PSG-Saint-Etienne : «J’ai eu la fierté de porter le maillot vert», confie Pierre Gagnaire
Par Yves Leroy
Pierre Gagnaire est un enfant du Forez. Le chef trois-étoiles, l’un des plus renommés au monde, est aussi un grand passionné de l’AS Saint-Etienne dont il cite les noms des joueurs des années 60 à nos jours à la pelle. Installé à Paris depuis plus de 20 ans, cet artiste de la cuisine (70 ans) attend avec impatience la finale de Coupe de France de vendredi contre le PSG où il espère avant tout que son équipe « ne baisse pas les bras ». Invité par le maire de la cité minière, il sera présent au Stade de France. « Mon restaurant principal est fermé, je peux venir sans culpabilité », sourit-il, en préambule à 30 minutes d’une conversation passionnée.
Comment est né votre amour des Verts ? – Mon père avait un restaurant qui accueillait pendant des années les joueurs avant les matchs. Grâce à ça, j’ai connu Jean Snella, Albert Batteux et bien sûr Robert Herbin. J’ai baigné dedans tout de suite. Et j’ai joué à l’ASSE gamin. J’avais 11 ans, j’ai eu la fierté de porter le maillot vert. J’ai disputé une mi-temps en lever de rideau de Saint-Etienne – Cannes. Geoffroy-Guichard, c’était un football à la papa, avec cette ambiance extraordinaire. Les ouvriers qui montaient sur le toit des aciéries. On est dans une autre ère aujourd’hui. J’ai l’amour du maillot, de l’institution, de la ville, mais maintenant malheureusement, on n’a plus une réelle équipe type avec des joueurs emblématiques.
L’identité des Verts et de Saint-Etienne vous ressemble-t-elle ? – Dans ma cuisine, je ne sais pas, mais dans ma façon d’être, oui. À Saint-Etienne, ce sont des gens sérieux, qui ont l’amour du métier, un savoir-faire. Aujourd’hui, cette ville est en souffrance, mais c’est un endroit où on peut compter sur les gens, sur le sens de l’entraide. Quand les joueurs arrivent, on leur offre cette petite lampe de mineurs. A Saint-Etienne, on ne veut pas gagner tous les dimanches, juste ne pas aller en Ligue 2.
L’identité du PSG, très différente, vous plaît-elle aussi ? – Question piège. Mouais… Le PSG produit un football extraordinaire. C’est bien qu’il existe pour amener un éclairage sur la Ligue 1.
Recevez-vous souvent des footballeurs dans vos restaurants ? – Non, on n’est pas assez show off. Ils veulent des ambiances plus électriques, plus people. Ah, si, on avait un joueur qui a adoré notre restaurant quand il était à Paris, (Grzegorz) Krychowiak. Ensuite, il a pris un avion entre deux entraînements et il est venu se marier chez nous. Il m’a offert un maillot de l’équipe de Pologne. J’ai déjà eu Gervais Martel, je connais Jean-Michel Aulas. Et puis Louis Nicollin, qui est venu déjeuner plusieurs fois à Saint-Etienne. Un jour, il n’a jamais vu le match de son équipe, parce qu’il est parti à 22 heures alors que le coup d’envoi était à 15 heures…
Les grands cuisiniers, comme les grands joueurs, allient-ils technique et touche artistique ? – Oui, bien sûr, mais c’est vrai dans la musique, dans le métier d’acteur. Il y a une part de technique et le petit coup de génie, quand on voit Zidane, Mbappé ou Neymar. La différence se fait aussi sur le travail. Quand vous voyez Ronaldo, il est hyper affûté, il a une hygiène de vie incroyable. Nous aussi, si on ne veut pas être carbonisé, il faut être sérieux!
A quel joueur aimeriez-vous être comparé ? – Zinédine Zidane, c’est pas mal, mais celui qu’on appelle le Zidane de la cuisine, c’est Alain Passard. Moi, j’aime beaucoup Paul Pogba. Parce que ce type a une indolence, une facilité et un caractère un peu compliqué, mais le mec est génial. Il a une élégance. Il me fait penser à Salif Keita en ne forçant jamais. Et son frère a joué à Saint-Etienne.
Peut-on rapprocher le plaisir éphémère des émotions du football à celles procurées par la cuisine ? – Oui, mais le problème c’est qu’en foot il y a le ralenti et les meilleures actions. Nous, c’est terminé en un instant. Il n’y a pas les caméras qui passent au-dessus de nos têtes.
A quoi correspond le gain d’une troisième étoile ? – C’est la Coupe d’Europe. C’est gagner la Ligue des champions. C’est le fruit d’un très long travail. Mais après, il faut durer, garder son titre, se remettre en question. Et dans un restaurant, le chef est à la fois le patron du club, le porteur d’eau, le passeur et le buteur.
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Et un grand merci à Loic Perrin qui à 34 ans ne sait toujours pas faire un tacle propre (défenseur ou défonceur).
Il est vraiment temps d’entamer une reconversion.