Positive Mayo réunit ainsi chefs, restaurateurs, et associations autour d’un objectif commun : inciter à agir par l’exemple pour améliorer la société tout en valorisant les initiatives solidaires qui naissent à travers le monde ! Au-delà des murs des cuisines, des professionnels de tous bords s’engagent au travers d’actions concrètes en faveur de causes variées – aide alimentaire, éducation, agriculture durable le tout en résonance avec leurs valeurs personnelles et leur vision de l’hospitalité.
Avec cette plateforme, Positive Mayo dessine un modèle de réseau solidaire, où chaque acteur peut puiser de l’inspiration, découvrir des projets exemplaires et rejoindre un mouvement qui réinvente le rôle social du secteur de la restauration.
Une conférence s’est tenue en marge d’Equip’Hotel permettant ainsi à des acteurs engagés de partager leurs actions et d’inspirer avec sensibilité et conviction le public !
Christian Têtedoie : la cuisine comme soutien aux patients
Christian Têtedoie, chef lyonnais, Président de la Commission de lutte contre la dénutrition, incarne l’engagement social de Positive Mayo en réinventant la cuisine hospitalière pour les patients atteints de cancer au Centre Léon Bérard. Loin des plats sophistiqués et des techniques gastronomiques qu’il pratique habituellement, il adapte ici son savoir-faire à un public aux besoins spécifiques, pour qui l’alimentation devient un défi quotidien.
Répondre aux besoins alimentaires spécifiques des patients
Christian Têtedoie aborde la cuisine hospitalière avec une démarche attentive aux effets secondaires des traitements oncologiques qui altèrent souvent le goût et l’appétit des patients. « Après une chimio, beaucoup décrivent des goûts métalliques ou l’impression de mâcher du carton. J’ai voulu travailler sur des saveurs et des textures plus marquées, pour rendre les plats à la fois nourrissants et agréables » explique-t-il. Son travail consiste donc à créer des plats plus aromatiques, pensés pour traverser cette barrière gustative imposée par les traitements.
En révisant toute la grille des menus, Christian Têtedoie a imaginé près de 400 recettes adaptées, en intégrant des produits plus riches en saveurs, qui stimulent l’appétit et apportent un confort sensoriel aux patients.
Des ateliers pour accompagner les patients dans leur quotidien
Au-delà des repas servis à l’hôpital, Christian Têtedoie a également mis en place des ateliers de cuisine destinés aux patientes atteintes de cancer du sein les aidant à retrouver une autonomie culinaire malgré la fatigue. « Beaucoup de femmes, même épuisées, continuent à cuisiner pour leur famille. Je voulais leur proposer des recettes simples, peu exigeantes physiquement, pour qu’elles puissent s’occuper d’elles-mêmes et de leurs proches sans s’épuiser » confie-t-il.
Dans ces ateliers, il leur enseigne des techniques rapides et des recettes adaptées en veillant à réduire les efforts nécessaires en cuisine. En parallèle, il a mis en place un blog où ces patientes peuvent consulter les recettes et partager leurs propres astuces, créant ainsi une communauté de soutien.
Un accompagnement au-delà des repas : la prise en compte du ressenti émotionnel
Christian Têtedoie ne se limite pas aux aspects nutritionnels et techniques, il intègre aussi l’impact émotionnel de la maladie dans sa démarche. « Les patients vivent des moments très durs, et l’alimentation est souvent l’un des seuls plaisirs qui reste. Il est essentiel de les écouter, de prendre en compte leurs ressentis, même au-delà de leurs besoins alimentaires » souligne-t-il. Pour cela, il organise des rencontres régulières avec les patients, recueillant leurs impressions et leurs émotions autour de l’expérience alimentaire. Fort des retours positifs des patients et du personnel, le chef Christian Têtedoie voit dans ce projet une mission continue. « La cuisine a un impact énorme sur la qualité de vie des patients, surtout dans des moments aussi difficiles. En travaillant avec l’hôpital, je souhaite améliorer chaque jour ce que l’on peut offrir aux patients » Son engagement au Centre Léon Bérard se poursuit donc avec une recherche constante de solutions pour offrir aux patients un confort sensoriel et émotionnel, faisant de la cuisine un soutien essentiel dans leur parcours de soin.
Omar Abodib et Le Cèdre Solidarity : une alliance entre hospitalité et engagement humanitaire
Omar Abodib, restaurateur et hôtelier franco-libanais basé en Normandie, incarne une vision de l’hospitalité profondément ancrée dans la solidarité internationale. En 2021, il fonde Le Cèdre Solidarity, un fonds de dotation destiné à soutenir les populations vulnérables, notamment au Liban, son pays d’origine.
Une réponse immédiate à la crise libanaise
Suite à la double explosion du port de Beyrouth le 4 août 2020, qui a dévasté la capitale libanaise, Omar Abodib mobilise son groupe d’hôtellerie et de restauration, Le Cèdre Hospitality, pour lancer l’opération “Ensemble pour Beyrouth”. Cette initiative, menée entre août et novembre 2020, se concrétise par une importante collecte de dons matériels et financiers, ainsi qu’un premier voyage humanitaire au Liban mais cace à l’ampleur de la crise socio-économique, l’envie profonde d’une action durable se manifeste, conduisant à la création du fonds de dotation Le Cèdre Solidarity en 2021.
Des actions concrètes et durables
Le Cèdre Solidarity finance et met en œuvre des missions d’intérêt général visant à accompagner les populations fragilisées à préserver l’environnement et à soutenir la culture en France et au Liban. Ses grands champs d’action s’orientent autour de l’environnement, la solidarité, la santé et la culture.
Parmi les projets phares, l’initiative “Terre Fertile” vise à développer le maraîchage bio-intensif sur petites surfaces au Liban en s’inspirant de la méthode développée par le maraîcher Jean-Martin Fortier. Ce projet a pour objectif de faire du maraîchage libanais un moteur de développement territorial durable, contribuant à la création d’emplois décents et à la souveraineté alimentaire du Liban.
Une philosophie d’engagement
Pour Omar Abodib, l’engagement solidaire est une extension naturelle de son métier d’hôtelier et de restaurateur. Il considère que l’hospitalité ne se limite pas à accueillir des clients, mais englobe également le soutien aux communautés en difficulté. Cette vision se traduit par des actions concrètes, telles que l’organisation de dîners caritatifs, comme la soirée “Mon cœur est au Liban” en novembre 2023, dont les bénéfices sont reversés à des associations libanaises.
En somme, Omar Abodib, à travers Le Cèdre Solidarity, démontre que l’hospitalité peut se transformer en un puissant vecteur de solidarité internationale, alliant professionnalisme et engagement humanitaire pour répondre aux défis contemporains
Benjamin Tordjman et Hello Ernest : la solidarité au cœur de la gastronomie
Benjamin Tordjman, chef et co-président de l’association Ind’Est, incarne une vision engagée de la gastronomie à travers son initiative Hello Ernest. Ce projet mobilise les restaurateurs pour soutenir l’aide alimentaire locale, démontrant que la solidarité peut s’intégrer harmonieusement dans le quotidien des établissements culinaires.
Le concept du “pourmanger” : une contribution solidaire intégrée
Hello Ernest propose aux restaurants partenaires d’ajouter une contribution solidaire, appelée “pourmanger”, de 50 centimes d’euro sur un plat ou 30 centimes sur l’addition. Ces fonds sont centralisés par l’association et permettent l’achat de paniers de légumes produits en circuit court, distribués ensuite dans des centres sociaux. Ce mécanisme simple et transparent offre aux clients l’opportunité de participer à une action solidaire lors de leur repas.
Un réseau de restaurateurs solidaires
Depuis sa création, Hello Ernest a su fédérer un réseau de restaurateurs engagés, prêts à intégrer le “pourmanger” dans leur offre. Cette communauté dynamique permet de financer chaque semaine des paniers de légumes frais pour 130 familles. L’association met également en avant les nouveaux membres de ce réseau, renforçant ainsi l’impact collectif de l’initiative.
Adaptation face à la crise sanitaire
La pandémie de COVID-19 a posé des défis inédits, mais Hello Ernest a su s’adapter en intensifiant ses actions. L’association a mis en place des distributions de repas d’urgence, préparés par des bénévoles et des chefs solidaires, pour soutenir les personnes en difficulté pendant les confinements. Cette réactivité témoigne de la capacité de l’association à répondre aux besoins immédiats tout en maintenant ses engagements à long terme.
Ouverture du restaurant solidaire “Chez Ernest”
En octobre 2023, Hello Ernest a franchi une nouvelle étape en inaugurant son propre restaurant solidaire, “Chez Ernest”, situé le long du canal dans le 19ᵉ arrondissement de Paris. Ce lieu propose des menus élaborés par des chefs en résidence, avec une partie des bénéfices destinée à financer l’aide alimentaire. L’ouverture a été marquée par un dîner de gala solidaire, illustrant l’engagement continu de l’association envers les causes sociales.
Une vision durable de la solidarité
Benjamin Tordjman et Hello Ernest démontrent que la solidarité peut être intégrée de manière durable et innovante dans le secteur de la restauration. En impliquant les restaurateurs et leurs clients dans des actions concrètes, l’association crée un modèle où chaque repas contribue à un impact social positif, renforçant ainsi le lien entre gastronomie et engagement communautaire
Régis Marcon : l’engagement gastronomique au-delà du profit
Régis Marcon, chef étoilé et fervent défenseur d’une cuisine engagée, exprime une vision résolument humaniste de son métier, où l’impact social dépasse les impératifs économiques. Son engagement solidaire est profond et pragmatique, résumé dans une phrase forte : « Ça nous coûte de l’argent, mais qu’est-ce que ça nous rapporte ! » Ce commentaire résume son approche : bien que ces actions n’apportent aucun bénéfice financier direct, elles enrichissent autrement ceux qui les réalisent.
Une philosophie de l’hospitalité responsable
Régis Marcon incarne un modèle d’hospitalité qui intègre la responsabilité sociale au quotidien. « On a choisi de faire un métier où l’on offre du plaisir aux gens, mais cela nous impose aussi d’en redonner un peu à ceux qui n’ont pas ce privilège. »
Dans son établissement, Régis Marcon a toujours cherché à concilier excellence culinaire et bienveillance envers ses équipes et sa communauté. Cet équilibre est, pour lui, essentiel au rôle de restaurateur. « Nous ne faisons pas que des plats ; on participe à une chaîne d’humanité. Ce métier, c’est nourrir, mais aussi écouter et aider ceux qui en ont besoin » affirme-t-il.
Un modèle de transmission et de solidarité
Regis Marcon s’implique également dans des actions de solidarité, en particulier dans le soutien à la formation des jeunes. Pour lui, le partage des connaissances et des savoir-faire représente une forme de richesse qu’il est essentiel de transmettre. « Nos métiers sont exigeants, mais ils sont aussi faits pour transmettre, pour donner du sens à la vie des jeunes qui choisissent cette voie » explique-t-il. En accueillant des apprentis et en investissant dans des projets éducatifs, il voit un moyen d’incarner une solidarité durable, au service des générations futures.
Une vision entrepreneuriale audacieuse
Loin de se limiter à une gestion classique de son restaurant, Régis Marcon s’engage personnellement dans des initiatives qui dépassent le cadre habituel de la restauration. Ce choix, bien que coûteux, est porteur de sens à ses yeux. « L’argent investi ne reviendra peut-être jamais directement, mais en termes de satisfaction personnelle, de cohérence avec mes valeurs, c’est inestimable » Son engagement est un exemple de leadership éthique dans la gastronomie, où chaque action s’inscrit dans une volonté de contribuer positivement à la société.
Régis Marcon démontre par son discours et ses actions, que la gastronomie peut être un levier puissant de changement, au-delà de la simple recherche de profit.
Positive Mayo, c’est bien plus qu’un site ; c’est une « communauté de mycélium », comme le décrit Régis, l’un des membres fondateurs. À l’image du réseau souterrain reliant champignons et racines dans la nature « Il y a des chefs connus et d’autres moins connus. Ce n’est pas une question de notoriété, mais de valeurs. Nous voulons mettre en lumière des initiatives de toutes tailles, de tous horizons, car chaque action compte » explique Catherine.
La plateforme répertorie déjà plus de 80 projets dans des domaines variés comme l’agriculture durable, l’aide alimentaire et l’éducation, offrant une ressource d’inspiration pour les professionnels de l’hospitalité. Des figures comme José Andrés (World Central Kitchen) y côtoient des acteurs moins médiatisés, tous engagés dans des démarches solidaires. « Nous voulons que les gens s’inspirent de ce que font les autres ailleurs, voir que le bien existe partout » ajoute Catherine.
Avec Positive Mayo, Catherine confirme l’importance de la gastronomie dans la société. « On n’est pas là pour se contenter de servir des repas. On est là pour créer du sens, pour donner un élan » insiste Catherine. En offrant aux chefs et restaurateurs une plateforme pour partager leurs engagements, Positive Mayo engage le secteur de l’hospitalité dans un mouvement solidaire, rappelant que chaque plat peut être porteur de valeurs et d’espoir !
Retranscription faire par Guillaume Erblang / Food&Sens