Le quotidien Le Parisien est allé à la rencontre du chef quelques heures avant son ouverture à Lyon, découvrez son interview ci-dessous :
Plus de 4.000 réservations en l’espace de 24 heures. L’annonce de l’ouverture d’EDO, restaurant éphémère de Mory Sacko à Lyon, a littéralement affolé les gourmets. Surdoué des fourneaux, le chef a fait le pari de partir en tournée tout en continuant de cuisiner pour Mosuke, son restaurant étoilé de Paris. Ce mercredi, le jeune prodige, révélé par le concours Top chef , s’installera pour deux mois (jusqu’au 31 juillet) sur l’esplanade de Fourvière, première étape de son périple. A quelques heures du rendez-vous, il s’est confié à 20 Minutes. Avec toute l’humilité et la sympathie que les spectateurs avaient pu découvrir, l’an dernier, sur le petit écran…
Dans quel état d’esprit êtes-vous à la veille de l’ouverture ? – Je suis à la fois content et excité même s’il y a plein de choses à boucler dans l’urgence. C’est un projet d’envergure. A l’inverse de Paris, je ne connaissais pas forcément les fournisseurs mais ça s’annonce très sympa (rires).
Pourquoi avez-vous décidé de partir en tournée et pour quelles raisons votre choix s’est porté sur Lyon en tant que première étape ? – A Paris, on avait ouvert EDO l’été dernier (sur le parvis du Palais de Tokyo). Cela a très bien fonctionné, nous avons réalisé de très gros services pendant trois mois. Mais je trouvais dommage de revenir au même endroit pour proposer la même offre au public. Alors, avec l’équipe, on s’est dit que ça serait super de partir en tournée afin de pouvoir proposer le concept aux visiteurs qui habitent en dehors de l’Ile de France. J’ai donc commencé à regarder plusieurs villes…. Lyon pour moi, c’était une évidence. Déjà quand j’ai ouvert Mosuke, j’ai eu beaucoup de demandes de réservation venant de Lyonnais (rires). Cela m’a mis la puce à l’oreille (rires).
Et puis, je suis venu voir à Lyon. J’ai vu des gens qui aimaient vraiment manger, qui aimaient faire la fête. Il y avait ce mélange de jeunes, d’étudiants, d’actifs qui sortaient aux mêmes endroits et cela m’a bien plu. Le mix de toutes ces raisons, fait qu’on s’est dit que Lyon était la ville parfaite pour entamer cette tournée d’EDO.
D’autant que le cadre choisi est assez sympathique… – Oui, je ne m’attendais pas à ça, j’en ai pris plein les yeux. La vue est vraiment extraordinaire. On aurait presque envie de voir la mer au bout… Mais c’est déjà très bien (rires). J’étais déjà venu à Lyon pour un tournage mais je n’avais pas eu le temps de visiter la ville à fond. J’avais visité la basilique de Fourvière, le Vieux-Lyon. Le fait de revenir va me permettre d’en voir plus et de bouger davantage le soir.
Comment allez-vous jongler entre votre restaurant à Paris et celui de Lyon ? – J’ai une équipe de chefs qui sera à Lyon sur place. Je serai présent pour lancer la machine mais une fois que ça sera fait, je partagerai mes semaines. Sur les jours d’ouverture de mon restaurant Mosuke, je serai à Paris, je reviendrai à Lyon les week-ends. J’y serai généralement le dimanche ou le lundi, voire les deux quand je le pourrais.
Vous allez proposer une cuisine différente de celle qui est à la carte de votre restaurant, pourquoi avoir fait le choix de la cuisine de rue ? – C’est important de le préciser pour ne pas qu’il y ait de déception (rires). La cuisine de rue, c’est vraiment quelque chose que je m’amuse à faire tout autant que la cuisine gastronomique. Les cuisines africaines, japonaises sont aussi des cuisines qui s’expriment principalement dans la rue. Au Japon, il y a des échoppes de partout dans les rues, on peut s’acheter à manger comme ça à la volée. C’est pareil à Dakar ou à Abidjan, les gens vivent en mangeant et vivent pour manger. Cet esprit-là, cet aspect instinctif de la cuisine, ça me parle. Je souhaitais combiner le plaisir de faire une carte qui va amuser tout le monde et la proposition de menus qualitatifs sans qu’ils ne soient trop chers. C’est important pour moi qu’EDO puisse être accessible au plus grand nombre. A Mosuke, on s’en tire avec un ticket moyen à plus d’une centaine d’euros, ce n’est pas accessible à tout le monde.
Combien ça coûtera là ? – Ce sont des menus où l’on prend plusieurs plats à partager à table. Pour les brochettes ou autre, on est sur une fourchette entre 8 et 12 euros. Il faudra compter entre 6 et 7 euros pour les accompagnements. Pour les desserts, on est sur une gamme de 8 euros donc ça reste abordable. C’était le but. Je voulais créer un cadre exclusif avec cette cuisine que j’affectionne, d’autant qu’il y aura deux ambiances, une en journée, une le soir avec des jeux de lumière. C’était sympa d’apporter ce petit clin d’œil de la lumière à Lyon (rires).
On va retrouver ce qui fait le sel de votre cuisine, à savoir les influences françaises, africaines, japonaises ? – Oui, c’est ça. C’est extraire la souche même de ce que j’aime faire en cuisine et la proposer sur une version plus simplifiée. On ne reniera pas les goûts, il y aura des saveurs japonaises, des saveurs de l’Afrique de l’Ouest, parfois même les deux en même temps. On simplifie la forme mais le sujet et le fond resteront les mêmes.
En tant que chef étoilé, c’est important pour vous de diversifier les formes de gastronomie ? – C’est hyper important car un chef, aujourd’hui, ne se définit pas uniquement par une offre gastronomique. J’ai envie que ma cuisine parle à beaucoup de gens tout en restant le plus accessible possible. On s’enrichit aussi avec les cuisines de rue parce qu’on se débarrasse de la recherche purement technique pour se concentrer sur le goût et l’instinct. Nous, les chefs gastronomiques, on a tous à gagner de faire de la street food au final (rires). Cela reste aussi bon et même parfois, c’est meilleur. Par exemple, certaines personnes prennent plus de plaisir à déguster un poulet frit qu’un plat beaucoup plus complexe que l’on aurait du mal à décrypter. Cela peut s’avérer frustrant au final. La cuisine de rue peut être très, très bonne. Et surtout, elle doit l’être car quand on simplifie quand on réalise quelque chose de plus simple à envoyer, le goût doit être irréprochable.
Vous ouvrez ce mercredi jour de la finale de Top Chef, l’émission qui vous a révélé. Est-ce que vous allez y jeter un œil ? – (Rires) Non, en fait je serai en service donc je ne pourrais pas regarder mais j’embrasse très fort Mohamed car on se connaît bien. Je lui envoie plein de gros bisous. C’est un ancien collègue, c’est forcément mon favori. Je pense qu’il a toutes les qualités pour remporter cette finale, il les a déjà bien montrées dans le concours. Souvent les candidats très techniques peuvent manquer d’humanité. Lui, est à la fois humain et très technique. Le mélange des deux fonctionne très bien.