Découvrez Locol, ces restaurants qui s’implantent dans des quartiers défavorisés et qui emploient du personnel de proximité, des habitants exclus du système économique actuel.
En Californie, le fast-food se toque de gastronomie
Le chef étoilé Daniel Patterson inaugure un nouvel établissement de qualité dans un quartier pauvre de San Francisco, où les produits frais sont rares.
Les gourmets de San Francisco l’ont connu à la tête du restaurant Coi, où il a introduit la cuisine moléculaire. Ce 25 mai, à Oakland, Daniel Patterson, lauréat de deux étoiles au Michelin, inaugure un établissement d’un tout autre genre : Locol, un fast-food, où rien à la carte ne dépasse 7 dollars (6,28 euros).
Vêtu d’un tee-shirt blanc et d’un tablier noir – les couleurs de Locol – le chef prépare lui-même les burgers rebaptisés « burgs », constitués de 70 % de bœuf et 30 % de graines et de tofu. Pas de frites au menu, ni de boissons sucrées, mais un lit de raifort aux oignons verts dans les sandwiches. Tout est sain et se veut savoureux. Pionnier de la haute cuisine californienne, Daniel Patterson entend démocratiser la gastronomie. Apporter la qualité dans les quartiers défavorisés, ces « déserts culinaires » où les produits frais sont rares. Le premier Locol a ouvert en janvier à Watts, le quartier de Los Angeles dont le nom reste associé aux émeutes raciales de 1965 et 1992. Il emploie aujourd’hui 50 personnes.
Une collaboration de chefs célèbres
Après Oakland, la chaîne compte s’implanter dans le quartier de Tenderloin, le fief des sans-abri de San Francisco. A terme, Daniel Patterson rêve de repas économiques de qualité dans les hôpitaux publics, les prisons, les écoles… Locol est un nom qui joue sur loco, fou en espagnol, et local, comme les produits utilisés en cuisine, tous achetés auprès de producteurs qui ont accepté de rogner leurs marges.
Des professionnels engagés
Daniel Patterson s’est associé à Roy Choi, le cuisinier de Los Angeles qui a fait fortune dans les food trucks et fait entrer le taco coréen dans les guides gastronomiques. Chad Robertson, de Tartine Bakery, le Poilâne de San Francisco, a apporté sa spécialité de pain au koji (riz fermenté) pour le burger. René Redzepi, le fondateur de Noma, le grand restaurant de Copenhague, soutient le projet.
Du financement participatif
Une collecte sur le site de financement participatif Indiegogo a rapporté 130 000 dollars, avec l’aide du réalisateur Jon Favreau et de l’actrice Gwyneth Paltrow. Le restaurant d’Oakland est meublé de cubes et de tables en bois. Au mur, un poster géant, en noir et blanc, représente un jeune accoudé sur son scraper bike, ce vélo aux rayons décorés qui fait fureur dans les quartiers.
Ré-inventer le fast-food
Locol a recruté des jeunes exclus du système scolaire, d’anciens détenus, des employés de fast-food qui en avaient assez de se sentir exploités. « Ma mère cumulait trois jobs, elle n’avait jamais le temps de cuisiner, explique Bam, le responsable du recrutement. On a grandi avec des trucs à réchauffer au micro-ondes, des pizzas. » L’objectif de Locol n’est rien moins que « redéfinir le fast-food ».