Départ vers le Couserans à l’ouest du département pour notre dernier jour d’escapade ariègeoise. Des paysages entre piémont et haute montagne, au coeur du Parc Naturel Régional des Pyrénées Ariègeoises. Des balades pleine nature dans les 18 vallées du territoire mais aussi des monuments historiques et des rencontres étonnantes….
Par Dominique Homs-Vailhé
Jour 3…
Lorsque l’on quitte Foix, pour se rendre à Saint Lizier, une roulotte de bois un peu en hauteur et une multitude de voitures garées attire notre attention. Une inscription blanche s’impose dans le paysage: L’Épicerie d’Ici …ce drôle de magasin est celui de Christelle Record, une agricultrice revenue au pays pour s’occuper de la ferme de ses parents en se spécialisant dans le veau sous la mère. Pendant le confinement elle organise bénévolement des “drive” pour regrouper tous les producteurs et servir la population. Elle en reçoit la médaille du mérite agricole. Au sortir de la crise sanitaire, elle rencontre un charpentier, Timour Roche qui fabrique des roulottes pour le tourisme, l’idée lui apparait comme une révélation: “voilà ce que je vais faire, un commerce de proximité pour tous les villages environnants qui n’ont pas d’épicerie…” Depuis octobre 21, l’Épicerie d’Ici ne désemplit pas. On y trouve tout et plus encore, du 80% local jusqu’au papier toilette qui est fabriqué en Ariège! Fromages, charcuteries, bières, vins, pain, viandes, volailles, confitures, fruits et légumes Bio, dentifrice…un travail largement récompensé puisque l’Épicerie d’Ici a gagné cette année le “Prix de la meilleure épicerie fine de France” !
Cultivons nous…
Direction Saint Lizier, et son Palais des Évêques du 15ème siècle classé à l’UNESCO. Un magnifique bâtiment édifié sur les anciens remparts gallo-romain et qui sera tour à tour évéché, prison, asile d’aliénés et aujourd’hui musée départemental.
Le musée départemental qui y a trouvé place est remarquable de sensibilité . On y découvre avec charme et modernité les traditions ancestrales du Couserans.
La visite de la cathédrale nous fait découvrir des plafonds peints Renaissance , sauvés des affres des siècles par des couches de peintures successives .
Étonnamment Saint Lizier jusqu’au 17ème siècle se compose de deux villes juxtaposées ayant chacune un seigneur et de deux cathédrales avec un seul évêque. La cathédrale Saint Lizier date elle des 11ème, 14 ème et 15 ème siècles, et possède un magnifique cloître roman . Elle est également inscrite au patrimoine mondial de l’UNESCO au titre des chemins de Saint-Jacques-de-Compostelle en France. Reste qu’au 17ème siècle elle est abandonnée au bénéfice de celle du Palais épiscopal qui perd à son tour son titre au concordat de 1801.
C’est dans les caves voûtées du Palais Épiscopal que le chef Paul Fontvieille a installé son restaurant: Le Carré de l’Ange . Originaire de Sète, et après un passage à la Palangrotte du chef Gemigniani, il arrive en Ariège en 1989 pour ouvrir un restaurant 100% poissons et ça marche. L’ Auberge d’Antan à Saint-Giron devient ensuite son repaire, mais il pose aussi ses casseroles sur les pianos du Carré de l’Ange. Un cadre idyllique qui offre de la terrasse, une vue imprenable sur l’ancienne cathédrale mais aussi sur les plus beaux sommets des Pyrénnées.
Avec un BIP Gourmand Michelin, il propose une cuisine sans apparat, empreinte de régionalisme et de son amour des produits comme la terrine de foie gras du Plantaurel, gelée de figues et brioche dorée ou encore l’œuf de poule bio « parfait », piperade et jambon Cazaux 12 mois.
Le pavé de truite bio XXL , cuit à l’unilatéral, caviar d’aubergines beurre de romarin sait lui aussi se faire gourmand.
Une très belle maitrise des cuissons et des associations de saveurs donnent des assiettes bien travaillées. Paul aime surprendre mais le plus possible avec du local. Au vue du contexte économique et de la demande de la clientèle il s’est avoué obligé de rajouter à sa carte des plats plus traditionnels comme le cassoulet ou le confit de canard …mais pourquoi pas, cela reste des classiques de l’Ariège et n’entame en rien l’intégrité culinaire du chef Fontvieille !
Au pays de “Georgette”
Rencontrer Jean Louis Orengo vaudrait à lui tout seul le voyage! Connaissez vous l’ichnologie? Nous non plus avant, on vous rassure ! C’est la science de l’interprétation des traces quelles qu’elles soient , humaines, animales…Jean Louis est donc Ichnologue et a crée à Saint Lizier un Écoparc passionnant de 3 hectares pour faire découvrir cette activité aux grands comme aux petits. Au cours d’une expédition dans le Grand Nord et voulant alléger son traineau en minimisant son matériel, il s’est délesté entre autre, de la fourchette, ne prenant que cuillère et couteau . Mais ” …une fourchette ça pique, ça choisit, j’étais frustré, je n’arrivais pas à manger correctement…c’est là que l’idée m’est venue en regardant la trace que laisse une patte de blaireau ou même d’ours. Pourquoi ne pas faire une cuillère qui piquerait comme une fourchette? ”
La Georgette est née. Plusieurs années sont nécessaires pour mettre au point ce nouveau couvert, et sa commercialisation débutée en 2001 n’a pas connue le succès escompté. Reste qu’une Médaille d’or au Concours Lépine et la mise en avant de la Georgette par le chef André Daguin “GEORGETTE est la première vraie innovation depuis la création des couverts de table il y a des siècles” a donné le top départ d’un succès sans précédent.
Aujourd’hui plus de 30 milles étudiants mangent dans les restau U avec la Georgette, quand aux chefs, Anne Sophie Pic, Alain Ducasse, Gilles Goujon, Franck Putelat et bien sur Paul Fontvieille, ils ont tous créés des plats spécifiques à déguster avec…Georgette ! La dernière nouveauté de Jean Louis encore une fois primé en or au Concours Lépine est le George: un couteau spécial cranté d’un côté et affuté de l’autre avec une lame plus épaisse au centre …
Un couteau sans danger de coupure pour tailler, découper et plus encore. Souhaitons lui le même succès pour Monsieur que pour Madame !
Nous passons à Moulis, devant les carrières de Marbre d’Aubert, un marbre noir veiné de blanc . Après 70 ans d’inactivité, les carrières ont été redécouvertes et sont exploitées depuis une dizaine d’années par les propriétaires italiens des carrières du marbre de Carrare, Escavamar. Pour la petite histoire, Lady Gaga s’est fait faire sur mesure une monture de lunettes en marbre de Moulis . Quand à son usage en architecture, Jean Nouvel en est très friand !
Fromager de père en fils
Chez les Gimbrede le fromage est une histoire de famille . Dans le Couserans, tout près de Moulis, ils sont parmi les derniers à collecter le lait en direct dans les fermes . “ Le problème est qu’il ne reste que très peu de fermiers qui produisent le lait , nous avons 4 éleveurs BIO dans la région et je travaille avec 3 . Nous aimerions voir s’installer de nouvelles exploitations mais les terrains agricoles ici, pour peu qu’il y ait dessus d’anciennes étables ou bergeries deviennent très chers devant la surenchère de l’immobilier de tourisme …” Christian déplore que l’on ne donne pas une forme de priorité aux agriculteurs . Avec ses 20 tonnes de fromage chaque année « Le Moulin Gourmand » propose des produits haut de gamme estampillés Bethmale IGP Pyrénées au lait cru comme la vallée dans laquelle ils sont produits. C’est aussi le nom d’une technique de fabrication originelle que les fermiers utilisaient en estive avec les moyens du bord. Qu’elle soit de vache, la plus traditionnelle, de chèvre ou de brebis, les tommes sont toutes fabriquées dans les ateliers familiaux et affinées sur place plusieurs semaines selon que l’on souhaite les consommer jeunes ou plus fort en goût.
Dans leur boutique où l’on déguste fromages et autres gourmandises comme le Millas, spécialité locale issue de la farine de mais , il est possible de rester déjeuner en terrasse pour apprécier toutes les créations maison, ravioles à la brousse et au canard, lasagne, cassoulet de fève…
Le Diner de ce soir est en altitude au Col de Port face aux magnifiques troupeaux de vaches qui profitent de leur résidence secondaire du printemps aux premiers frimas.
A l’Auberge de la Sapinière à Saurat nous nous régalons de délicieuses recettes traditionnelles comme la rouzole qui est un farci de viandes de cochon sous forme de galette chaude cuite à la poêle et servie avec l’azinât, une soupe locale au chou. Une table familiale idéale pour approcher la vraie cuisine traditionnelle de l’Ariège.
Pour en savoir plus: Ariège-Pyrénées-Tourisme : https://www.ariegepyrenees.com
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L’auberge de la Sapinière n’a rien à voir avec la première, cambriolée et incendiée. On savait y servir des charcuteries de qualité, les champignons de l’omelette, soit girolles soit cèpes, étaient ramassés par le maître des lieux, et la mousse au chocolat n’a jamais trouvé d’égale à mes yeux, bien que passée dans pas mal d’excellents établissements.
L’actuelle propose de la cuisine de grosse cavalerie bien grasse sans grâce sans délicatesse et de qualité plus que moyenne. Et pourtant les ariégeois savent faire preuve de finesse en matière culinaire.
Je suis surprise de voir cités dans le même article une table comme le Carré de l’Ange , un magnifique endroit avec une cuisine ad hoc, et cette gargote pour toulousains en week-end.