas. On ferme (l’Auberge du Vieux Puits NDLR) le 29 novembre. Si on arrive à ouvrir avant les fêtes, je serai présent tous les jours pour lancer la machine, mes fils aussi et ma femme aussi.
Cela reste un pari d’ouvrir au cœur de cette période de crise sanitaire…
Oui, j’ai acheté sur un coup de cœur ! Si j’avais réfléchi pendant deux mois avant… Mais on ne regrette rien, on est content. Depuis le 22 juin, toutes les planètes se sont alignées : on a été élu meilleur restaurant du monde, j’avais besoin d’un appartement, d’un garage, je les ai trouvés, le maire est très heureux de nous accueillir. On est supporté, ça fait plaisir. Quand on est arrivé à Fontjoncouse, ce n’était pas facile facile. À Béziers, on a un sentiment de positivité incroyable, ça nous encourage beaucoup.
« On ne va pas brûler les étapes mais l’objectif bien sûr, c’est l’étoileGilles Goujon(Chef) »