Il a travaillé 4 ans au NOMA, avant de lâcher la gastronomie pour s’occuper de cantines scolaires.. et ça marche !

 Pas tout à fait délirant comme parcours! Dan Giusti, jeune chef américain formé chez les plus grands, notamment au NOMA du chef Redzepi durant 4 ans, a tout lâché pour se consacrer aux cantines scolaires d’une ville moyenne des États-Unis. Il sert tous les jours scolaires 4 000 repas, et bientôt 9000 repas au quotidien.

La solution pour les cantines en France, ne serait-elle pas de retrouver un chef dans chaque cuisine ? … Certainement, mais la difficulté reste quand même le recrutement et la formation des chefs, finalement où les trouver ?

Il s’exprime sur le Huffingtong Post.

Chef – Du meilleur restaurant du monde aux cantines scolaires. L’Américain Dan Giusti ne fait pas dans la demi-mesure. Après avoir officié au Noma, restaurant danois sacré meilleur parmi les meilleurs au monde entre 2010 et 2014, il cuisine dorénavant pour les cantines d’écoles. 

Ce changement de paradigme lui a valu de figurer parmi les dix finalistes du Basque culinary world prize, un prix prestigieux qui récompense les chefs œuvrant pour le bien commun et qui a été remis jeudi 14 décembre à la Colombienne Leonor Espinosa. 

« Les cantines scolaires américaines servent une nourriture de mauvaise qualité aux enfants. Rien n’est cuisiné dans les écoles. Nous avons de graves problèmes de santé publique. J’estime qu’il est de mon devoir de résoudre cela, à mon niveau. »

Le taux d’obésité des jeunes Américains entre 2 et 19 ans est de 18,5%, tout comme en France. Alors, il crée ​​​​​​Brigaid en 2016, une entreprise qui cuisine pour les cantines de six écoles de New London, une ville de 25.000 habitants dans le Connecticut. « On commence dès l’élémentaire et on va jusqu’à la fin du lycée, explique Dan Giusti. On a 4000 bouches à nourrir. En juin prochain, on en aura 9000, parce que nous travaillerons pour six autres écoles d’une ville voisine. »  

« C’est un immense challenge, je peux vous le dire, assure le chef. Le problème n’est pas le nombre d’étudiants mais le fait de leur faire à manger tous les jours. Nous voulons qu’ils apprécient cette nourriture. On n’est pas dans un grand restaurant, là, on est dans la vie de tous les jours et tous les jours, nous voulons qu’ils mangent à leur faim, et qu’ils ne grignotent pas de barre chocolatée à la pause ».

Pour redonner du pep’s à ces cantines scolaires abandonnées, Dan Giusti a embauché de vrais chefs dans chacune des six cantines. « Nous avons un réseau de chefs de grande qualité à qui l’on explique les enjeux de ce travail. Ils viennent de grands restaurants, de grands hôtels. Nous les encourageons à partager notre motivation. Nous les formons notamment aux contraintes d’une cantine scolaire. « 

Aux États-Unis, les règles d’hygiène, de sécurité et de nutrition font l’objet, comme en France, d’un épais cahier des charges. « 80 pages », nous confie Dan Giusti. Non seulement, il faut suivre ces règles à la lettre, mais il faut aussi cuisiner pour 1,25 dollar par repas et par enfant. « Imaginez-nous, chefs de grands restaurants, qui ne regardent pas trop à la dépense, qui vont chercher les mets les plus raffinés, devoir d’un coup cuisiner pour une somme si petite, et cela tous les jours ». Exit les herbes fraîches et bienvenue à la débrouille.

Dan Giusti a de l’énergie plein son sourire. Il s’amuse des réactions des enfants qui disent ne pas aimer ce qu’il leur prépare. « Les plus petits, ceux de cinq ans, sont difficiles. Mais je ne me décourage pas. Et je vois aussi qu’ils laissent peu de choses dans leur assiette. »

Le chef se souvient de la première école dans laquelle il a officié: « Je prenais des photos des premiers plats, je les mettais sur Instagram, j’étais fier de ce que nous faisions. Jusqu’au moment où j’ai réalisé que ces repas étaient parfois les seuls de la journée pour certains des enfants. Ils se couchaient souvent sans manger. Cela a redonné du sens à ce que je faisais. Ma fierté aujourd’hui, c’est de faire en sorte que leur seul repas leur plaise et qu’ils puissent en emporter un peu s’ils le souhaitent pour les heures qui suivent. »

Dan Giusti a pu se rendre compte de ce crève-cœur, parce qu’il a mis en place, à Brigaid, des espaces de conversation. « Les chefs sont tous les jours à l’école, ils se montrent à la cantine, ils vont bavarder avec les élèves. Ainsi, les petits savent qui cuisine pour eux. Une relation de confiance s’installe. Ils peuvent associer la cantine à un moment joyeux et reposant. Se nourrir, c’est cela également. »

Ci-dessous le chef Daniel Giusti et le chef Redzepi en 2014

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