Sixième édition de l’opération Chefs de Gares. Durant une dizaine de jours, plusieurs chefs vont investir les gares et faire partager leur cuisine aux « pendulaires », les clients qui arrivent ou qui partent. Dix jours où la gastronomie entre, à nouveau, en gare. Vivement qu’elle s’y installe… 

 


Photo 7 de Table.com

Depuis plusieurs années, au moins une trentaine si ce n’est quarante, les gares ne sont plus réellement des lieux qui font fantasmer, culinairement parlant. Les « buffets de la gare » ont été remplacés dans le temps par des chaînes de restauration rapide où la plupart des mets, s’ils ne sont cuisinés ailleurs y sont préparés, et dont le goût et le prix font déjà regretter l’achat à peine quelques minutes après. La morale de l’histoire, on se rabat souvent dans le train où la nourriture est loin d’y être meilleur. Bref, les plus courageux se préparent des sandwichs quand les plus aventureux mâchonnent un truc sans goût et sans réelle texture… 

Les chefs recommencent à revenir dans les gares et à installer leurs équipes de professionnels de la cuisine pour, avant ou après un voyage, se restaurer de manière gourmande et qualitative. Eric Fréchon s’est lancé le premier, il y a cinq ans, à la Gare Saint-Lazare à Paris avec la brasserie « Lazare » : « J’étais le premier chef à ouvrir dans une gare et nous constatons avec beaucoup de satisfaction que depuis l’ouverture, Lazare est un immense succès. ». Après ce vrai succès, la société Retail & Connexion, la filial de la SNCF qui s’occupe des commerces dans les gares, décide donc de développer les restaurants pour y installer de vrais chefs à l’instar d’un Thierry Marx, qui a créé la carte en 2016 en plein Paris, à la Gare du Nord de son Étoile du Nord. Le 6 décembre dernier, Michel Roth, a ouvert en Gare de Metz, Terroirs de Lorraine. Au premier semestre 2019, Christian Le Squer et ses racines bretonnes, place à Rennes un bistrot tenu par le Chef Benjamin Le Coat, le Paris-Brest. Et récemment, c’est une institution dans une institution qui fait la nouveauté à la Gare de Lyon, en effet, le chef Michel Rostang a signé la carte de l’immense Train Bleu qui renoue avec le fameux « buffet de la gare » : « Une cuisine délicieuse composée de plats en sauce, de mijotés, de service en salle spectaculaire avec des découpes et flambages devant le client. » 

Depuis six éditions, la véritable cuisine semble donc revenir dans les gares avec l’opération « Chefs de gare ». Du jeudi 04 au 14 octobre, les chefs envahissent presque une trentaine de gares en France en faisant des ateliers et des animations avec des produits locaux et saisonniers. Un roadshow culinaire s’arrêtera dans une douzaine de ses gares et sera animé par Carinne Teyssandier et Loïc Ballet. 

M6 et ses Top Chefs participeront à l’aventure, ainsi Camille Delcroix, le gagnant de la saison dernière sera vendredi 5 octobre à la gare de Lille Flandres, de même que l’ancien candidat Adel Dakkar qui lui sera en show culinaire à Paris à la Gare Saint-Lazare. Jérémie Izarn, le gagnant de Top Chef 2017 s’installera à son tour sur la cuisine mobile à Grenoble le 9 octobre. Cyrille Zen, le demi-finaliste de Top Chef 2012, sera, quant à lui, présent en gare de Limoges le 11 octobre. On change de chaîne avec l’ex-candidat de l’émission Master Chef sur TF1, Frédéric Scheurer qui sera présent, lui, en gare de Strasbourg le 8 octobre, de même que Nathalie Nguyen, le 12 octobre à Tours. 

Beaucoup de chefs seront donc présent cette année dans différents gare de France, le programme complet se trouve sur cette page. Si dans les gares, nous nous rendons compte que l’on commence à manger nettement mieux, nous avons demandé à Michel Roth qui était présent ce matin pour le lancement de l’opération pourquoi nous mangions, à l’inverse, toujours aussi mal dans les trains : « Déjà, dans les trains, il n’y a pas de cuisine alors que dans les gares oui. Dans les trains, on prépare des plats à l’extérieur, que l’on réchauffe ensuite, et qui sont re-préparés après. Il y a un gros travail à faire dessus. Je crois savoir qu’ils y réfléchissent à cette cuisine dans les trains. » On attend impatiemment de passer des Chefs de Gare aux Chefs de Trains, donc… 

 

 

 
 

Aujourd’hui, SNCF Gares & Connexions souhaite « refaire des gares de véritables quartiers de ville, des “city boosters”, notamment via la restauration », assure-t-il. L’intérêt est aussi économique : 10 millions de personnes transitent chaque jour par les gares françaises. Autant de clients potentiels. « 25% de notre chiffre d’affaires se fait sur la restauration (soit le deuxième poste d’achat après la presse, NDLR).

La recette est simple. « Il faut le chef, l’accompagnement industriel et le lieu », énonce le directeur de Gares & Connexions. L’Etoile du Nord, du chef Thierry Marx, est ainsi financé et exploité par Lagardère Travel Retail France, spécialiste du commerce de détail en zones de transport. Situé au coeur du hall, le restaurant a été conçu par l’architecte Patrick Bouchain. Tout en transparence grâce à une verrière à l’armature d’acier noir, il s’intègre parfaitement dans l’ambiance architecturale de la gare du Nord. « A Metz ou à Strasbourg, nous allons réinvestir l’ancien buffet, car nous avons la chance d’avoir des lieux patrimoniaux », précise Patrick Ropert.

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Pour concocter les menus, nos grands chefs se sont mis dans la peau d’un client pressé. « A la carte du Lazare : jambon-beurre, plats du jour simples et rapides à sortir, mais de qualité (saumon grillé, légumes de printemps à l’huile d’olive, salade César, saucisse-purée, etc.), et offres pour le matin, le thé de l’après-midi et l’apéritif du soir, histoire de satisfaire le client à n’importe quel moment », détaille Eric Fréchon, dont le restaurant est ouvert 7 jours sur 7, de 7 h 30 à minuit. Le ticket moyen est de 35 à 40 euros le midi (32 euros à L’Etoile du Nord). Raisonnable.

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Des restos adaptés aux voyageurs

Concernant l’aménagement, les chefs ont aussi dû s’adapter à la clientèle de gare. Le Lazare dispose ainsi d’un vestiaire à valises. Décoré par l’architecte Karine Lewkowicz avec des touches de cuir, de bois, de laiton et de cuivre, il a un lounge pour le café du matin, un coin avec de grandes tables pour les repas d’affaires, une salle de restaurant et un bar central pour grignoter rapidement. L’Etoile du Nord dispose, lui, de trois espaces : la brasserie au rez-de-chaussée pour un passage rapide, le zinc à l’étage pour déguster un verre de vin et un bon repas, et le fournil, pour les plats à emporter. « 20% des clients viennent exprès de l’extérieur, attirés par la présence d’un chef. Un phénomène nouveau en gare », se réjouit Thierry Marx.

Plus largement, le renouveau des buffets est un des axes du programme de modernisation et de revalorisation des gares lancé en 2003 par la SNCF. Un repositionnement équivalent à celui qui touche les aéroports et les aires d’autoroutes. A quand un grand restaurant dans ces derniers ? Parions que les chefs seront nombreux à vouloir prendre le train en marche.