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– Quand l’annonce de la fermeture des restaurants tombe le 14 mars, vous l’apprenez comment ? « J’étais en cuisine et ce sont des clients qui me l’annoncent, vers 20h20. On s’y attendait, mais pas aussi rapidement. La première personne à qui j’ai pensé, c’est Dries (Delanote), le maraîcher avec qui je travaille. Trois jours avant, il avait déjà perdu tous ses clients belges. La fin de l’hiver pour lui, c’est la pire période : c’est là où il y a le moins de trésorerie. Après, j’ai pensé à toute la marchandise qu’on avait, à ce qu’on pouvait sauver, ce qu’on pouvait mettre à fermenter, à déshydrater… »
– C’est une chape de plomb ou tout de suite vous allez de l’avant ? « J’étais sûr qu’on ne reprendrait pas avant début juin. On s’est demandé comment on allait faire pour aider nos producteurs. Parce que s’il y en a un qui tombe, le 100 % local n’est peut-être plus possible et notre travail depuis 10 ans n’a plus de sens. C’était inquiétant, mais je n’ai jamais eu peur. On s’est tenu suffisamment occupé pendant deux mois et demi, avec les paniers de producteurs locaux qu’on vendait à prix coûtant pour ne pas avoir l’esprit ailleurs, à tourner dans le mauvais sens. »
– Le confinement vous a-t-il fragilisé ? « J’ai trois restaurants, mais un seul salaire que je fais ici au Vert Mont. C’est le même depuis des années, autour de 1450 € par mois. On ne fait pas les vampires sur nos sociétés : quand on dépense un sou, c’est qu’on l’a. C’est l’esprit paysan flamand. C’est comme ça qu’on arrive à payer nos 45 salariés et qu’on a pu compléter le chômage partiel pour qu’ils continuent à l’être à 100 %. Quand il y a des dividendes en fin de bilan, je les investis ailleurs. Mon comptable n’arrête pas de me dire que je pourrais faire plus de frais. Au prochain bilan, je vais lui dire :« tu vois si j’avais fait plus, je n’aurais pas eu la trésorerie pour tenir ». Des super restaus qui se cassent la figure, c’est monnaie courante. Nous, les bases étaient saines, aujourd’hui on sait pourquoi on a bossé avant. Mais ce n’est pas grave, ce n’est que l’argent, je n’ai pas dû licencier. »
– D’un point de vue de restaurateur et d’employeur, estimez-vous que la crise a été bien gérée ? Le secteur est-il suffisamment aidé, alors qu’on entend des grands chefs appeler à davantage de soutien ? « Je préfère ma position à celle du gouvernement. On a été aidé, l’État a pris en charge 84 % du salaire de nos gars. On a de la chance d’être en France. Entendre des grands chefs en demander encore plus, je ne suis pas sûr que ce soit pertinent. Alors oui, les patrons qui se prennent un gros salaire sur leur restau, peut-être leur train de vie va-t-il devoir un peu changer après cette crise.
« J’aurais pu ouvrir pendant le confinement, en termes d’approvisionnement ça n’aurait rien changé. » Après, il y a les petits restaus. On a été les premiers à fermer et les derniers à rouvrir, avec des conditions très strictes. On nous demande des choses qu’on n’exige pas dans les supermarchés. Dans les six-huit mois, beaucoup vont tomber et c’est injuste. En ce qui me concerne, au Bierbuik à Lille, on n’était qu’à 11 mois d’ouverture. Je ne suis pas serein, les six prochains mois vont être cruciaux. Au rez-de-chaussée, je peux accueillir 80 personnes. Aujourd’hui je peux en mettre 22. Or une place, pour que je m’équilibre, doit me rapporter plus que 9,80 €. Donc je m’adapte, avec des commandes à emporter. Mais il va falloir alléger les contraintes. »
– On a assisté à une spectaculaire amplification du recours au local. Ça doit vous faire sourire, vous qui basez votre cuisine sur le 100 % local depuis le début de votre aventure ? « Oui, le confinement nous a confirmé dans les choix qu’on fait depuis 10 ans. À la limite, j’aurais pu ouvrir pendant le confinement, en termes d’approvisionnement ça n’aurait rien changé. Je ne suis ni scientifique ni médecin. Mais je pressens que si on importait moins d’Italie, de Chine, si on n’avait pas voulu manger de fraises en février, peut-être le virus se serait-il propagé moins facilement. C’est aussi un virus de la consommation mondialisée. Et je crois qu’il y a une prise de conscience en ce moment sur ce sujet. »
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Nous nous sommes connus à l'inauguration du Bistro de Jean-Phi, rue des Fripiers, à Mons. J'étais à cette époque, le compagnon, depuis de nombreuses années, de sa maman. Depuis lors, j'ai toujours sui et admiré ta trajectoire. Je vis maintenant dans le Nord et, proche de la retraite, aimerais t'aider dans ta démarche. Nous avons en commun un trait de caractère, je suis fils, petit-fils, arrière petit-fils de paysan, de "bouseux", comme disent les bourges... Je recherche une occupation à temps partiel, dans le domaine qui est ton cheval de bataille, conscient de la même philosophie que la tienne. Si cela peut cadrer avec tes besoins, je suis prêt à t'aider. Si pas, mon admiration envers ta démarche en demeurera indemne. Dan.
Bjour
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