Les brèves de la Petite Cuillère, deuxième épisode

Il n’y a pas que la food dans la vie, il y a aussi les catastrophes naturelles. Alors avant de parler food, restos, miam et glou, voici quelques images de la crue de juin 2016 à Paris (et ça continue de monter au moment où j’écris).

 

Au moins, les cygnes sont contents. C’est déjà ça. (Vous les voyez ?)

CLANDÉ DEVIENT VIRTUS ET REÇOIT ALEXANDRE DELÉTRAZ
Oui, je devrais le savoir, c’est mon job, mais rien à faire, je ne sais pas où est passé Clandé. J’entends que l’enseigne vient de s’installer à Montparnasse, mais j’ignore les détails pour le moment. Le charmant petit restaurant du 8, rue Crozatier dont il avait déjà été question dans cette rubrique n’a pas disparu, il a juste changé de nom. Il s’appelle maintenant Virtus et il a toujours Chiho Kanzaki et Marcelo di Giacomo aux fourneaux. Il a aussi la sommelière Paz Levinson au tire-bouchon, ce qui équivaut à ajouter un bienfait à deux autres.

La semaine dernière, Virtus recevait le grand viticulteur valaisan Alexandre Delétraz, propriétaire de la Cave des Amandiers, pour un menu dégustation conçu autour de ces vins étonnants, d’une clarté et d’une pureté rares. Des vins de montagne, produits d’une « viticulture héroïque », comme disent les Italiens, pratiquée sur des pentes parfois vertigineuses, bénies par cent microclimats, riches de sols très diversifiés (dont du gneiss) et de nombreux cépages autochtones.

C’est un modeste, Alexandre Delétraz : sa retenue et sa sobriété, quand il parle de ses vignes et de ses vins, ne nous préparent pas aux surprises qui nous attendent dans le verre. Par exemple ce gamay de Fully qui, tout en gardant le fruité du cépage, se déploie en une profondeur et une dimension inhabituelles. L’air de la montagne, à n’en pas douter. Ou cette syrah souple et chantante, telle une côte-rôtie longuement affinée, mais plus jeune. Et ce superbe liquoreux Li Dzenëyou, à base de baies de petite arvine surmaturées sur souche et botrytisées, offrant de claires notes d’abricot et de safran.

Marcelo présente à Alexandre le canard rôti qu’il s’apprête à découper.

La cuisine de Chiho, belle et délicate, ne touche toujours pas terre. Chou-rave, tourteau et pêche. Cela se passe de commentaire.

TABLÉES CACHÉES REÇOIT MEHDI KEBBOUL (OÙ ? CHUT.)
Conséquence de l’engouement pour la cuisine qui anime la génération des vingt à quarante ans, de nouvelles façons de manger apparaissent. La floraison des clubs de restaurant éphémère en témoigne et Tablées cachées en fait partie. Cette petite société créée par trois passionnés organise des repas dans des lieux toujours différents, préparés par des chefs invités. Une fois par mois, ils invitent les abonnés de leur newsletter à découvrir le talent d’un jeune chef (parfois d’un sous-chef ou d’un chef de rang) dans un lieu secret ouvert spécialement pour l’occasion.

À cheval sur fin mai-début juin 2016, Tablées Cachées recevait Mehdi Kebboul, ex-chef du Bistrot Méricourt, assisté de Hliza Ayun, pâtissière. L’événement était complet plus d’une semaine à l’avance.

Quelques infos chuchotées ou passées par SMS rassemblent les convives au pied d’un vieil immeuble du haut Belleville. L’appartement est petit ; une longue table est dressée dans la pièce principale et la cuisine est équipée d’un large plan de travail en bois.

Les convives sont accueillis par un verre de brut royal Charles Legend, excellent champagne fruité, croquant et finement levuré.

Comme il est fréquent dans ce genre d’événement, le chef doit s’adapter aux moyens du bord. Le plan de travail est large, mais il n’y a que deux feux halogènes et un petit four. Mehdi et Hliza n’en parviennent pas moins à cuire et à assembler ce dîner en parfaite harmonie, coordonnant leur gestes tels des trapézistes.

Tandis que les invités passent à table et que le jour décline, Mehdi découpe ses magrets de canard rôtis.

Asperge blanche, jaune d’œuf, lisette laquée (pas encore ajoutée sur l’assiette), café.

Le même plat, fini, porté à table.

Rouget, aïoli, courgette, pesto et fraises des bois.

Canard, cerise et dragée, polenta aux fines herbes, carotte confite, jus au vin rouge et anchois.

Tapioca coco, abricot, concombre, verveine, granité melon-muscat.

Naturellement généreuse, gourmande et colorée, la cuisine de Mehdi s’est affinée depuis qu’il a quitté le Bistrot Méricourt. Le chef va plus vite à l’essentiel, concentre son propos. Ce repas était tout en saveurs intenses et maîtrisées.

Les vins sont choisis par Jocelyn. Ici un superbe riesling bio d’Alsace de Clément Lissner.

Adresses
Virtus, comme indiqué plus haut, est tout simplement à la même adresse que l’ex-Clandé. Voir ici pour les coordonnées et jours d’ouverture.
Quant à Tablées cachées, il vous suffit de vous inscrire à leur newsletter pour recevoir les annonces de leurs prochains dîners. Voici leur site. Vous pouvez aussi vous documenter sur leur page Facebook.

À la petite cuillère
Textes et photos : Sophie Brissaud

 

Voir les commentaires (0)

Publication connexe