La Table Vivante – du chef Pierre Jancou – « la simplicité, les choses vraies et la liberté »

 La Poule sur un mur – Notre poule revient d’une longue escapade parisienne, les doigts encore sucrés des nombreuses pauses dans les meilleures pâtisseries de Paris, d’une escapade à la Grande Épicerie de Paris,  d’une visite au Musée Rodin …

Notre poule adore voler jusqu’aux cuisines des nouveaux chevaliers de la gastronomie. Cette semaine elle a découvert avec délice le livre du chef Pierre Jancou et a visité les 5 adresses du talentueux  » bad boy  » de la cuisine au travers d’un livre  – Chair de poule de plaisir !

LA TABLE VIVANTE – Pierre Jancou

LES AUTEURS – Un chef, Pierre Jancou et sa plume FRANCOIS SIMON, le critique masqué, non moins redoutable, talentueux, qui pique, encense et déglingue avec justesse et lucidité les grands et futurs grands de la gastronomie. Le maitre du yoyo des amours et désamours.

Pierre Jancou, passionné, créateur, voyageur, découvreur, initiateur de tendances, curieux.

Différent, atypique, vivant & audacieux. Pourrait être le héros d’un roman de capes et d’épées, d’un film de Fellini, avoir été taille dans le marbre par Rodin, statufié comme un héros grec.

Talentueux – décomplexé – Au regard séducteur, à l’allure élégante follement sexy, un homme beau et fort qui a bourlingué entre établissements de nuit et tables de jour, a agité des shakers aux Bains Douches, a appris sur le zinc et sur le piano les fondamentaux de la cuisine. Offre aujourd’hui une cuisine de partage, d’amour, basée sur ce qu’il aime « la simplicité, les choses vraies et la liberté ».

Un livre dédié à ses deux filles « pour leur montrer que dans la vie, rien n’est écrit, rien n’est acquis. » 

Il sait ce qu’il dit, Pierre, il est le premier d’une génération de chefs libérés, frondeurs et tatoués, doux sauvages, attachants électrons libres, bruts un peu, exigeants absolument sur les produits et précis sur les cuissons. Des chefs tout simplement.

LE SUJET

Un chef et ses tables.

L’histoire, le parcours d’un chef de table en table, de ville en ville. De son Italie il n’a jamais oublié la cuisine des mammas. Entre itinéraire et rebellions, Pierre Jancou le baroudeur se pose chez des grands chefs pour étancher, assouvir sa curiosité et sa soif de connaissances. Il peut ainsi être à la fois barman, cuisinier, chef, restaurateur, caviste, bistrotier. Zurichois, italien. Français.

Un chef atypique qui évolue, se transforme au fil de ses étapes, de ses adresses, de ses rencontres. Il est tour à tour révolté, hipster, bobo, un capteur qui garde en mémoire les saveurs, se les approprie, les transforme pour les faire siennes.

Il puise son inspiration dans le terreau de son Italie natale et défend sa cuisine avec ardeur, force et sincérité. Un homme qui refuse ennuyer et être ennuyé. Quand la routine pointe, … il vend et roule sa bosse jusqu’à une prochaine cantine. Libre il est. Il se laisse porter par la vie, les rencontres, il vit la dolce vita, croque du chocolat, se pose au musée d’Orsay, va à La pagode pour visionner un vieux film, boit un verre de son vin de méditation, –Le Vin Antique 2012 d’Alain Castex.

LE LIVRE

Aimons nous vivants

Cela commence par une couverture de tissu agréablement rugueux. Photo en bleu grisé mat, lettres cuivrées, brillantes.

Le portrait d’un beau, très beau garçon, qui regarde l’objectif droit dans les yeux. Difficile de deviner ce qu’il pense. Le sourire pourrait être éclatant, il est juste malicieux pour nous faire succomber au charme nonchalant de l’Italien. On devine sous les manches de la chemise blanche des tatouages et au doigt brille une bague au beau camé. Preuve d’un goût certain pour les belles choses. Mais qui se cache derrière ces photos glacées ? Un surdoué.

L’introduction vole, s’envole sous la plume de François Simon qui parle avec justesse de cet homme, de ses vies. Au denier point à la ligne, on en peut qu’être tombé en amour de Pierre !

Et nous prenons la route des établissements… Premier arrêt. Pierre a 21 ans. 1991-1999, La Bocca Paris. Ancienne boulangerie. Belle volière d’oiseaux de nuit, la beautiful Kate Moss aime « ses dents de l’amour », Monica Belluci y fait la fête et quelques maffieux siciliens y boivent du vin italien…

Cuisine instinctive d’inspiration italienne, généreuse. 

Besoin d’autre chose. Il vend et part apprendre auprès du chef triplement étoilé, Massimo Bottura. Paris lui manque. Apaisé, il revient.

Deuxième arrêt. Renaissance. 2001-2006. La Crémerie, Paris. Ancienne crèmerie. Carte courte. 16 couverts d’habitués comme Pierre Hermé. La Crémerie est aussi l’ambassade des vins dits « naturels ».

Troisième étape, 2007-2009 Racines.

Dans une ancienne imprimerie. La table ou l’Italie à table. Vins nature et vins vivants. Bons, très bons produits naturels pour une cuisine simplissime. Brute et spontanée pour la boboïtude naissante… qui découvre les vins vivants et s’encanaille joyeusement.

Ici il délègue la cuisine à un chef japonais Atsumi Sota mais son influence n’est pas loin, plane au-dessus des volutes justes et précises. Du goût et de la force. En 2008, Pierre Jancou remporte le prix Fooding de la meilleure cave à manger. Des plats pour ripailler.

Un jour il s’ennuie et est ennuyé. Il vend.

Pierre prend le large à nouveau, l’air des montagnes dans la Drôme du Diois. Il monte à Paris pour faire le chef dans C à vous. Il renoue avec la ville. Quatrième établissement. 2011-2014, Vivant & Vivant cave, dans une vieille oisellerie aux faïences merveilleuses, millésimées.  

Deux espaces sur la même adresse vivant table, le restaurant gastronomique et vivant cave, le bar à vin. Vivant un nom qui claque et chante la vie. Les bobos le suivent, les blogueuses l’adorent même et surtout lors du camouflet que Pierre inflige à un directeur des ventes du groupe Marie-Claire qui propose article contre invitation. Pierre sort de cette histoire plus vivant que jamais !

Pierre disparaît, quitte les rivages de la France, part, voyage, aime sa famille et revient.

Cinquième adresse. Terminus, certainement pas  ? 2015, Heimat ou la table de Molière. Hôtel particulier bâti sur les fondations de la maison de Molière qui y serait mort après avoir mangé un morceau de parmesan, après une représentation du Malade imaginaire…

Heimat ou « chez soi » en germanique. Pierre renoue avec ses racines du nord pour le nom et son Italie par la cuisine du sud, familiale et contemporaine. La cuisine qu’il aime manger, faire, transmettre et partager. Dans cette ancienne oisellerie, Pierre confie les cuisines à Michele Farnesi.

Mais chut, Pierre a un projet, autour du Pain. Quand et où, le livre ne le dit pas !… le chef est déjà parti vers d’autres cieux !

LES RECETTES

Ce livre n’est pas un livre de recettes mais un livre d’histoire, même si une trentaine de recettes emblématiques de chaque établissement ponctuent les pages. Des recttes joie de vivre, famille, générosité, appétit.

La bocca, « Pancetta toscana », « Crostone, aubergine brûlée, bufala » ou « Tomates du jardin » juteuses et envoûtantes, « Crostata di ricotta »

A la crémerie, « Soupe du bonheur », « Lapin & polenta » et « Gâteau de Zoé », sa fille, au chocolat.

Racines, « Foie gras mi-cuit, radis multicolores », « Tarte au chocolat, caramel beurre salé ».

Vivant table & Vivant cave : « Légumes de saison, risotto au bouillon et parmesan », « Salade d’orange, fenouil, noisettes et jus de betterave ».

Au-delà de ses recettes, simples et savoureuses, teintées d’influences françaises et italiennes, ce sont des recettes qui racontent des histoires, des fils de vie.

Avec des produits régionaux de très bonne qualité (charcuterie, fromages, antipasti…).

LE PHOTOGRAPHE

Marti Bruno

Le photographe Martin Bruno, frère
de la styliste Vanessa Bruno, a notamment publié Brut de Camargue : Cuisine sous influence locale (Actes Sud, 2012).Il illustre à merveille les pages du livre avec des photos sepia ou justes teintées de jolies filles et de vieilles voitures, des portraits, des phots de famille et d’amitié, des produits et des gestes. 

LES +

Pierre Jancou se dévoile avec pudeur sous les mots de François Simon.

Il livre ici une leçon de vie et de convivialité, de gastronomie et de culture.

La mise en page, la couverture version toile de jeans.

L’univers visuel et décalé.

LES –

Pas de témoignage direct du chef.

Il faut deviner à travers la plume et l’objectif ses prochains voyages.

 

LA TABLE VIVANTE –PIERRE JANCOU

EDITIONS SKIRA – 194 PAGES – 30 EUROS

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