CORN’R DE JULIEN DUBOUÉ : LE MAÏS GRAND ROUX BASQUE DANS TOUS SES ÉTATS
Si vous croyez connaître le maïs, Julien Duboué va vous étonner avec Corn’r. Ouverte récemment dans le quartier Pyramides au sein de la Maison de l’Aquitaine, c’est une cafète dédiée au maïs bio de variété « grand roux basque », cultivé par Jon Harlouchet à la ferme Idiartia, non loin de Saint-Jean-Pied-de-Port. Bonne nouvelle pour les intolérants au gluten mais aussi pour les autres, Julien fait passer le maïs par tous les états : boulghour, soupe, salade au maïs torréfié, gnocchis, croque-monsieur, variations sur la polenta et même maïsotto, et pâtisseries dont le célèbre millassou du chef. C’est bon, léger, inventif, avec la touche Duboué : générosité et créativité. Une petite boisson avec ça et vous vous en tirerez difficilement pour plus de 15 euros. Le décor, à l’instar de la cuisine, fait usage du maïs, de ses épis aux doux reflets et de ses grains de toutes les couleurs : où l’on découvre que le maïs ancien est un des plus beaux objets de déco dont on puisse rêver. Corn’r – 21, rue des Pyramides, Paris Ier. Métro Pyramides. Téléphone : 07 50 15 93 17. Du lundi au vendredi de 11 heures à 15 heures. http://www.corn-r.com/
MÁNCORA CEBICHERIA : DIFFICILE DE RÉSISTER
On passe dans cette rue pour tout autre chose et soudain, une tenture bleu roi vous attire, l’inscription cebicheria vous aguiche : une folle envie de poisson cru assaisonné d’un leche de tigre acidulé vous tenaille sans crier gare. Vous avez bien fait d’entrer : les assiettes témoignent d’un vrai sens des saveurs et de la déco, en plus d’arborer l’étonnante polychromie, douce à l’œil, de la cuisine péruvienne. Vous pourrez déguster tiraditos ou cebiches classiques ou nikkei (de style nippo-péruvien) à base de saumon ou de lieu noir, d’excellents anticuchos (brochettes grillées) de poulpe, de gamba ou de saumon ; des chicharrones (sandwichs) de saumon ou de thon, une somptueuse causa (purée de pomme de terre froide) au crabe, et pour finir une très bonne panna cotta ou une mousse de lúcuma (un fruit crémeux adoré au Pérou).
Selon les arrivages, votre leche de tigre sera parfumé au guanabana (corossol) ou des oursins figureront au menu. Rien à reprocher ; tout au plus peut-on regretter un piment un peu trop atténué par égard pour les palais parisiens pusillanimes (amusez-vous à compter les p dans cette phrase). Mancora Cebicheria – 16, rue Dupetit-Thouars, Paris IIIe. Métro Temple. Téléphone : 01 43 48 47 65. Ouvert du mardi au vendredi de midi à 14 h 30 et de 19 heures à 23 heures, le week-end mêmes horaires mais le service du déjeuner se termine à 15 heures.
DÎNER ANNIVERSAIRE CHEZ ANICIA : FRANÇOIS GAGNAIRE EN TRÈS GRANDE FORME
Le 15 décembre, le restaurant Anicia fêtait son premier anniversaire par un dîner spécial, avec la collaboration de la maison Kaviari et des champagnes Langlet. Un repas où le chef François Gagnaire avait mis toute son âme. Les convives, en grande partie des habitués du lieu, ont pu constater une fois de plus le style sensible, lyrique et velouté du chef vellave. Une cuisine gironde, pourrait-on dire.
Pour commencer, le caviar du Velay (un caviar de lentilles du Puy, spécialité du restaurant) cohabitait pour l’occasion avec le caviar transmontanus, puissant, iodé et haut en saveur.
Poulpe « jambe « snacké de la maison Kaviari, pommes mitraille, caviar osciètre, beurre à l’encre de seiche : poulpe fondant et délicieux. Le caviar, au début, se demande un peu ce qu’il fait là, mais quand, en fin de dégustation, il tombe dans le beurre à l’encre de seiche et se mêle à ce crémeux iodé — oh peuchère.
Spectaculaire pigeon fermier, homard bleu, saveurs d’Orient, couscous et pastilla, trait de chutney. Au Puy-en-Velay, c’était un plat signature de François, et il a bien fait de le garder.
Excellente soirée entre amis. Ici François Gagnaire et Hisanobu Shigeta, second du Jules Verne (sur la tour Eiffel).
INTERLUDE
On dit « comme une poule qui a trouvé un couteau ». Voici une poule qui se contemple dans un seau d’eau. Photo prise chez Fred Ménager, à la ferme de la Ruchotte, samedi dernier. La poule est de race Barbezieux.
COLCHIDE : COMFORT FOOD GÉORGIEN
Encore un dîner d’amis, mais comme l’écrit ma copine Chihiro (qui faisait partie des convives), tous des vieux râleurs sauf elle (et dont moi, par conséquent). En fait, assis à une table de Colchide, un des rares restaurants géorgiens de Paris, nous avions trop faim pour râler, c’était la solidarité des situations urgentes qui se manifestait. Les Géorgiens sont les plus anciens viticulteurs du monde, vinifient et élèvent leurs crus en qvevri (grosses jarres de terre cuite enterrées) depuis des siècles, possèdent plusieurs centaines de cépages autochtones, et par-dessus le marché ont une cuisine remarquable, pleine d’aromates étranges (souci, fenugrec bleu). Ils mettent des herbes, des noix et des baies de grenade partout et ont autant de versions de leur khachapuri (pain au fromage fondu) qu’ils ont de régions : ce sont des gens décidément sympathiques.
Et en plus, ils font des vins naturels délicieux au plus haut point, parmi lesquels ce mtsvane orange (vin de macération pelliculaire) tout en contradictions savoureuses, doux et sec, parfumé et balsamique, complexe et sensuel, et des rouges sombres et veloutés sur lesquels on pourrait faire flotter un fer à repasser.
Les plats m’ont moins convaincue, mais pour les entrées, le khachapuri, et ces vins — ah ! ces vins ! —, ça vaut vraiment le coup d’en faire sa cantine. Colchide – restaurant et traiteur géorgien (la boutique traiteur est à quelques pas). 97, rue des Poissonniers, Paris XVIIIe. Téléphone : 09 80 94 09 68. Ouvert du lundi au samedi, de midi à 15 heures et de 18 heures à 23 h 30.
À la petite cuillère
Textes et photos : Sophie Brissaud