De petits troquets branchés fleurissent un peu partout dans l’archipel, offrant d’exquises boissons torréfiées pour satisfaire même le plus tatillon des accros à la caféine.
Le Japon importe environ 430.000 tonnes de café par an, se plaçant juste derrière les Etats-Unis et l’Allemagne, et s’enorgueillit de compter sur son sol parmi les meilleurs experts au monde de cet art. » Le fait que la culture du thé existait déjà a aidé le Japon à apprécier le café en tant que produit de luxe « , estime Miki Suzuki, 32 ans, récemment sacrée meilleure barista de l’archipel.
« Les Japonais ont un palais extrêmement sensible et savent repérer de subtiles différences de goût« . La jeune femme a séduit le jury en concoctant une boisson aux délicates notes citronnées, chargée en azote, une technique souvent utilisée par les brasseurs de bière artisanale pour obtenir une belle mousse crémeuse. Avant de la décanter dans des flûtes à champagne.
Elle » n’aimait même pas le café au début « , mais désormais elle n’a, avoue-t-elle, qu’un but : » devenir la première femme barista à gagner le titre mondial « .
Le Japon affiche un palmarès impressionnant au World Barista Championship (WBC), avec un vainqueur en 2014, Hidenori Izaki, et un finaliste en 2016, Yoshikazu Iwase. Les atouts des spécialistes nippons: créativité, panache et perfectionnisme. » Un barista se doit d’enchanter le client, tout en douceur, comme un barman. Sa prestation contribue à créer une ambiance plaisante « , estime Takayuki Ishitani, qui participait fin septembre à la compétition japonaise où il s’est illustré à plusieurs reprises.
« En quête perpétuelle » pour composer la tasse de café la plus parfaite qui soit, il a cette fois mis au point une potion bouillonnante avec pour ingrédients de la glace carbonique, un bouquet d’herbes aromatiques et du miel à l’orange.
« C’est une question de persévérance », confie-t-il entre la préparation de deux cappuccinos, dans la boutique de surf où il travaille, dans le quartier tendance de Daikanyama à Tokyo. « À 10 grammes près de lait en plus ou en moins, le goût du café n’est plus du tout le même. On est dans un univers très subtil et c’est ce qu’aiment profondément les Japonais, aller au bout des choses dans le détail ».
À Tokyo et dans tout le pays, il y a de plus en plus de lieux où les « latte artists », qui dessinent d’attrayants motifs sur la mousse de café avec du lait, peuvent faire valoir leur talent. « Je remarque ici un intérêt profond pour la minutie et l’idée que le café peut être si différent », commente l’Américain Scott Conary, membre du jury du championnat japonais de baristas.
Si les premiers documents évoquant le thé au Japon remontent au neuvième siècle, quand les moines bouddhistes l’ont apporté de Chine, le café n’est devenu populaire qu’après la Seconde guerre mondiale.
Aujourd’hui, l’enseigne américaine Starbucks se trouve à chaque coin de rue ou presque, avec plus d’un millier de magasins, et on trouve du café bon marché en canette ou bouteille dans les nombreux distributeurs de rue et supérettes pour » salarymen » débordés.