D’autres éléments marquent toutefois un ralentissement, une baisse d’activité ; une sourde anormalité. Les supermarchés (toujours très fréquentés) exhibent des rayons à moitié vides, du moins dans ceux consacrés aux papiers toilettes, mouchoirs, et autres denrées subitement devenues si recherchées. La livraison en ligne devient très compliquée ; des chaînes de supermarché indiquent carrément qu’elles cessent la prise de toute commande en ligne jusqu’à nouvel ordre (comprendre : jusqu’à réapprovisionnement). C’est le cas de Planet Organic, ou d’Ocado.com. Certains restaurants ferment spontanément. Lundi après-midi, c’était le Alain Ducasse at The Dorchester qui fermait ses portes. Mardi, Yotam Ottolenghi (voir ICI) ; hier, c’était au tour de Sketch d’annoncer sa fermeture. L’étoilé Brat aussi, ainsi que Smoking Goat (tous deux à Shoreditch, dans le même immeuble), et Clove Club. Pendant ce temps, Uber Eats et Deliveroo se portent comme des charmes.
Beaucoup de restaurants restent toutefois ouverts. En l’absence de consignes officielles, chacun fait un peu comme il pense, comme il peut. Ce qui donne lieu à des scènes désolées ; dans des pubs vides, des chefs mélancoliques scrutent indéfiniment les entrées désertées de leur établissement. Casseroles creuses, ustensiles intacts, ils attendent le cœur battant la venue hypothétique de clients raréfiés. À force, ils fermeront ; plutôt faute de clients, plus que par prévention. D’autant qu’en parallèle, d’autres secteurs se ferment. Les entreprises enjoignent à télé-travailler. Aujourd’hui, la mode s’en est mêlée ; par exemple, les boutiques Karl Lagerfeld ont annoncé leur fermeture temporaire au Royaume-Uni. Demain vendredi, les écoles fermeront. La suite s’enclenchera certainement. On verra bien. Le fait d’être raisonnable est une vertu qui se travaille.