C’est BFMTV qui a eu la puce à l’oreille quand le chef Yannick Alléno a décroché aujourd’hui la troisième étoile au guide Michelin pour son restaurant le 1947 dans l’hôtel le Cheval Blanc. Mais Michelin ne s’est pas arrêté là, puisque il a aussi attribué 2 étoiles à deux autres établissements. La course est donc lancée … L’Apogée de l’homme d’affaire Xavier Niel, et le tout nouveau 5 étoiles du Groupe Barrière ouvert cette année vont-ils suivre le pas ? … il faut quand même se dire que le chef Pierre Gagnaire et Mauro Colagreco sont entrés dans la course cette année ! … à suivre donc !
Michelin 2017: pourquoi Courchevel a 14 étoiles pour 2.400 habitants
Comment cette station devenue une commune le 1er janvier dernier est passée d’alpage pour les vaches à haut lieu gastronomique mondial, avec une concentration record d’étoiles par habitant ?
Courchevel au sommet… de la gastronomie mondiale. La station savoyarde de luxe est en effet devenue le plus grand repaire de restaurants étoilés de la planète. Avec l’obtention de la 3ème étoile au guide Michelin de Yannick Alléno au 1947, ainsi que l’accession au rang de 2 étoiles des restaurants Le Montgomerie et Le Kintessence (qui les avaient perdues en 2016), Courchevel compte désormais pas moins de 14 étoiles ! » C’est l’une des plus grosses concentrations d’étoiles par habitant « , assure Michael Ellis, le patron du célèbre guide rouge.
En effet, la station qui est devenue une commune le 1er janvier 2017 avec la fusion de Saint-Bon-Tarentaise et La Perrière est désormais la 3ème ville de France en nombre de restaurants étoilés. Seules Paris et Lyon font mieux. Sauf que Courchevel ne compte que 2.400 habitants. Cela fait donc une étoile pour 171 habitants.
Pour quelle raison la station concentre-t-elle à elle seule autant d’étoiles ? Surnommée la Saint-Tropez des neiges, Courchevel est la station la plus chère d’Europe. Selon Trip Advisor, une semaine à Courchevel coûterait en moyenne 5.938 euros pour une famille de 4 personnes, soit 848 euros par jour. La ville compte en effet 16 hôtels 5 étoiles (dont 2 palaces) très prisés par la clientèle russe dont l’Apogée de Xavier Niel et son penthouse à 19.000 euros la nuit. En haute saison (décembre-janvier), 90% des clients de ces hôtels de luxe sont russes ! Et il y a encore plus luxueux. Les très riches qui séjournent dans la station optent généralement pour des résidences privées comme L’Edelweiss, un chalet de 3.000 m² qui se loue jusqu’à 250.000 euros la semaine en haute saison.
Comment Courchevel est-elle devenue la piste aux étoiles des Alpes ? Il faut savoir que le phénomène est relativement récent et s’est effectué en deux étapes. Et c’est par la gastronomie, déjà, que Courchevel a débuté sa montée en gamme. C’est un certain Michel Rochedy qui est à l’origine du décollage de la station. Ce jeune chef ardéchois formé chez André Pic, une star de la gastronomie à l’époque, s’installe au début des années 60 dans cette bourgade où il rachète le Chabichou, un hôtel qu’il transforme en restaurant gastronomique. Une première à l’époque. « À l’époque, s’obstiner à faire de la gastronomie ici tenait du pari, explique le chef sexagénaire dans un article de Slate. On disait que les gens venaient pour faire du sport et manger vite, le médiocre steak frites était la règle. J’étais convaincu qu’il y avait place à table pour des produits, des préparations que j’aimais. »
Les palaces affluent avec les JO d’Albertville
Pari réussi. La clientèle aisée plus portée sur la Haute-Savoie commence à affluer dans la vallée de la Tarentaise. Le Chabichou a même les honneurs du Michelin avec une première étoile en 1979 et une seconde en 1984. La gastronomie des cimes est née.
Mais si Courchevel est à l’époque un lieu réputé et huppé, c’est à partir des années 1990 que la station devient la capitale du luxe des neiges. Ce sont les Jeux Olympiques d’Albertville de 1992 qui donneront un nouvel essor à Courchevel. Les premiers hôtels 5 étoiles arrivent à cette époque. Comme Les Airelles, un petit hôtel transformé en palace par Raymonde Fenestraz, une femme d’affaires qui a fait fortune dans l’immobilier de luxe. Ou encore les différents établissements des frères Tournier qui possèdent hôtels, restaurant et boîtes de nuit à Courchevel et aussi Saint-Tropez.
« À la base c’était une station sociale! »
Et après les pionniers, la station est désormais très convoitée par les hommes d’affaires. Bernard Arnault a ouvert le Cheval Blanc dont le restaurant 1947 vient donc d’obtenir 3 étoiles au Michelin. Le producteur Stéphane Courbit y possède deux palaces dont les Airelles, racheté en 2007 pour 85 millions d’euros. Enfin en 2013, c’est le champion des télécoms Xavier Niel qui a investi 50 millions d’euros dans la station dans laquelle son beau-père ( Bernard Arnault ) était donc déjà présent. D’ailleurs, son hôtel L’Apogée se situe à moins de 200 mètres du Cheval Blanc d’Arnault.
Bref, en quelques années, la station réputée pour son domaine skiable (600 kilomètres de pistes, le plus vaste du monde) et sa poignée de bonnes tables a changé de dimension. On y vient principalement en jet ou en hélicoptère (on compte 8.000 rotations d’hélico par an). Et jusqu’à la mi-janvier, on y entend plus parler russe que français dans les rues. Au grand dam des historiques qui souhaiteraient voir une clientèle plus diversifiée. « La station n’est pas faite que pour les Russes et les milliardaires, explique Éric Claret-Tournier, le patron du groupe Tournier dans Le Dauphiné. Il faut arrêter avec cette image ! À la base, c’était une station sociale. L’ADN de Courchevel, c’est le ski aux pieds. » La » station sociale » a plutôt aujourd’hui la tête dans les étoiles… Michelin.