Lundi 27 janvier 2020 – Paris – Un lundi pas comme les autres aujourd’hui la météo annonce une pluie d’étoiles et des bourrasques de vent qui font voler les étoiles, soulèvent les toques et agitent les casseroles. Tous les acteurs de la scène gastronomique, en marche vers le Pavillon Gabriel pense sans aucun doute à l’Empereur, Monsieur Paul. Sur les chemins qui mènent chefs, journalistes, partenaires à l’Avenue Gabriel, murmures et chuchotements, certains pensent et disent entre deux sourires leur mécontentement, leur désaccord sur le déclassement de la maison Bocuse. La décision était prévisible, voilà des années que les cuisines résonnaient de bruits de casseroles, de bruits de couloir disant que les choses avaient changé, que la troisième étoile n’était plus méritée, que l’établissement devrait être décoré d’un nouveau titre, le sacrant pour toujours, comme une étoile d’or…d’autres ne disent rien mais n’en pensent pas moins, ils sont désormais tous sur des sables mouvants, rien n’est acquis tout est à conquérir, gagner chaque année. Ce n’est pas le moment de déraper avec des mots, seul Marc Veyrat le fait ! Peut-être que le nouveau Michelin pourrait instaurer une rencontre, un débat pour éclairer le monde de la gastronomie, les chefs et les gourmets qui ne savent plus à quel guide se vouer.
Rappelez-vous. Déjà la veille de la sortie de l’édition 2019, on pouvait lire « ... Bien sûr un an après la disparition de M. Paul, ce serait mal venu de retirer la troisième étoile, même cruel. Mais pourtant, de manière insidieuse, la rumeur se propage, nombres d’observateurs avisés indiquent que voilà bien des années que le restaurant ne la méritait plus. Alors… » 2020, le Jupiter de la gastronomie a touché à l’Empereur, Gwendal Poullennec a enclenche la machine, les étoiles dansent, sont plus que jamais filantes.
Tous les chefs et chefs attendent avec une boule au ventre sauf 26 d’entre eux, les 26 triplement étoilés… Frédéric Anton (Le Pré Catelan, Paris), Yannick Alléno (Alleno Paris au Pavillon Ledoyen – Le 1947 au cheval Blanc, Courchevel 1850), Alain Passard (Arpège, Paris), Guy Savoy (Guy Savoy, Paris), Michel Guérard (Les Prés d’Eugénie-Michel Guérard), Regis et Jacques Marcon (Saint-Bonnet-le-Froid), Gérald Passédat (Le Petit Nice, Marseille), Georges Blanc (Georges Blanc, Vonnas), Christian Le Squer (Le Cinq, Paris), Mauro Colagreco (Le Mirazur, Menton a décroché sa troisième étoile l’année dernière), Laurent Petit (Le Clos des Sens, Annecy, triplement étoilé depuis 2019), Bernard Pacaud (L’Ambroisie, Paris), Alain Ducasse (Alain Ducasse au Plaza Athénée, Paris)-(Le Louis XV, Alain Ducasse, Monte -Carlo), Eric Frechon (Epicure, Le Bristol, Paris), Pierre Gagnaire (Pierre Gagnaire, Paris), Anne-Sophie Pic (Pic, Valence), Arnaud Donckele (La Vague d’or, Saint-Tropez), Eric Pras (Maison Lameloise Chagny), Christophe Bacquié (Christophe Bacquié, le Castellet), Emmanuel Renaut (Flocons de Sel, Megève), Arnaud Lallement (Assiette Champenoise, Reims), Michel et César Troisgros (Le Bois sans feuilles, Ouches), René et Maxime Meilleur (René et maxime Meilleur, Saint-Martin-de-Belleville), Gilles Goujon (Auberge du Vieux Puits, Fontjoncouse) qui respirent sans angoisse, Gwendal Poullenec a annoncé que seul l’empereur a été touché, il n’y a pas d’autre trois étoiles déclassés.
La revolution des fourneaux, la guerre des étoiles seront-elles ? Chers chefs, Paul Bocuse vous a fait sortir de vos cuisines… vous allez les retrouver pour conserver ou reconquérir les étoiles filantes ! Gwendal Poullennec le dit et le répète, on n’hérite pas des étoiles, elles se gagnent tous les ans. «On comprend évidemment l’émotion que peut susciter la perte d’une étoile mais il n’y a pas de traitement d’exception. Tous les établissements sont évalués chaque année de façon anonyme par nos inspecteurs», qui visitent les maisons, jugent selon des critères bien définis, «Le choix des produits, la maîtrise des cuissons, l’harmonie des saveurs, la personnalité du chef qui rend la table unique et enfin, la constance» tout au long de l’année « .
Une génération de chefs est en marche. Qu’ils aient reçu la cuisine en héritage ou soient tombés en amour de la cuisine, ils vont devoir prouver chaque année qu’ils sont méritants, brillamment doués pour gagner les galons de la gastronomie. Il leur faut aussi être armés pour être constamment observés et jugés, et vivre cela comme un challenge non comme une épreuve. Ne jamais oublier que la critique est libre. Les choses bougent, se transforment, la domination des intouchables va tomber lentement mais sûrement.
Le Pavillon Gabriel se prépare, aujourd’hui il prend des airs de Palais du Festival de Cannes. Cuisine cinéma, cinéma cuisine ? Ici aussi on monte des marches, on s’assoit dans une grande salle sous les spots, les caméras tournent. Le noir se fait pendant les shows, les lumières se rallument à la fin sous les applaudissements des spectateurs. Avant le grand show, il est certain que beaucoup pensent au dandy qui savait si bien les interviewer, qui aimait la cuisine en parlait avec des mots du coeur et du palais sans se mêler des intrigues de palais qui agitent régulièrement le Guide rouge. Il avait l’instinct, le goût, et la connaissance, la passion et l’appétit, il ne distribuait pas d’étoiles mais des mots qui valaient tous les autres hochets et récompenses, il a rejoint les étoiles non pas celles distribuées par un guide mais celles qui brillent dans le ciel. Tous sont tristes d’avoir perdu l’épicurien pas ordinaire assurément, qui avait créé le mot bistronomie, connaissait les tables, les chefs, les artisans, les vignerons qui font le lien entre les créateurs, les faiseurs de gouts et de saveurs et les amateurs de bonne nourriture, ce « bel ordinaire » qui soulève des passions et agite le monde de la gastronomie. Il s’ appelait Sébastien Demorand, ami, authentique ami des chefs.
À noter – Pour la première fois, cinquante restaurants français seront distingués pour leurs efforts en matière de respect de l’environnement, avec l’apparition d’une catégorie « gastronomie durable ». Cette mention, visible sur le site et les applications mobiles du Michelin, mais pas sur le guide papier, sera représentée par un pictogramme en forme de feuille verte inspirée de la célèbre étoile du Guide. La « gastronomie durable » pour Gwendal Poullennec, « c’est avant tout une dynamique portée par des chefs qui s’engagent pour avoir un impact positif sur la planète et sur la société. Ces actions se concrétisent, au quotidien, dans leur travail avec leurs fournisseurs et leurs salariés. »
Sont déjà listés, les triplement étoilés qui jouent la naturalisé, le respect des produits et des saisons, la proximité et la traçabilité des producteurs, le Plaza Athénée d’Alain Ducasse, L’Arpège d’Alain Passard à Paris, le Mirazur de Mauro Colagreco à Menton (Alpes-Maritimes). Et d’autres verts étoilés, responsables et engagés,David Toutain (Paris VIIe, deux étoiles), la Table de Bruno Verjus (Paris XIIe, une étoile), le Septime (Paris XIe, une étoile), de Bertrand Grébaut.
Dans quelques heures, les résultats !