Or, le secret est tenu depuis des siècles, à l’exception d’une poignée de familles qui se transmet la recette de mère en fille. Voilà ce qu’il faut pour fabriquer les su Filindeu, des pâtes artisanales que l’on ne façonne que dans la ville de Nuoro, en Sardaigne. La traduction littérale de leur nom – les « fils de Dieu » – dit tout de l’aura et du silence religieux qui les entourent. On les célèbre à deux reprises dans l’année, en mai et en octobre, à l’occasion du pèlerinage de Saint-François.
Cette année, la fête s’est déroulée dans un joyeux tumulte et sous un soleil de plomb ; on y suit traditionnellement un cortège de plusieurs dizaines de cavaliers aussi impassibles que leurs chevaux sont intenables. En tête de cérémonie fanfaronne le nouveau prieur, qui conduit la statuette de Saint-François de l’église de Nuoro jusqu’au sanctuaire du fameux Saint, bien caché dans la campagne sarde. Là-bas, durant une semaine, des dizaines de fidèles campent dans le plus grand dénuement et offrent aux pèlerins et aux curieux de passage la même restauration frugale qu’il y a 300 ans : du vin, des tripes et les fameuses pâtes su filindeu.
De la cuisine de Rafaella Marongiu, l’une des rares détentrices du secret de fabrication, au sanctuaire ensoleillé de Saint-François, nous avons suivi l’itinéraire de ces pâtes, considérées comme les plus rares du monde. Reportage d’Alban Mikoczy, Laura Tositti et Anne Donadini.
L’info en + : le chef anglais Jamie Oliver himself a essayé de fabriquer ces pâtes mais, las, il finit par abandonner. Étirer la pâtes en filaments aussi minces que fragiles demande du temps, de la technique et… une grande dose de patience.