C’est en tout cas semble penser Le Figaro qui explique que c’est devenu le terrain de jeu des grands chefs… lisez ci-dessous où cliquez sur le Link pour retrouver l’article en intégralité.
Extraits :
La cuisine pour les astronautes est devenue le nouveau terrain de jeu des grandes toques du monde.
Jeudi, le spationaute Thomas Pesquet décollera de Baïkonour pour une mission de six mois sur la Station spatiale internationale (ISS). Il s’imposera alors comme le premier Français à partir dans l’espace depuis 2008. Certes, c’est un événement. Mais pourquoi en parler dans une rubrique gastronomique ? Parce qu’à cette occasion s’envolent, pour la première fois, des recettes imaginées par deux grands chefs tricolores. Le monde ne suffit pas. Fervents défenseurs de la gastronomie nationale, Alain Ducasse (23 restaurants dans sept pays) et Thierry Marx s’apprêtent à prêcher la bonne parole jusque dans l’espace, à grand renfort de homard breton, joues de bœuf façon bourguignon ou crémeux au citron (parmi treize recettes mises sur orbite par le premier) et de langue de veau Lucullus, suprême de volaille aux morilles sauce au vin jaune et pressé de pain d’épices (trois recettes, en tout, pour le second).
Thomas Pesquet pourra piocher dans les provisions signées Thierry Marx au titre de la «nourriture bonus» : des réserves alimentaires exceptionnelles qui représentent environ 10% de son approvisionnement total -dont 3% (seulement) concoctés par le chef deux étoiles. Les astronautes ont parfois besoin de réconfort. « Ces recettes constituent un support psychologique dans le cadre des missions de longue durée », confirme Romain Charles, qui, à l’ESA (Agence spatiale européenne), s’occupe de la logistique quotidienne des équipages afin qu’ils se concentrent sur leur mission.
De plus en plus de grands cuisiniers européens se lancent en fait à la conquête d’autres étoiles que celles du Michelin. Objectif : mitonner des plats populaires rappelant aux astronautes la vie dans leurs pays. Le patriotisme n’est jamais loin. En 2013, Davide Scabin (chef de Combal.Zero, près de Turin, une étoile Michelin et classé 46 au World’s 50 Best) concocta notamment un tiramisu et un risotto au pesto pour le vol de l’Italien Luca Parmitano. « C’était la première fois que des plats de mon pays étaient envoyés dans l’espace, témoigne la toque, en français dans le texte. Ça m’a touché le cœur (sic) de faire ce travail. » En 2015, Thorsten Schmidt (ex-chef de Malling & Schmidt à Aarhus) prépara un corned-beef aigre-doux avec chou et épices pour le premier astronaute danois de l’histoire, Andreas Mogensen. Au dessert, ses petites météorites en chocolat dissimulaient des messages manuscrits des compagnes des locataires de l’ISS. En 2009, l’Allemand Harald Wohlfahrt (trois étoiles à Die Schwarzwaldstube, non loin de Strasbourg) prépara un veau braisé aux chanterelles pour Frank De Winne; quatre ans plus tard, ce furent des lentilles aux spatzle et saucisse pour Alexander Gerst. L’an dernier, Heston Blumenthal, trois étoiles au Fat Duck, à Bray, à l’ouest de Londres, fut le premier à envoyer une tasse de thé et un sandwich au bacon (voir ci-dessous)dans l’espace.
Deux années de tests et de validations
« Le moment fort, là-haut, c’est lorsqu’ils commencent à échanger les plats de leurs pays, raconte Thierry Marx. Jean-François Clervoy (parti en mission en 1994, 1997 et 1999, NDLR) m’a dit que les produits français font encore l’unanimité auprès des astronautes.»
Alain Ducasse s’impose comme le plus œcuménique. Depuis 2006, il met à la disposition de spationautes européens, américains, canadiens et japonais (mais pas les russes), une large sélection de plats (35 à ce jour), hors «nourritures bonus». Quatre mille boîtes, de 80 à 200 grammes chacune, sont produites chaque année dans une usine Hénaff, en Bretagne (avec laquelle ont également travaillé Marx et Blumenthal). Ironiquement, c’est avec la caponata, une préparation italienne cousine de la ratatouille, que le chef français remporte le plus de succès. D’ailleurs, Davide Scabin en imagina aussi une version il y a trois ans. «Quand je suis allé à Cologne pour la dégustation avec Luca Parmitano, ses deux collègues américains se sont joints au test. Ils ont tellement apprécié les plats qu’ils ont demandé qu’on leur prépare des lasagnes et du tiramisu», se souvient-il. Qui, de la France ou de l’Italie, fait la meilleure cuisine? On connaît cette éternelle bisbille. On ignorait que celle-ci se jouait aussi dans un laboratoire volant à 400 km au-dessus de nos têtes.
Avant d’expédier leurs plats par vaisseau cargo, Davide Scabin, Alain Ducasse et Heston Blumenthal se sont livrés à deux années de tests et de validations. Lorsque l’on demande à Thierry Marx, familier des deux derniers, s’il a échangé avec eux à propos de la gastronomie extraterrestre, la réponse fuse comme une évidence: «Non.» À croire que les cuisiniers de haut vol cultivent un certain quant-à-soi… Le projet de «brigade européenne des space chefs», qui aurait permis de rationaliser les processus de production, est en dormance depuis 2009.
Tous les chefs, en revanche, se rejoignent sur leur approche scientifique…./…
Un sandwich en apesanteur
Le cahier des charges présidant à la réalisation des recettes pour l’espace tient du casse-tête. Par exemple, les aliments doivent pouvoir être conservés à température ambiante pendant 24 mois, dans des conditions sanitaires irréprochables. Les plats sont conditionnés sous forme de sachets lyophilisés ou plus généralement de boîtes de conserve. « Dans l’espace, les goûts sont perçus comme plus fades. Nous devons employer des procédés de cuisine classique: réduction de sauces, épices…», témoigne Quentin Vicas, en charge du dossier «space food» chez Alain Ducasse.
Les miettes volantes pouvant provoquer des dommages matériels irrémédiables, le pain est banni. Du moins, il l’était : le chef britannique Heston Blumenthal est parvenu à mettre au point une mie qui ne s’émiette pas pour la mission de son compatriote Tim Peake, l’an dernier. «La Grande-Bretagne a donné au monde le sandwich. Imaginez si notre contribution à la nourriture spatiale était un sandwich (au bacon) ! », lance-t-il crânement dans le documentaire Heston’s Dinner in Space, diffusé en mars sur Channel 4.