Christopher Coutanceau –  » La mer a des saisons à respecter, comme pour les fruits et les légumes « 

 Retrouvez l’émission  » Cash investigation  » qui s’est intéressé à la pêche du thon rouge, et au commerce du thon en boite, une histoire pas vraiment claire … Et continuez avec l’interview du chef Christopher Coutanceau dernièrement honoré par le guide Michelin du – prix de la démarche durable -pour son engagement a défendre les océans.

Le thon en boîte est l’un des produits phares des cuisines : 8 ménages sur 10 en achètent chaque année. C’est bon, facile à cuisiner et plutôt peu cher. Cette espèce fait partie des poissons les plus consommés au monde. Le magazine « Cash Investigation »  présenté par Elise Lucet, est allé à la pêche aux informations dans les eaux troubles de ce marché mondial de 33 milliards d’euros.

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Les industriels ont mis au point une technique de pêche redoutable qui menace l’une des espèces les plus vendues, le thon albacore. Une pratique pas vraiment écolo, pourtant soutenue par l’Union européenne et l’argent des contribuables. Cette nouvelle enquête du magazine d’investigation de France 2 révèle notamment ce que l’industrie de la pêche thonière préfère ne pas mettre au jour…

Le thon rouge, trésor de la Méditerranée, a failli disparaître.

Pour ce nouveau numéro de « Cash », la journaliste Sophie Le Gall s’est intéressée à l’emblématique marque bretonne Petit Navire. Elle a été rachetée par le groupe Thai Union, numéro un mondial de la conserve de thon. Des millions d’euros ont transité par des places offshore grâce aux bons soins d’un cabinet spécialisé dans l’optimisation fiscale.

Victime de l’appétit des consommateurs, le thon rouge a quant à lui failli disparaître. Son sort est aujourd’hui entre les mains d’une poignée d’armateurs car il vaut de l’or : concentration des subventions, accaparement des quotas, bateaux libyens amarrés dans un port français… Tous les moyens sont bons pour mettre la main sur ce trésor de la Méditerranée.

 

LIBE –  Faute d’avoir décroché une troisième étoile Michelin, le chef rochelais, ardent défenseur d’une pêche traditionnelle et d’une cuisine de saison, a remporté lundi le nouveau prix Bibendum de la démarche durable. 

Après le raout annuel du Guide rouge, qui s’est déroulé lundi salle Gaveau du très chic VIIIarrondissement de Paris, Christopher Coutanceau, cuistot pêcheur, engagé dans la lutte contre la pêche électrique, répond aux questions de Libération.

En quoi consiste votre démarche «durable» en cuisine ?

Le rôle d’un chef, c’est de raconter une histoire, de faire vivre une expérience mais c’est aussi celui de pédagogue. J’ai mon bateau, je pratique la chasse sous-marine et la pêche au leurre. Je connais le poisson, je sais où il se trouve, comment il se nourrit, les qualités de sa chair, la façon de le traiter et le travailler. La mer a des saisons à respecter, comme pour les fruits et les légumes. Un bar à la carte en plein hiver, ce n’est pas normal. Il n’est pas bon à déguster pour la simple et bonne raison qu’il ne mange pas depuis deux-trois mois. Surtout, les stocks ne permettent normalement pas de le pêcher. Même chose pour les langoustines, les moules… Il faut respecter ça. C’est la pêche industrielle qui tue la pêche artisanale et va tuer la gastronomie. 

Vous êtes donc très scrupuleux de la saisonnalité des produits ? 

Ce n’est pas moi qui change la carte du restaurant, mais la nature. A la fin des légumes d’été et au début des racines d’hiver, on a cette période intermédiaire, avec des légumes plus ternes. Je m’adapte. En été, j’aime attendre le maigre et manger les premières tomates. Il y a aussi le rouget, le maquereau… Tous s’accordent naturellement avec des légumes vifs. Le vin, on le boit à base de raisins mûrs seulement. On met en avant le cuisinier, mais sans bons produits, notre métier est impossible. En ce moment, on fait une fine tarte à l’anguille fumée et à la truffe noire. Ou encore une déclinaison sur l’oursin servie avec un carpaccio de betterave confite en croûte de sel et algues marines. En été, on développe des mets moins prisés comme les anchois, la langue de merlu, l’anémone de mer ou les sardines que j’utilise de la tête à la queue. On ne gaspille rien. 

Dans trente ans, pensez-vous toujours cuisiner du poisson, malgré le problème du réchauffement climatique et de la surpêche ?

Je pense que j’aurai le temps de finir mon métier. Si demain je n’ai plus de produits de la mer, je n’aurai plus rien à faire. L’année dernière, on a pris 120 pièces de maigres contre trois cette année. C’est comme votre frigo : à force de taper dedans, on arrive au fond. Ma réalité est donc plutôt pessimiste. Travailler la viande ? J’aime la manger mais ce n’est pas mon truc. Je suis de La Rochelle, la mer est mon terrain de jeu.

Photo – Photo Philippe Vaures Santamaria
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