Du pain, du vin, des oursins. Vous êtes en Corse, avec Nicolas Stromboni

 Pour Béatrice de Vigier, c’est le moment de repartir avec « La poule sur un mur », de faire un voyage jusqu’en Corse, de rêver, laisser balader ses idées entre la Castagniccia et les plages, célébrer l’île de beauté qui n’a pas volé son nom.

DU PAIN, DU VIN, DES OURSINS par Nicolas Stromboni – Ou les dessous insoupçonnables de la cuisine corse. 

Séquence émotion – Il fait beau, une de ces journées ensoleillées ajacciennes de l’été indien.

La ville offre ce que l’île a de meilleur, son ciel bleu, ses plages interminables, ses paysages à la beauté à couper le souffle mais aussi da cuisine fatale, faite pour réjouir et enchanter le palais. Quelques minutes à peine après avoir posé mes pieds ailés sur l’ile, me voilà au chemin des vignobles. Excitée, impatiente furieusement heureuse de rencontrer celui que le hasard des belles rencontres lors d’un diner avec vue sur le Golfe de Lava a propulsé dans le monde des auteurs de livres de cuisine… à succès. Nicolas Stromboni , avec un livre « DU PAIN DU VIN, DES OURSINS », certainement un de plus beau livre de cette fin d’année, un coup de coeur de F&S

Nous sommes installés dans une pièce intérieure à la lumière délicate et silencieuse, dans une douce ambiance feutrée. L’entrée en conversation est joviale, les yeux dans les yeux. Comme deux amis qui se sont quittés il y a peu et se retrouvent avec joie.

Une ou deux confidences plus tard, le sourire est toujours aussi affable. Nous passons aux choses sérieuses : qui est Nicolas Stromboni ?

L’AUTEUR – Nicolas STROMBONI

L’enfant prodigue du goût et de la joie !

Au fil des échanges, j’ai découvert un homme solaire, fortement ancré, planté dans la terre corse et la terre tout court. Il avoue : « Pour savoir où l’on va il ne faut pas oublier d’où l’on vient, laisser ses origines inspirer et guider le chemin de vie »

Nicolas Stromboni a commencé dans l’informatique à Montpellier, a eu plusieurs vies professionnelles mais très vite  est devenu un militant, un ambassadeur, un VRP du terroir corse et des ses richesses. En 2007 il achète une bâtisse, une ancienne coopérative qui se dresse depuis les années 30 aux portes d’Ajaccio. Il crée dans cet endroit banal, un nouveau concept « Le chemin des vignobles  … un raccourci vers le plaisir », une cave à vin mais pas que, un épicerie fine, un atelier de dégustation, un bar à vin, un lieu de partage où on peut sans complexe déguster, goûter, prendre des cours d’œnologie, apprendre les délicats accords mets &vins, tout simplement passer des moments d’amitié, de goût et de culture. Le voilà caviste, « un homme qui boit, trinque, déguste et fait déguste les autres », comme il se plait à dire !

En 2011, Nicolas Stromboli est élu meilleur caviste de l’année.

Il se laisse guider par sa passion pour l’ile et ceux qui la font jour après jour, producteurs, artisans, toutes celles et ceux qui comme lui se battent pour elle « qui a un trésor incomparable, inégalé, le patrimoine gastronomique le plus riche de France… »

Pour Nicolas, les produits ont une mémoire à réveiller dans les gestes et les paroles. Il se laisse guider par son instinct, sa curiosité, sa culture.

Il écoute, observe et distille au creux des oreilles de ses amis, clients, élèves (il enseigne à l’université de Corté) les anecdotes, secrets qui ne sont plus car les partager c’est les faire vivre, tout en sachant que sans le don ils ne seront pas magiques !

Il écoute l’histoire de son ile, se laisse imprégné de celle des contrées lointaines méditerranéennes qui ont un peuple fier, indépendant, vivant au-delà des guerres et des conflits. Nous parlons sans tabou des mouvements de peuples, et d’idées un phénomène aussi ancien que l’humanité.

Nicolas Stromboni est un généreux qui vit la vie sur son ile, sait s’en échapper pour revenir chargé d’idées et de bonne volonté.

Un homme singulier, singulièrement lucide. Il ne subit pas les aléas de l’insularité dans le silence et la résignation, en laissant courir (le fameux lascia corre corse), il construit la Corse et sa vie avec ambition et intelligence, avec la conscience des richesses de l’ile. En entrainant avec lui tous les savoir-faire de l’ile. Des gens qui défendent la corse et sa terre en la travaillant, la respectant viscéralement

Ces héros du quotidien, il le connaît, les aime et partage avec eux les pages de son livre. Ils fêteront ensemble avec vin, oreillettes et beignets le succès !

Lors de notre rencontre, Nicolas Stromboni n’avait pas de tablier de cuisine mais c’est tout comme. Nous avons partagé en toute simplicité mais avec grand appétit son assiette virtuelle, ses souvenirs et ses émotions.

Merci Nicolas !

LE SUJET

La Corse par un Corse qui la vit au jour le jour avec amour et respect. Un authentique Grand Seigneur qui a choisi l’excellence pour écrire sa Corse.

Avec la cuisine et l’authenticité d’un terroir, guidé par ceux qui l’interprètent, qui chassent, pêchent, sèment, cueillent, jour après jour.

Suivons Nicola sur un chemin de vignobles et de rencontres, de serrements de main, et d’accolades, de confidences les yeux dans les yeux, sans besoin de flots de paroles. Loin des sentiers battus et des clichés.

Au fil des pages, une relation intime, affectueuse se noue immédiatement avec l’auteur. Les mots ronds et doux parlent, partagent l’amour d’une terre, d’une ile, d’une famille, d’un clan, d’un terroir, d’une tribu d’amis, d’anciens. Hommage aux « minas » qui dans la chaleur de leur cuisine font ces recettes aujourd’hui recherchées, enregistrées, inscrites dans la mémoire collective avant qu’elles ne disparaissent. Les mots sont sésame pour les jeunes affamés de ces connaissances, des produits qui nourrissent les Corses depuis toujours : traditionnellement les farines de blé et de châtaigne, l’huile d’olive, les fromages de chèvres et brebis, les œufs, les légumes secs, le gibier, les produits des rivières et de la mer, les oursins et les clovisses… La charcuterie fumée, les fruits et légumes consommés frais en saison, séchés au soleil pour les réserves d’hiver, (je me souviens avec émotion de ces claies de bois recouvertes de Raisins, figues, tomates alanguies en plein soleil sur la terrasse de la maison familiale, au village).

Et le vin si important dans les repas de fête, de rassemblement lors d’un mariage, d’un résultat d’élections ou d’un … enterrement pour noyer le chagrin et ouvrir les cœurs.

La cuisine corse a toujours été « pauvre » et a essayé de tirer le meilleur parti des produits en les utilisant de manière multiple avec des cuissons différentes qui utilisent la même composition la même recette mais cuite différemment.

Et au final, un livre d’amour, qui raconte la Corse discrète de Nicolas Stromboni. Sauvage et fascinante. Pétrie de culture et d’idées. Fière et belle. Comme la cuisine traditionnelle et familiale de l’ile de beauté. Sublime et inclassable.

LE LIVRE

Couverture rigide avec une Corse stylisée dans des couleurs rarement utilisées pour illustrer l’ile. Du rose et du vert anis. Dans le monde de Nicolas Stromboni, les poissons sont roses comme les cochons et les chèvres ont la couleur de l’amande !

322 pages pour un voyage sur les routes de montagne entre vaches et chèvres, les routes de bord de mer entre plages et villages. Un livre à boire et à dévorer!

8 chapitres, dans lesquels interviennent un produit, son interprète et les recettes. 16 portraits de celles et ceux qui sont la Corse positive et singulière.

Le chapitre premier met en scène le cochon. A tout seigneur, tout honneur. L’histoire de la charcuterie corse d’hier à aujourd’hui. Portrait d’un authentique faiseur de charcuterie, aux yeux couleur topaze, Félix Torre, l’orfèvre de la charcuterie qui travaille comme un pâtissier au gramme près.

Un calendrier des diverses charcuteries, du figatelli au jambon, vous apprendra quand et comment apprécier, déguster la viande de porc.

Chapitre 2 la viande. Portrait d’un éleveur de talent qui sait vivre de ses terres avec respect de la qualité Paul Salini, qui sait laisser ruminer tranquillement ses bêtes au bord de mer.

Quelques pages sur le veau corse, sorti de l’anonymat par le createur-éméveur de la vache et du veau tigre Jacques Abatucci, militant du veau et de la terre.

Troisième chapitre, les fromages corses du lait de chèvres audacieuses, aventurières et indépendantes, de brebis gourmandes et paisibles. Focus sur le brocciu et sa fabrication. Portrait de Jean-André Mameli, guerrier du fromage. Portrait attendrissant d’une mina digne et magicienne, Bastienne Corazzini, qui sait valoriser au mieux les produits et faire de chaque jour une fête avec trois fois rien.

Il n’y a pas d’omelette au broccio sans œufs et il n’a pas pas de charcuterie sans.. couteau. Rencontre avec Paul Biancucci qui comme son père, dans la maison familiale de son village, Cuttoli, à quelques pas de la maison de Felix Torre, travaille le bois et joue de la lame pour créer des couteaux qui sont des œuvres uniques.

Chapitre 4, les produits de la mer. Poissons coquillages et crustacés, anguilles, huitres, oursins, moules, poulpes, daurades éclatent de belle santé et de saveurs. Portrait de Jean-Louis Guaitella, pêcheur devant l’éternel. Focus sur l’oursin. Le déguster est  est un chemin vers le paradis.

Chapitre 5, les fruits et légumes. Portait d’ Emilie Borel, oléicultrice au talent fou qui bouscule le petit monde de l’huile d’olive avec audace et panache.

Ce chapitre ne pouvait ignorer les herbes endémiques de la Corse comme la lattaredda ou la nepita. Portrait de Gisèle Lovichi qui soigne le cœur et l’esprit, fait fondre de bonheur avec sa ratatouille merveilleusement confite. Portrait de Félicien Balesi, hôtelier-restaurateur humaniste, ambassadeur de la cuisine corse.

Chapitre 6, les desserts. Portrait de la reine de la noisette, Raphaëlle Peignier qui joue un rôle primordiale dans la gastronomie corse.

Et les agrumes entrent en scène! La clémentine qui a choisi la Corse comme terre d’élection. Mais aussi le citron Jaune ou vert, la bergamote et son zeste qui parfume le thé Earl Grey. Le pamplemousse, le cédrat adoré des Romains qui ignoraient le citron, longtemps cultivé en Corse où il donne de délicieuses confitures et liqueurs. Le kumquat, la bigarade, l’orange amère qui se fait marmelade et dont la fleur est utilisée pour réaliser la fleur d’oranger. Le pomelo, le lime, le tangeros. Et l’orange rarement bleue mais souvent orange ! Toutes et tous travaillés, élevés avec le safran par l’entreprenante Anne Nocera.

Et la châtaigne, en beignets, en farine, en polenta…

Chapitre 7 les futiles mais utiles une succession d’utilités pas si frivoles : miel myrte et l’âne… !

Chapitre 8, les vins corses, leur histoire et leur spécificité, les cépages, les modes d’élévage, les femmes et les hommes dévorés par leur passion, qui font des vins de toute beauté,  : Gérard Courrèges, Yves Canarelli, Manu Venturini, Muriel Guidicelli, Pierre Acquaviva,

Je referme le livre avec la forte impression d’être au village.

Touts les images de l’enfance défilent , les bavardages entre le lavoir et la fontaine, les glissades sur les fougères sous la protection des fiers châtaigniers, les marches dans le maquis, les courses à l’épicerie-bar, les parties de loto, la fête du 15 août, les robes du dimanche pour aller à la messe, …les repas de famille longs et succulents…

LA PHOTOGRAPHE

SANDRA MAHUT

Elle a adoré croiser son regard avec les gens et paysages et cela se voit. Les photos parlent, racontent sans filtre la cuisine corse, ses acteurs, ses amoureux, ses produits. Les clichés sont pris sur le vif dans l’environnement naturel des gens et des produits, dans les rues du village, dans les caves, les cuisines, les jardins. Pas de studio étincelant mais la vie comme elle vient, comme elle est comme elle court jour après jour pour ces acteurs avec lesquels une vraie relation s’est nouée.

Un carnet de voyage en goût et terroirs sur la Corse, écrit avec poésie et amour.

 LES RECETTES

120 recettes et des poussières d’immortelle !

Les recettes ont un écho historique, culturel où la transmission joue le premier rôle. 120 secrets des saisons et des émotions pour une cuisine faite avec cœur.

120 recettes simples qu’on a envie de goûter, dévorer, partager. Des plats qui mijotent sur le coin de la cuinière, des goûts intenses, des desserts doux, rafraichissants. Chacun trouvera ou retrouvera ses recettes préférées souvenirs d’enfance, de vacances, de rencontres.

il y a le réconfortant « Parmentier de figatellu », le traditionnel « Veau aux olives’, les classiques « Cannelloni au broccio », l’irrésistible « Imbrucciate », les « Beignets au brocciu » ventrus, les « Storzapretti » , des gnocchis qui se prélassent dans la sauce tomate, les « Oeufs brouillés aux oursins« , la « Langouste à l’ajaccienne« , la « Salade marine de poulpes« , les « Aubergines à la bonifacienne« , les « Canistrelli à la noisette », le « Flan à la farine de châtaigne« , les « Frappes« …

LES +

Un livre de recettes, non, un livre de cuisine et de voyage, un livre qui raconte la vie en Corse d’un épicurien, d’un amoureux, d’un gourmand.

Un livre qui donne envie de pain sur lequel s alanguissent des oursins, de beignets au brocciu, de figatelli, d’un verre de vin… Un livre qui fait de nous lecteurs, des découvreurs.

 Forza cusina corsa !

LES –

Il manque la troisième dimension, les parfums et le goût !

DU PAIN DU VIN DES OURSINS – Nicolas STROMBONI – 

Editions MARABOUT – 29 €

@sandra mahut – éditions Marabout

@food&sens

 

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