GPT (aux super pouvoirs), IA (qui a le vent en poupe)… Tels étaient les mots qui animaient l’atelier Intelligence Artificielle au dernier Congrès des R&C. Thème de l’Atelier : L’intelligence artificielle vous connait-elle vraiment ?
Avant de savoir si L’IA nous connait, encore faut-il la connaitre et la définir. L’intelligence artificielle (IA) est un « processus d’imitation de l’intelligence humaine qui repose sur la création et l’application d’algorithmes exécutés dans un environnement informatique dynamique. »
Une fois cela dit, on s’aperçoit que l’IA est dans notre quotidien, elle se glisse partout, réalisant à notre place, des tâches et des services dont nous nous débarrassons sans nous interroger davantage sur les enjeux de cette incursion dans notre quotidien.
Elle joue avec des algorithmes, pique dans nos données personnelles, et se comporte comme nous ou presque. Danger ? Enjeux ?
Faut-il avoir peur de cet outil utilisé par une machine afin de reproduire des comportements liés aux humains, tels que le raisonnement, la planification et la créativité. Voilà le thème des réflexions et échanges de cet atelier passionnant en immersion totale au cœur de la révolution IA pour les acteurs de la gastronomie, de l’hôtellerie.
L’ensemble des participants ont commencé à être bluffé lorsque les Relais & Châteaux ont présentés le design et l’aménagement de chambres imaginées par l’IA dans les critères des R&C. Les thèmes des 4 chambres avaient soumis par la direction des R&C, comme une chambre dans l’esprit Lodge, une futuriste, l’autre esprit campagne … c’est dans le moindre détail que le design des chambres a été imaginé, des images 3D sans l’intervention d’un architecte décorateur, une profession qui risque comme beaucoup d’autres d’être affectées par la puissance de l’outil IA.
Place maintenant aux cartes de restaurant et à l’imagination par l’IA de plats qui pourraient se retrouver à table face aux clients R&C.
“Devons-nous avoir peur de l’intelligence artificielle ? L’intelligence artificielle peut-elle nous rendre plus forts”, présentée par By Yv Corbeil
Deux membres de Relais & Châteaux, Mar Suau du Son Brull Hotel & Spa (Majorque) et Jacques Pourcel, chef de L’hotel Richer de Belleval (Montpellier) avaient été choisis pour cette expérience, pour illustre le débat. Ils écoutaient attentivement, comme le nombreux public présent, les explications de l’expert du domaine, Yv Corbeil, directeur général et chef créatif de l’agence NIJI, dont le terrain de jeu favori est cette fameuse intelligence artificielle. L’invité-animateur du débat a raconté les expériences, les succès et limites actuelles dans l’utilisation de l’IA et a fait découvrir les malices et subtilités de cet outil encore imparfait mais qui déploie ses tentacules partout. Il a invité à débattre sur une question essentielle « L’intelligence artificielle peut-elle nous rendre plus forts ? »
« Open your mind »,Yv Corbeil, venu du Canada, définit l’IA comme un produit fonctionnel, certes encore imparfait, mais qui fait désormais partie du quotidien. Comme un jeu il a proposé de vérifier si l’IA nous connait vraiment.
Après analyses des données, 18 photos captées sur les réseaux sociaux, L’IA déclare « connaitre Jacques Pourcel mieux que lui-même peut se connaitre » – à prouver ! – et dévoile le menu de Jacques Pourcel. Elle a retenu les termes de daurades, muges, loups, sortie en mer, pour « penser » que Jacques Pourcel aimait le poisson et la pêche. En réponse à des photos prises dans le restaurant Iloli, IA affirme le goût du chef pour la cuisine japonaise. En réponse à des photos prises avec des chefs, l’ IA conclut que Jacques Pourcel collectionne les expériences culinaires et les objets de cuisine.
Ainsi nait un menu, quelque peu étonnant qui va provoquer sourires et étonnements.
Ci-dessous plats imaginés par L’intelligence Artificielle pour le chef J. Pourcel :
Entrée : délicat ceviche de daurade marinée, subtilement infusé d’agrumes et garni de fleurs comestibles. Positionné dans l’assiette selon la règle des tiers, le plat représente l’amour de l’utilisateur pour les fruits de mer et la tranquillité de la pêche, créant un paysage de rêve surréaliste où les poissons semblent bondir de l’océan sur l’assiette.
Plat : présentation artistique de magret de canard cuit sous vide avec une peau croustillante sur une réduction de vin rouge veloutée, faisant écho à l’ambiance raffinée des bistrots français. L’élément principal est stratégiquement placé selon la règle des tiers, entouré d’un vignoble miniature onirique qui émerge de l’assiette, invitant le convive dans un monde surréaliste de vin et de gastronomie.
Dessert : création fantaisiste de mousse de thé vert matcha, ressemblant à un petit jardin japonais avec un jardin de rocaille zen au chocolat et un bonsaï filé au sucre. Ce dessert rend hommage à l’esthétique japonaise et au talent artistique de la nouvelle cuisine, chaque élément étant positionné pour attirer l’attention, permettant aux convives de se lancer dans un voyage surréaliste à travers l’émerveillement gustatif et visuel…
Jacques Pourcel se montre stupéfait par ces images bluffantes, avec un environnement complexe, très chargé alors que son frère et lui-même comme la majorité des grands chefs, ont choisi un esprit dépouillé pour la présentation de leurs assiettes. Il reste étonné devant ces assiettes très chargées, autant pour le contenant que pour le contenu. Les interprétations des données sont mauvaises car Jacques Pourcel n’est pas passionné par la cuisine japonaise même si avec son jumeau Laurent ils ont un établissement à Tokyo. Il s’interroge sur le sous-vide, une pratique qui multiplie l’usage du plastique que toutes les chefs tendent à supprimer de leurs cuisines… Mais le résultat est bluffant, impressionnant même si les informations n’ont pas été bien traitées. Jacques Pourcel se demande si il a donné assez d’explications à traiter. Il s’étonne de ne pas voir dans les tableaux qui présentent les plats des femmes ou des hommes et note l’absence d’interaction humaine
Conclusion : faut il craindre l’IA ? Certes, elle pourra donner des idées mais l’exécution, la création se font derrière les fourneaux par les chefs qui tous les jours vont au marché et mettent ce supplément d’émotion, de vie, dans leurs assiettes. Pas de crainte dans la haute gastronomie et dans la gastronomie où il n’y a pas de place pour l’IA mais il va sûrement arriver que des non-restaurateurs vont débarquer, vont interroger l’IA pour créer des cartes…
Ci-dessous les plats imaginés par l’Intelligence Artificielle pour Mar Suau du Son Brull Hotel & Spa (Majorque) :
Jacques Pourcel reprend des mots de Guy Savoy qui se dit pas du tout inquiet et déclare » en cuisine il faut toujours s’adapter, le turbot n’a jamais la même épaisseur, les carottes n’ont jamais le même calibre, rien n’est parfait. Nos métiers exigent des capacités d’observation, d’improvisation et de spontanéité, beaucoup de qualités humaines que la machine n’a pas. »
Alors, même si vous pensez avoir l’âme d’un chef, d’un grand chef, si vous voulez jouer des poeles et des casseroles, porter toque et veste immaculées, mais n’avez jamais réussi un plat, l’IA va t-elle faire de vous un chef triplement étoilé ? Pas sûr, pas sûr du tout ! Elle va vous aider à créer un menu, à créer des plats en quelques minutes, elle va vous donner des images plutôt fantaisistes et bizarres, quelque peu loin des possibles et des réalisables mais elle ne vous donnera pas le talent et le génie créatif nécessaire pour être reconnu. Si l’envie de jouer avec l’IA vous prend, foncez mais n’oubliez pas, cela reste un jeu !