Nous sommes tous touchés, attristés par la disparition de Serge Vieira, un chef que toute la profession aimait et respectait sincèrement. Nous saluons la mémoire de cet homme qui conjuguait amour et émotion avec délicatesse, aussi bien dans sa vie que dans sa cuisine. Il a traversé la vie discrètement, dans le souci constant d’aider les autres, de les respecter, de les aimer. Souvenons-nous quand il a brillamment soutenu la Team France pour le Bocuse d’or, il avait pris les rênes de la Team France pour la restructurer, donner du sens à l’engagement de chacun(e) dans l’aventure, et les moyens de soutenir efficacement le candidat français afin qu’il renoue avec le podium : pari tenu avec la victoire de Davy Tissot en 2021…
Il a eu toujours à cœur de sortir de l’ombre sa terre d’adoption. Il a su se muer en « châtelain » du Cantal, pour porter haut et loin l’étendard et l’image de la gastronomie, de la grande cuisine française étoilée avec respect et bienveillance
Il est parti après une longue bataille contre la maladie, cette maladie dont on chuchote le nom, qui sans ménagement ni modération fauche chaque jour encore et encore.
Nous avions parlé de son livre EMOTION CULINAIRE publié en 2017, un livre qui racontait l’histoire et la cuisine d’un homme du sud dans le Cantal. La poésie de la nature et des produits sauvages pour des recettes vibrantes, émoustillantes, légères avec ce petit rien qui nous embraque, nous pouvons nous abandonner en douceur dans ce joli château qui marie la plus pure tradition et le modernisme élégant et savourer cette cuisine d’un chef qui connait et maitrise les produits sur le bout des doigts, au coeur du Cantal cher à son coeur. Un livre qui égrénaient des mots qui lui ressemblaient, pleins de poésie et de douceur, généreux, tour simplement.
Nous nous souviendrons de ce valeureux chef. Serge Vieira revendiquait ses origines portugaises, même si il est né à Clermont-Ferrand. il n’a jamais oublié ses origines modestes de fils d’immigrés portugais, bien au contraire. Du Portugal il a le sourire, la bonhomie, la gaieté le sens de la famille et du partage, les valeurs de bon sens et de fidélité. De l’Auvergne il portait le goût du travail, la sincérité, la recherche de l’excellence authentique, le calme et la passion pour la nature. Des liens très forts le liaient au Portugal et à cette Auvergne reculée et mal connue voire mal aimée. il va la quitter cette région perdue, voyager, voler vers d’autres horizons, de nouvelles cultures, d’autres cuisines, d’autres produits. Première étape, la ville, les villes, même petites, il a fuit le Cantal trop « paysan » à son goût. Après son apprentissage et l’obtention d’un CAP et d’un BEP, il se pose à Chamalières chez Dominique Robert, au Château de Marçay à Chinon où il rencontre Marie-Aude, les trois étoiles à Saint-Père-sous-Vézelay chez Marc Meneau et à Saint-Bonnet-le-Froid chez Régis Marcon qui le pousse à se présenter au Bocuse d’Or qu’il remporte en 2005…
Commence une nouvelle vie, de découvertes et de voyages. Il vole plus loin au-delà des mers, en missions de consulting à Lisbonne, Singapour, New-York, Turin, Bruges… et surtout Melbourne. Il aime partager et enseigner, il dispense son expertise lors de stages professionnels pour des chefs français et internationaux et coache des équipes pour le Bocuse d’or…
Entre temps, d’aventure en aventure, ici et ailleurs, Serge Vieira est revenu sur ses terres du Cantal. Tout commence par un coup de cœur en 2006, visite du château de Couffour. Coup de foudre, coup de coeur et coup de pioche pour entamer les travaux pendant trois ans. La ruine branlante va subir une métamorphose, se transformer en château du goût et de l’émotion. Architecture et art contemporains au pied du donjon, les matériaux traditionnels des châteaux forts vont s’unir, se rencontrer pour dessiner un lieu de charme en totale harmonie avec l’environnement. Pierre, bois de frêne et d’orme dont les essences flottent encore dans l’air, acier oxydé, pierre de lave ont vu passer de pieux chevaliers et de belles princesses, la belle affaire, sous les voûtes de la vieille et honorable bâtisse.
La bâtisse, grâce à Serge Vieira, a retrouvé vie, charme et lustre. Les premières émotions jaillissent quand on arrive dans cette campagne auvergnate, tout se conjugue naturellement, ancien passé et aujourd’hui moderne. La création est partout, des jardins, des salles du restaurant gastronomique jusque dans la cuisine de ce valeureux chef qui est comme un poisson dans l’eau en ces lieux fabuleux et marque son empreinte au delà des saisons et des territoires. Il a réalisé son rêve, a ouvert son restaurant à Chaudes-Aigues et a raflé deux étoiles. Il s’est marié avec Marie-Aude son alter ego et a eu deux enfants, Serge Vieira a ouvert au printemps 2018 un hôtel contemporain haut de gamme, une brasserie gastronomique. A Chaudes-Aigues naturellement, son territoire!
Aujourd’hui il rejoint la tables des grands banquets de l’au-delà, nous ne doutons pas qu’il a été accueilli par Paul Bocuse, Joel Robuchon et les autres.
Nous pensons avec émotion à vous Marie-Claude, âme sœur, à vos enfants et à votre famille de coeur et de table, aux brigades qui pleurent un chef, leur chef de cuisine et de cœur, qui a transmis sa cuisine et sa volonté d’aller toujours plus haut, de faire toujours mieux. Tous réalisent à quel point la personnalité et le talent de Serge laissent une empreinte indélébile en eux. Tous ont à cœur d’honorer cet héritage de haut vol. C’est pourquoi le restaurant gastronomique Le Couffour, l’hôtel et le bistrot Sodade dans le village, continueront à accueillir les clients pour leur permettre de vivre « l’expérience Vieira » qui lui tenait tant à cœur.