Yucatán est en ébullition ces jours-ci. Avec Mérida comme épicentre gastronomique mondial, des dizaines de journalistes et chefs internationaux sont arrivé dans la région en attente de la présentation de la liste The Best Chef Awards 2023 que, dans la nuit du lundi au mardi —heure française— nous dévoilera le nom du meilleur chef au monde de l’année.
The Best Chef Awards est un projet lancé en 2015 par la neuroscientifique polonaise Joanna Slusarczyk et le gastronome italien Cristian Gadau. En 2017, les deux ont combiné leurs visions, une plus pragmatique l’autre plus émotionnelle, pour créer un classement que soit centré plutôt sur les chefs que sur les restaurants et dont les chefs sont les votants (en plus d’un panel de 180 experts).
Cette année, c’est la première fois que l’organisation déménage en dehors de l’Europe pour sa célébration. La ville mexicaine de Mérida succède ainsi à Madrid, Amsterdam, Barcelone, Milan et Varsovie.
Au cours de ses six éditions précédentes, quatre leaders mondiaux se sont succédé : Joan Roca, du Celler de Can Roca, qui a été en tête de liste en 2017 et 2018, le Suédois Björn Frantzén, du restaurant Frantzén, en 2019, le Danois René Redzepi, de Noma, en 2020 et, au cours des deux dernières années (2021 et 2022) Dabiz Muñoz. Les rumeurs suggèrent que ce dernier pourrait gagner pour la troisième fois, ce qui serait un vrai record, mais dans la listes des gagnants possibles figurent aussi Rasmus Munk, chef du restaurant Alchemist à Copenhague, Albert Adrià, Virgilio Martinez, René Redzepi et Andoni Luis Aduriz.
Dans l’attente,Yucatán a déjà commencé les célébrations avec le festival Sabores de Yucatan, qui a prévu beaucoup d’initiatives mettant à l’honneur la gastronomie locale (dont la finale du Concours Mondial de Bruxelles – Mexico Selection), un symposium avec les 5 chefs mexicains dans la liste des 100 meilleurs au monde (Jorge Vallejo de Quintonil, Elena Reygadas de Rosetta, Karime López, de Gucci Osteria, Santiago Lastra de Kol et Francisco Ruano d’Alcalde) et de nombreux dîners collaboratifs, tels que celui d’Antonio Bachour et du Péruvien Jaime Pesaque, ou celui avec Santiago Lastra, Jose Luis Hinostroza du restaurant Arca Tulum, Pia Salazar et Alejandro Chamorro de Nuema à Quito, et Jesus Duròn, second du chef Pujol à Mexico.
Bien évidemment, les événements habituels de l’Area Talks et du congrès Food meets Science, tous les deux organisés par le comité The Best Chef Awards, n’ont pas été négligés.
Le premier a vu une table ronde avec les chefs Rodolfo Guzmán de Boragó au Chili, Junghyun Park de Atomix à New York, Jorge Vallejo de Quintonil et la Brésilienne Manu Bufara du Restaurant Manu à Curitiba qui ont débattu avec des collègues locaux tels que Mariana Poo et Wilson Alonzo (Traspatio Maya) du rôle de la haute cuisine dans la préservation de la tradition, de l’enracinement, de la durabilité et de la responsabilité sociale envers les communautés et les producteurs qui leur fournissent les matières premières.
Le deuxième, dédié au rapport entre science et gastronomie, a proposé cette année un format assez novateur où chaque chef était accompagné d’une productrice du collectif Traspatio Maya, une organisation représentant des groupes agricoles de communautés rurales mayas de la péninsule du Yucatán. Chaque duo a parlé ainsi d’un produit de la région, en illustrant la richesse du garde-manger mexicain en tant que producteur et chef.
Jordi Roca, pâtissier du Celler de Can Roca, Casa Cacao et Rocambolesc, a alors parlé du cacao et du miel de Melipona, Albert Adrià, à la tête du novateur Enigma, s’est concentré sur la noix de coco et la palme de coco, Karime López, Mexicaine installée en Italie, à la tête de Gucci Osteria, a parlé du maïs, Diego Guerrero, de DSTAgE, a parlé de l’achiote, le chef yucatèque Roberto Solís, propriétaire de Néctar et Huniik, s’est concentré sur le recado negro, une recette emblématique au Yucatán (à base de tortillas de maïs brûlée, piments et poivrons), et la chef Debora Fadul, de Diacá, à Ciudad de Guatemala, a centré sa présentation sur la papaye et l’origan des montagnes.
Par Lorena Lombardi