Sur Internet, c’est la food-manie ! Tout le monde adore parler et discuter de nourriture et c’est surtout sur les réseaux sociaux que ça se produit. En particulier, Instagram est la communauté la plus active dans le domaine gastronomique et, avec ses 208 millions de posts publiés sous le hashtag #food, la plateforme est devenu un outil à ne pas sous-estimer pour tout restaurateur qui veut survivre à la révolution gastro-numérique.
Les utilisateurs (plus de 800 millions pour ce réseau social basé sur l’image photographique est né il y a seulement 8 ans) ont tellement évolué dans leurs façons de vivre l’alimentation que les chefs sont maintenant obligés de communiquer en conséquence. Avec la multiplication des smartphones, en fait, une grande partie des internautes sont devenu capable de photographier et de distinguer si une image est attrayante ou non, au point que le partage typique des repas en famille ou des diner en tête à tête, s’est complétement déplacé sur les murs des réseaux sociaux en accordant une plus grande priorité à l’aspect visuel des plats souvent au dépends du goût. Les restaurants sont donc de plus en plus choisis que sur la base des photos de leurs clients et pas mal de professionnels ont dû reconsidérer la structure de leur propre activité.
Par exemple, la création du menu, le choix des mets à proposer et le dressage des plats doivent être désormais pensés dans une perspective insta-friendly. C’est ce qui a été fait par le Maxwells de Londres, qui grâce à son révolutionnaire CheeseBomb est devenu le restaurant le plus « instagrammé » de la planète. De même par le Matcha bar à Melbourne, qui – dans le sillage de la vente de son lait bleu – a vu ses profits atteindre des chiffres jamais vues auparavant. Quant au Carmel Winery de Tel Aviv, il propose depuis 2015 un menu complet servi dans des assiettes conçues spécialement pour être photographiées de qualité professionnelle à l’aide de smartphones.
Sans parler de tous ces restaurateurs ou ces grandes chaines alimentaires qui, pour faire face à la voracité visuelle des utilisateurs, ont du sortir des sentiers battus de la malbouffe et lancer de nouvelles modes qui ont su révolutionner un bon nombre d’habitudes alimentaires. Le petit-déjeuner, par exemple, est passé d’une simple tasse de lait chaud avec des céréales à un brunch bien plus photogénique à base de toast à l’avocat (à ce jour 500.000 photos ont été partagées avec l’hashtag #avocadotoast), tandis que des plats comme la glace noire, les gâteaux arc-en-ciel, les muffins licorne, le cappuccino matcha ou les bols de légumes, céréales et fruits commencent à être préférés à une moins belle mais bien plus saine entrecôte.
Bref, les choix de nombreux chefs sont désormais influencés par les diktats d’Instagram. Mais ce n’est pas tout, parce que ce sont aussi les designers, tout comme les DG des établissements, les responsables de l’événementiel ou de la communication qui sont confrontés à ce nouveau géant de la photo sur le net. Disposer d’une instagram identity qui puisse se démarquer des autres, est en fait devenu très important pour les restaurateurs et les chefs, mais l’obtenir ce n’est pas un jeu d’enfant. Il faut penser à un interior design qui stimule l’imagination des utilisateurs et qui les encourage à prendre une ou plusieurs photos, comme à l’entrée du Freemans Alley à New York ou dans l’une des salles bondées du groupe Big Mamma à Paris. Il faut aussi encourager la prise de photo de quelques manières que ce soit, pour exemple le Dirty Bones de Londres l’a fait en fournissant à ses clients un véritable kit Instagram (avec des selfie sticks, flash, trépieds et objectifs divers), Il faut savoir raconter son histoire et sa propre vie quotidienne au travers d’un profil bien soigné.
Des initiatives qui peuvent paraître folles et très coûteuses en terme d’idées, argent et temps mais qui, en réalité, grâce à la simple adaptation aux tendances digitales de notre époque, se sont transformées en millions et millions d’euros de promotion gratuite pour les restaurants mentionnés ci-dessus. Un point de vue à prendre en considération, bien sûr, mais est-ce que tout cela a vraiment amélioré le fonctionnement des restaurants et la vie des restaurateurs ? Les avis divergent et se multiplient et la bonne réponse est encore loin d’être trouvée, l’avenir le dira.