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Quoi de plus désolant dans une assiette que cette rondelle rouge blanche, figée au sommet d’un monticule de salade ? La tomate triste, la sans-goût, qui rappelle tout sauf un été en Méditerranée, a gagné : même en août, alors que la saison de l’or rouge bat son plein, les chariots se remplissent encore de ces fruits standardisés qui déçoivent immanquablement les palais.
Selon une étude de l’association CLCV que nous dévoilons, seuls 25 % des consommateurs trouvent que les tomates ont bon goût. Une claque pour ce fruit, le préféré des Français, qui en mangent à foison : 14 kg par an ! Entre mi-mai et la fin juin, l’association de défense des consommateurs a fait tester à l’aveugle à près de 900 bénévoles des tomates grappe françaises, achetées 2,90 euros en moyenne, dans des grandes surfaces, des primeurs et des enseignes de hard discount.
Même si les petits commerces tirent légèrement leur épingle du jeu, les goûteurs se disent aux deux tiers déçus par la qualité de leur assiette : 29 % ne l’ont pas ou pas du tout aimée, et 39 % ont jugé son contenu « ni bon ni mauvais ».
Variétés, cueillette prématurée, culture intensive…
Qui a tué le goût de la tomate ? Du champ à la caisse enregistreuse, les acteurs de la filière pointent des suspects différents : les variétés cultivées, la cueillette prématurée, les méthodes de culture intensive hors sol et sous serre…
Pour Jacques Rouchaussé, le président des producteurs de légumes de France, l’ennemi est « la logistique ». « N’incriminez pas les producteurs, nous avons fait d’énormes progrès depuis une dizaine d’années, supplie cet agriculteur, installé à Epernay (Marne). Il est fini le temps où l’on pouvait jouer à la pétanque avec les tomates tant elles étaient dures… Quand on fait des portes ouvertes chez nous, les consommateurs se régalent. C’est le transport le problème. »
« Les variétés qu’on peut tripoter dans les rayons ne sont pas les plus goûtues, admet de son côté Thierry Desouches, porte-parole de l’enseigne Système U. Pour avoir les tomates de grand-mère, il faudrait les faire pousser devant les magasins. » L’enseigne, à défaut, a commencé dans certains sites à reconstituer des rayons fruits et légumes « avec des vendeurs, qui peuvent conseiller les clients et leur proposer des produits plus fragiles, et plus qualitatifs ». Plus chers, aussi.